mardi 29 janvier 2019

Climactualités - janvier 2019

ENSO

Le 29/01/2019 : climate.gov/enso

The Donald ayant décidé de mettre temporairement fin au shutdown (pour un financement de 3 semaines…) nous avons quelques informations laconiques de la part de la NOAA :
The surface of the tropical Pacific Ocean is nice and warm, but the atmosphere has yet to respond. Despite the waiting game, forecasters think there’s a 90% chance that El Niño will arrive soon and continue through the winter.
La surface de l'océan Pacifique tropical est agréable et chaude, mais l'atmosphère n'a pas encore réagi. Malgré l’attente, les prévisionnistes pensent qu’il y a 90% de chances que El Niño arrive bientôt et continue pendant l’hiver.
La dernière mise à jour officielle en date du 10 janvier nous disait ceci :
El Niño is expected to form and continue through the Northern Hemisphere spring 2019 (~65% chance).
El Niño devrait se former et se poursuivre dans l'hémisphère nord au printemps 2019 (~ 65% de chance).
Donc 90% de chance qu'il se produise « bientôt » et 65% (à peu près) qu'il dure pendant tout le printemps.
ENSO-neutral continued during December 2018, despite widespread above-average sea surface temperatures (SSTs) across the equatorial Pacific Ocean [Fig. 1]
La situation neutre d'ENSO s'est poursuivie en décembre 2018, malgré des températures de surface de la mer largement supérieures à la moyenne dans l'océan Pacifique équatorial [Fig. 1]
(par rapport à la moyenne de référence 1981-2010)
Moyenne des anomalies de températures de surface pour la semaine entourant le 2 janvier 2019 (par rapport à la moyenne de référence 1981-2010)
In the last couple of weeks, all four Niño indices decreased, with the latest weekly values at +0.2°C in the Niño-1+2 region and near +0.7°C in the other regions [Fig. 2].
Au cours des deux dernières semaines, les quatre indices Niño ont tous diminué, les dernières valeurs hebdomadaires étant à + 0,2 ° C dans la région Niño-1 + 2 et proches de + 0,7 ° C dans les autres régions [Fig. 2].
(par rapport à la moyenne 1981-2010)
Moyenne des anomalies de températures de surface dans les différentes régions El Niño (par rapport à la moyenne 1981-2010)
Positive subsurface temperature anomalies (averaged across 180°-100°W) also weakened [Fig. 3], but above-average temperatures continued at depth across most of the equatorial Pacific Ocean [Fig. 4].
Les anomalies positives de la température sous la surface (moyennes de 180° à 100°W) ont également faibli [Fig. 3], mais des températures supérieures à la moyenne se sont maintenues en profondeur sur la majeure partie de l'océan Pacifique équatorial [Fig. 4].
L'anomalie du contenu calorifique est calculée en partant de la moyenne des pentades de la période de base 1981-2010.
Moyenne des anomalies de températures de l'océan supérieur dans le Pacifique équatorial. L'anomalie du contenu calorifique est calculée en partant de la moyenne des pentades de la période de base 1981-2010.


Les anomalies sont des écarts par rapport aux moyennes des pentades de la période de base 1981-2010.
Section de la longitude et de la profondeur des anomalies de température (C°) du haut océan pacifique équatorial (0-300m) centrées sur la pentade du 3 janvier 2019. Les anomalies sont des écarts par rapport aux moyennes des pentades de la période de base 1981-2010.
The atmospheric anomalies largely reflected intra-seasonal variability related to the Madden-Julian Oscillation, and have not yet shown a clear coupling to the above-average ocean temperatures. Equatorial convection was generally enhanced west of the Date Line and suppressed east of the Date Line, while anomalies were weak or near average over Indonesia [Fig. 5].
Les anomalies atmosphériques reflètent en grande partie la variabilité intra-saisonnière liée à l'oscillation de Madden-Julian et n'ont pas encore montré de lien manifeste avec les températures océaniques supérieures à la moyenne. La convection équatoriale a été généralement renforcée à l'ouest de la ligne de changement de date et supprimée à l'est de cette ligne, tandis que les anomalies étaient faibles ou proches de la moyenne en Indonésie [Fig. 5].
Les anomalies OLR sont calculées à partir de la moyenne des pentades de la période de base 1981-2010)
Moyenne (W/m²) des anomalies du rayonnement en ondes longues sortantes (OLR) pour la période du 9 décembre 2018 au 3 janvier 2019. Les anomalies OLR sont calculées à partir de la moyenne des pentades de la période de base 1981-2010)
Low-level winds were near average, while upper-level wind anomalies were westerly over the eastern Pacific. The traditional Southern Oscillation index was positive, while the equatorial Southern Oscillation index was slightly negative. Despite the above-average ocean temperatures across the equatorial Pacific Ocean, the overall coupled ocean-atmosphere system continued to reflect ENSO-neutral.
Les vents dans les bas niveaux étaient proches de la moyenne, tandis que les anomalies de vent dans les couches supérieures étaient à l'ouest sur le Pacifique Est. L'indice d'oscillation australe traditionnel était positif, tandis que l'indice d'oscillation australe équatoriale était légèrement négatif. En dépit des températures océaniques supérieures à la moyenne dans l'océan Pacifique équatorial, le système global couplé océan-atmosphère a continué de refléter la neutralité ENSO.
The majority of models in the IRI/CPC plume predict a Niño3.4 index of +0.5°C or greater to continue through at least the Northern Hemisphere spring 2019 [Fig. 6].
La majorité des modèles du panache IRI / CPC prédit un indice de Niño3.4 supérieur ou égal à 0,5 ° C devant se prolonger au moins jusqu'au printemps 2019 dans l'hémisphère Nord [Fig. 6].
 Mise à jour le 19 décembre 2018.
Prévisions des anomalies de températures de surface (SST) pour la région El Niño 3.4. Mise à jour le 19 décembre 2018.

Regardless of the above-average SSTs, the atmospheric circulation over the tropical Pacific has not yet shown clear evidence of coupling to the ocean. The late winter and early spring tend to be the most favorable months for coupling, so forecasters still believe weak El Niño conditions will emerge shortly. However, given the timing and that a weak event is favored, significant global impacts are not anticipated during the remainder of winter, even if conditions were to form. In summary, El Niño is expected to form and continue through the Northern Hemisphere spring 2019 (~65% chance; click CPC/IRI consensus forecast for the chance of each outcome for each 3-month period).
Indépendamment des SST (températures de surface des mers) supérieures à la moyenne, la circulation atmosphérique dans le Pacifique tropical n’a pas encore montré de signes évidents de couplage avec l’océan. La fin de l’hiver et le début du printemps sont généralement les mois les plus favorables au couplage. Les prévisionnistes croient toujours que des conditions précaires d’El Niño vont bientôt apparaître. Cependant, compte tenu du moment choisi et de la préférence d'un événement faible, aucun impact global significatif n'est anticipé pendant le reste de l'hiver, même si les conditions devaient se former. En résumé, El Niño devrait se former et se poursuivre jusqu'au printemps 2019 dans l'hémisphère Nord (environ 65% de probabilité; cliquez sur les prévisions consensuelles du CPC / IRI pour connaître la probabilité de chaque résultat pour chaque période de trois mois).
 en gris = neutre, en rouge= El Niño, en bleu = La Niña.
Prévisions de début janvier concernant ENSO : en gris = neutre, en rouge= El Niño, en bleu = La Niña.

Il y a donc quelques chances d'avoir un faible El Niño ce printemps, par contre c'est du 50/50 pour le reste de l'année entre un El Niño et une situation neutre ; et quasiment aucune chance de rencontrer une La Niña (probabilité maximum de 12% en août-septembre-octobre)

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GISS L-OTI anomalies de températures vs 1881-1910 

Le 29/01/2019 : data.giss.nasa.gov

En raison du shutdown la carte du mois dernier n'a pas été actualisée, je la reprends donc ci-après :

Anomalies de températures pour la période décembre 2017-novembre 2018 par rapport à la période de référence 1881-1910.

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Coral Reef Watch

Le 29/01/2019 : coralreefwatch.noaa.gov

his figure shows the distribution of the lowest heat stress levels predicted by at least 60% of the model ensemble members. In other words, there is a 60% chance that the displayed heat stress levels will occur.
NOAA Coral Reef Watch's most recent Four-Month Coral Bleaching Heat Stress Outlook is below. This figure shows the distribution of the lowest heat stress levels predicted by at least 60% of the model ensemble members. In other words, there is a 60% chance that the displayed heat stress levels will occur.

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Climate Prediction Center 

Le 29/01/2019 : cpc.ncep.noaa.gov

Prévisions de tempêtes tropicales.

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Polar Science Center

Le 29/01/2019 : psc.apl.uw.edu

Toujours en raison du shutdown américain les données n'ont pas été actualisées, je reprends donc ci-après le texte du mois dernier :
The year 2017 finished out with an annually averaged sea ice volume that was the lowest on record with 12,900 km 3 , below 2012 for which the annually averaged volume was 13,500 km3 . This was even though extent and sea ice thickness were at record lows during the early months of 2017 but anomalousy little melt for the recent years (Fig 8), brought the ice volume back above record levels.
L'année 2017 s'est terminée avec un volume de glace de mer moyen annuel le plus bas jamais enregistré, avec 12 900 km 3, inférieur à 2012, pour un volume annuel moyen de 13 500 km3. Même si l'étendue et l'épaisseur de la glace de mer étaient au plus bas au cours des premiers mois de 2017, une fonte anormalement faible au cours des dernières années (Fig. 8) a ramené le volume de la glace à un niveau record.
Average Arctic sea ice volume in November 2018 was 9400 km3. This value is the 5th lowest on record about 1200 km3 above the November record that was set in 2012 with ~8200 km3 and about 250 km3 lower higher 2017. Ice volume was 53% below the maximum in 1979 and 36% below the mean value for 1979-2017. November 2018 ice volume falls just a slightly above the long term trend line. 
Le volume moyen de glace de mer dans l'Arctique en novembre 2018 était de 9 400 km3. Cette valeur est la 5ème plus basse enregistrée sur le record d’environ 1200 km3 de plus que le record de novembre établi en 2012 avec environ 8200 km3 et environ 250 km3 de moins que 2017. Le volume de glace était de 53% inférieur au maximum en 1979 et de 36% inférieur à la moyenne 1979-2017. Le volume de glace de novembre 2018 se situe juste au-dessus de la ligne de tendance à long terme.
Pour les cartes se reporter aux climactualités de décembre.

La synthèse est donc toujours la même :
  • l'année 2017 détient le record du volume minimal moyen de la banquise arctique, devançant l'année 2012 qui s'était fait remarquer par son record, qui tient toujours, à la fin de l'été boréal ; 
  • le mois de novembre 2018 est en 5ème position, avec 1200km3 de plus que le record de 2012 ; 
  • le volume de glace est environ un tiers inférieur à la moyenne 1979-2017 ; 
  • le mois de novembre 2018 se situe juste au-dessus de la tendance à long-terme […]

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Arctic Data archive system (ADS) 

Le 29/01/2019 : ads.nipr.ac.jp

Evolution de la banquise arctique.

Evolution de la banquise antarctique.


Historique des Climactualités (l'Arctique est mentionné en premier ; en bleu les valeurs minimales, en jaune les maximales ; la valeur entre parenthèses est la variation avec l'année précédente) 

Janvier 2019 : 13,48 + 3,01 = 16,49 (+0,35)
Décembre 2018 : 11,85 + 6,07 = 17,92 (-0,97)
Novembre 2018 : 10,54 + 13,26 = 23,8 (+0,48)
Octobre 2018 : 7,18 + 17,09 = 24,27 (-0,82)
Septembre 2018 : 4,68 + 18,01 = 22,69
Août 2018 : 4,8 + 17,7 = 22,5
Juillet 2018 : 6.67 + 16.44 = 23.11
Juin 2018 : 9.19 + 14.59 = 23.78
Mai 2018 : 11.02 + 10.65 = 21.67
Avril 2018 : 12.82 + 6.33 = 18.15
Mars 2018 : 13.87 + 3.50 = 17.37
Février 2018 : 13.68 + 2.31 = 15.99
Janvier 2018 : 12.68 + 3.46 = 16.14
Décembre 2017 : 11.76 + 7.13 = 18.89
Novembre 2017 : 10.07 + 13.25 = 23.32
Octobre 2017 : 7.82 + 17.27 = 25.09
Septembre 2017 : pas de stats

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Le forum de Davos, le meilleur endroit pour prendre des décisions en faveur de l'Humanité…


L'avenir du climatoscepticisme se prépare doucement.


dimanche 27 janvier 2019

Il parait que Skyfall n'a pas avancé d'un iota (ce n'est pas moi qui le dis !)

Il y a parfois des éclairs de lucidité involontaire chez les adeptes du site de climato-surréalisme appelé Skyfall.

Dans le Fil info de sceptiques 2018 on peut lire ce commentaire :
2701. joletaxi | 27/01/2019 @ 10:52

Cdt Michel e.r. (#2693),
il me semble que l’on avait déjà fait cela, au vu des discussions interminables sur le sujet, il y a …10 ans(fou comme le temps passe, …et que l’on a pas avancé d’un iota) […]
Comme c'est bien vu !

Effectivement « ils » n'ont pas avancé d'un iota, ou d'un pouce, « ils » sont restés scotchés en fait bien plus loin qu'il y a dix ans, si on y réfléchit bien leur pensée demeure avant l'an 1822 quand Joseph Fourier a publié sa Théorie analytique de la chaleur qui préfigurait ce que l'on appelle couramment aujourd'hui l'« effet de serre ».

Wikipédia nous apprend ainsi que :
Fourier est probablement l'un des premiers à avoir proposé, en 1824, une théorie selon laquelle les gaz de l'atmosphère terrestre augmentent la température à sa surface — c'est une première ébauche de l'effet de serre. Ses travaux sur la chaleur le poussèrent à étudier les équilibres énergétiques sur les planètes : elles reçoivent l'énergie sous forme de rayonnement à partir d'un certain nombre de sources — ce qui augmente leur température — mais en perdent également par radiation infrarouge (ce qu'il appelait « chaleur obscure ») d'autant plus que la température est élevée — ce qui tend à diminuer cette dernière. On atteint donc un équilibre, et l'atmosphère favorise les températures plus élevées en limitant les pertes de chaleur. Il ne put cependant déterminer avec précision cet équilibre, et la loi de Stefan-Boltzmann, qui donne la puissance du rayonnement du corps noir, ne sera établie que cinquante ans plus tard.
Fourier n'est pas l'inventeur de l'expression « effet de serre », cependant on peut en imaginer une esquisse dans son texte de 1824 où il écrit :

Fourier
« Que l'on se représente une enceinte solide fermée de toutes parts…» Source gallica.bnf.fr
Cette « enceinte solide fermée de toutes parts » ressemble étrangement ...à une serre de jardin !

Mais Fourier n'est bien sûr pas le seul, loin de là, à avoir planché sur le sujet ; il serait trop long de les citer tous mais on peut faire référence aux plus connus comme John Tyndall ou Svante Arrhenius qui ont tous les deux vécu et publié au 19ème siècle (je rappelle à ceux qui l'auraient oublié que nous sommes au 21ème siècle…)

En réalité, il faudrait même remonter au 18ème siècle avec Horace Bénédict de Saussure pour trouver les premiers germes de cet « effet de serre », mais n'allons pas si loin étant donné que même Fourier n'avait pas utilisé cette expression, laquelle, d'après Wikipédia, n'aurait été créée que dans les années 1980 :
L'expression synthétique effet de serre provient de la vulgarisation au début des années 1980 des résultats alarmants des recherches climatologiques. Alors que les climatologues analysent l'impact du dioxyde de carbone sur le climat sans parler d'effet de serre7, les premières alertes pour infléchir les décisions politiques sont lancées au début des années 1980 en utilisant cette expression8, reprise par la suite dans des rapports de plus en plus médiatisés, comme le rapport Brundtland (1987).
Les climatologues (les vrais) préfèrent utiliser l'expression « forçage radiatif », ce qui ne les empêche pas de parler d'« effet de serre » quand ils s'adressent au grand public ; c'est ce que l'on appelle utiliser une image facilement compréhensible pour une personne qui n'a pas les connaissances scientifiques suffisantes pour comprendre des mots trop savants.

Mais sur Skyfall « ils » en sont toujours à appeler l'effet de serre le « bidulator », un nom ridicule qui ne sert qu'à bien faire comprendre aux « non-initiés » (i.e. ceux qui ne font pas partie de la secte) que l'effet de serre n'est rien qu'une supercherie et que le gentil CO2 n'est aucunement mis en cause dans une (non)augmentation des températures qui sont uniquement dépendantes du soleil (fermez le ban)

Le même joletaxi (un parent de Vanessa Paradis ?) continuait d'ailleurs ainsi :
Chaque fois que j’interviens ailleurs(je suis maintenant exclus sur la plupart des médias mainstream), je pose la question: expliquez moi l’effet de serre, et pour lever le doute, montrez moi un corpus expérimental valide, pour me oter tout doute.je n’ai évidemment jamais de réponde, et c’est en cela que cette escroquerie est géniale, la majorité des gens n’y cromprend rien, et se range au consensus construit de toute pièce.
Il est important de rappeler sans cesse que l’articulation de toute cette fable repose sur des bases bien fragiles.
Le pôvre se lamente de ne pas être compris quand il émet des doutes...et ce qui est génial c'est quand il assure apparemment sérieusement que « la majorité des gens n’y cromprend rien », ce en quoi je suis entièrement d'accord avec lui, faisant moi-même partie de « la majorité des gens », mais moi au moins je ne tombe pas facilement dans l'argument d'incrédulité qui s'articule comme suit : « je ne comprends pas X, donc X est faux ou ne peut pas exister », avec la variante « je ne comprends pas X, donc les scientifiques ne peuvent pas comprendre X non plus ».

Et là encore un éclair de lucidité involontaire quand notre chauffeur de taxi termine par :
Mais, personnellement, je pense que ce combat est perdu […]
Ben oui mon coco, ton combat est perdu, mais pas pour les raisons que tu crois.

Et un autre adorateur, pardon, un autre intervenant acquiesce :
2702. Célestin | 27/01/2019 @ 11:05

joletaxi (#2701), oui, vous avez raison, ce combat est perdu, je le pense comme vous. Et pour discréditer les derniers climato-réalistes, un journaleux écrivait que ces derniers sont des personnes âgées qui, par pur égoïsme, refusent de voir la réalité parce que ce sont ce sont eux qui devront fournir un effort important (entendez par là, payer des taxes evidemment).
Encore un qui a tout compris à l'insu de son plein gré.

samedi 26 janvier 2019

Nic Lewis a trouvé un nouvel os à ronger

Après le papier Resplandy, c'est au tour de Cheng (2019) de faire les frais de l'acuité visuelle particulièrement développée (i.e. il ne voit que ce qu'il veut voir et ignore ce qui le dérange) de Nic Lewis ; dans Is ocean warming accelerating faster than thought? il cherche la petite bête et tient à le faire savoir urbi et orbi.

L'auteur principal (Lijing Cheng) répond à Nic Lewis qui lui répond sans que, jusqu'à présent, Cheng lui re-réponde à son tour, il faut dire que ça pourrait durer longtemps, chacun restant campé sur ses positions en admettant très peu de concessions à la partie adverse (il faut toujours faire des concessions pour paraitre crédible, mais suffisamment peu pour que cela ne démolisse pas sa propre argumentation)

Je n'ai personnellement aucune idée de qui a raison et qui a tort, mais je remarque un commentaire intéressant dont voici le début :
scienceofdoom | January 21, 2019 at 9:08 pm | Reply

The author of that article has no idea about atmospheric radiative physics.

There is an equation which is derived from first principles, the equation of radiative transfer. It calculates absorption and emission through the atmosphere.

It is unknown to the author of that article, along with most of the entertainingly named “climate skeptic” websites. (Ok, I know half of you are just running parody sites).
L'auteur de cet article n'a aucune idée de la physique radiative atmosphérique.

Il existe une équation dérivée des premiers principes, l'équation du transfert radiatif. Elle calcule l'absorption et l'émission à travers l'atmosphère.

Elle est inconnue de l'auteur de cet article, ainsi que de la plupart des sites Web « climatosceptiques », nommés de manière amusante. (Ok, je sais que la moitié d’entre vous n’utilisez que des sites parodiques).
« L'auteur de cet article » est de toute évidence Nic Lewis, qui n'aurait donc « aucune idée de la physique radiative atmosphérique »...

Ajout suite à la remarque de BenHague : « l'auteur de cet article » n'est pas Nic Lewis mais un obscur Bud Bromley...

Moi je pose (et non pause) mon joker, je laisse plus intelligent que moi réfléchir au schmilblick et tirer une conclusion qui ait un sens.


Encore une belle perle sur Skyfall

Dans le dernier bulletin voici un commentaire imprégné de sagesse toute skyfallienne :
39. andqui | 25/01/2019 @ 19:54
JC (#38), En ce qui concerne 2018, il est dit dans les médias que c’est l’année la plus chaude depuis1900; l’énoncé contient en lui-même sa réfutation: cela veut dire qu’en 1900 on a eu une année aussi chaude qu’en 2018. Or en 1900, l’explication par le RCA est impossible; seule la variabilité naturelle est convoquée. Il n’y a aucune raison qu’il n’en soit pas de même en 2018 (au nom du principe de parcimonie) Pour chaque « record » de ce type, l’explication naturelle s’impose par construction.
Ben voyons !

Et en plus il trouve quelqu'un pour l'approuver :
40. JC | 25/01/2019 @ 20:57
andqui (#39),
Bien vu !
Evidemment entre aveugles on se comprend parfaitement.

Dans un billet de 2018 intitulé Nous n'avons besoin que de 60 stations de surface ! je faisais référence à un outil que l'on peut utiliser sur le site tools.ceit.uq.edu.au.

Si vous choisissez la France métropolitaine uniquement voici le graphique que vous obtenez :

Evolution des températures en France depuis 1900.

Deux remarques qui sautent aux yeux :
  1. le site ne donne aucune température antérieure à 1900, on peut présumer que c'est parce qu'il n'existe pas de données suffisamment fiables avant cette date ;
  2. en 1900 la température était au niveau zéro de la courbe d'anomalies, aujourd'hui nous en sommes à +1,5°C !
A supposer qu'il y ait eu des données disponibles avant 1900 il est fort peu probable que « cela veut dire qu’en 1900 on a eu une année aussi chaude qu’en 2018 » comme l'imagine le décérébré de service.

Je ne parlerai pas des autres commentaires ayant précédé cette perle, pourtant cela pourrait faire un assez beau collier.

Ah si quand même, je ne peux résister à celle-là qui vaut son pesant de cacahuètes :
37. scaletrans | 25/01/2019 @ 18:59
zimba (#36),
La « reprise » en question est essentiellement due à El Nino, sinon les variations sont dans la fourchette de précision des mesures.

jeudi 24 janvier 2019

Les océans nous montrent aussi une courbe...en forme de crosse de hockey !

Sous le titre New Ocean Heat Content Histories le site RealClimate publie un article concernant deux récentes études qui, avec deux approches différentes, reconstruisent le contenu en chaleur de l'océan (Ocean Heat Content, ou OHC)

Quand on dit « l'océan  » on veut bien entendu signifier qu'il s'agit « des océans » (je préfère préciser à l'attention de ceux qui pourraient me reprocher de croire qu'il n'y a qu'un seul océan sur la planète…)

Pour le béotien que je suis la différence essentielle est que la première de ces études, Global reconstruction of historical ocean heat storage and transport, se focalise sur les variations du OHC depuis le 19ème siècle, alors que la deuxième, The Little Ice Age and 20th-century deep Pacific cooling, remonte bien plus loin dans le temps puisqu'elle retourne carrément à la naissance du petit Jésus !

En fait il existe des différences plus subtiles entre ces deux études qui nous sont expliquées dans l'article de RealClimate et qui viennent, comme le dit Gavin Schmidt, de leur conception (design) : leurs buts (goals) et méthodologies sont très différents, ainsi je n'évoquerai ici que la deuxième afin de justifier le titre de ce billet (aucune crosse de hockey n'est visible dans aucune courbe remontant seulement au 19ème siècle, à moins de ne parler que du manche…)

L'étude Gebbie and Huybers (2019) nous montre en effet trois magnifiques courbes en crosse de hockey dont deux…qui ne sont pas terminées !

Fig. 4 Regional surface temperature variations and changes in ocean heat content over the Common Era.
La première courbe, celle du haut, représente l'évolution de la température de surface dans quatre régions (en couleurs) ainsi que de manière globale (en noir) ; les quatre régions sont l'Antarctique (ANT), l'Atlantique nord (NATL), la sub-Antarctique (SUBANT) et le Pacifique nord (NPAC).

ATTENTION, l'échelle des abscisses n'est pas partout la même, de l'an zéro (qui n'existe pas vraiment mais bon) à l'année 1750 les subdivisions ont une valeur de 200 ans, alors qu'à partir de 1750 elles correspondent à 50 ans seulement ; par conséquent si l'on étalait la partie gauche pour respecter l'échelle de droite on retrouverait la courbe en crosse de hockey qui est toujours d'actualité, avec son renflement au « moyen âge » :

Source wikimedia
On notera que l'« optimum » de surface se situe aux alentours de l'an mil dans la courbe en crosse de hockey, alors qu'on le trouve 400 ans plus tôt dans la récente étude…

Ce qui est étrange c'est que l'optimum de la couche océanique allant de 2000 mètres jusqu'au fond est atteint...en l'an mil justement !

Ce que j'ai compris de l'étude c'est que la chaleur de l'atmosphère se diffuse très lentement dans les océans, ce qui explique :
  • l'écart entre la courbe de surface et celle correspondant à l'océan profond (environ 400 ans donc) ;
  • le fait qu'en l'an 2000 la courbe de l'océan profond commence à peine à remonter après un siècle et demi de réchauffement de la surface.
Le deuxième point ci-dessus signifie que dans 400 ans la courbe de l'océan profond aura largement dépassé les niveaux de l'an mil, nous donnant ainsi une courbe en crosse de hockey supplémentaire que l'on ne peut pas discerner aujourd'hui (mais avec de l'imagination il suffit de prolonger la courbe et bingo !)

Si un lecteur ayant des connaissances sur le sujet (je pense essentiellement à deux au maximum, mais j'aimerais qu'on me surprenne…) pouvait m'expliquer la différence de 400 ans concernant les températures de surface lors de l'« optimum médiéval » (en l'an 600 ou 1000 ?) je lui en serais reconnaissant.

Dans un texte additionnel Gavin Schmidt précise :
Given the average transit time for the deep Pacific (1000’s of years), it is expected that the deep Pacific won’t be in equilibrium with surface climate changes over shorter time scales.
Compte tenu du temps de transit moyen pour le Pacifique profond (plusieurs milliers d’années), on s’attend à ce que le Pacifique profond ne soit pas en équilibre avec les changements climatiques de surface sur des échelles de temps plus courtes.
Je pense que la circulation n'étant pas la même partout, le temps de transit des eaux dans le Pacifique profond est (beaucoup) plus long que dans l'Atlantique ou d'autres océans (c'est du moins ma compréhension toute personnelle)

Schmidt évoque une autre intéressante étude (Volcanic signals in oceans) parlant du temps de « persistance » (lingering) dans le cas d'une éruption volcanique en évoquant deux exemples, le Tambora (en 1815) et le Pinatubo (en 1991), qui nous montrent cet effet :

(a) Ensemble mean sea surface temperature (SST) anomaly (kelvins) for the Tambora ensemble averaged globally, over ocean, and over land. (b) Ensemble mean ocean heat content (1022 joules) and (c) thermosteric height anomalies (millimeters) for 300‐m, whole‐depth ocean and for the layer below 300 m for the Tambora ensemble. (d) Same as Figure 2a, but for the Pinatubo ensemble. (e) Same as Figure 2b, but for the Pinatubo ensemble. (f) Same as Figure 2c, but for the Pinatubo ensemble. The yellow shading shows 2σ ensemble mean variability.

Le résumé de l'étude nous précise dès le début que
Sulfate aerosols resulting from strong volcanic explosions last for 2–3 years in the lower stratosphere. Therefore it was traditionally believed that volcanic impacts produce mainly short‐term, transient climate perturbations. However, the ocean integrates volcanic radiative cooling and responds over a wide range of time scales.
Les aérosols de sulfates résultant d'explosions volcaniques intenses durent 2 à 3 ans dans la basse stratosphère. Par conséquent, on croyait traditionnellement que les impacts volcaniques produisent principalement des perturbations climatiques transitoires à court terme. Cependant, l'océan intègre le refroidissement radiatif volcanique et répond sur une large plage d'échelles de temps.
On voit parfaitement sur les graphiques ci-dessus que si l'atmosphère « récupère » effectivement assez vite dans les années qui suivent chaque éruption, les effets dans les océans se font eux sentir sur des périodes beaucoup plus longues.

Pour terminer, Gavin Schmidt met cependant en garde contre les limites des modèles utilisés (ainsi que des observations anciennes) dans les deux études dont il est question :
[…] there are still imperfections in the ocean models being used and the systematic biases in old observations are always being looked at.
[…] il existe encore des imperfections dans les modèles océaniques utilisés et les biais systématiques dans les observations anciennes sont toujours examinés.
Comme toujours nous avons les rigolos de service qui tiennent à intervenir pour montrer qu'ils n'ont pas compris grand chose, comme celui-ci :
2 Al Bundy says:
23 Jan 2019 at 2:04 PM
Time out. The common era OHC graph says that the ocean was way warmer 1000 years ago, and it sure looks like a cycle. So, if I were a denier I’d say the that graph destroys the whole alarmist story. We have tons of time before things get hotter in the ocean than 1000 years ago. How did coral survive?
Dissonance is like an itchy spot in the middle of your back. Somebody pass me a backscratcher, please.
Lui non plus ne se considère pas comme un denier, mais on notera les nombreuses inepties contenues dans les quelques lignes de son commentaire, juste pour le fun :
  • il n'a pas compris que l'océan profond peut mettre des milliers d'années à ressentir l'impact de l'évolution de la température dans l'atmosphère ;
  • il croit qu'il s'agit d'un cycle ;
  • il qualifie les scientifiques d'« alarmistes » ;
  • il croit que le corail prospère à plus de 2000 mètres de profondeur ;
  • il attribue aux autres sa propre dissonance.

Maintenant voyons voir ce que mes deniers à moi ont à raconter sur le sujet.

Juste pour le fun.