mercredi 20 septembre 2017

L'Arctique fait de la résistance

Un article (et non arctique) de CarbonBrief nous informe que la banquise arctique a atteint le 13 septembre son minimum :
  • Arctic sea ice has dwindled to its summer minimum for 2017, with its smallest extent for the year clocking in at 4.64m square kilometres (sq km) on 13 September.
    • La banquise Arctique a atteint son minimum d'été pour 2017, avec sa plus petite étendue pour l'année à 4,64 millions de km2 (kilomètres carrés) le 13 septembre.
Cela donne, par rapport à la moyenne 1981-2010, une baisse de 1,58 millions de kilomètres carrés, plaçant 2017 en 8ème position depuis que les relevés satellites existent (1978-79) ; le record demeure "entre les mains" de l'année 2012 avec 3,39 millions de kilomètres carrés.

A noter qu'en mars dernier cette même banquise avait atteint sa plus faible extension hivernale, et même l'Antarctique avait été exceptionnellement peu étendue, comme le titrait CarbonBrief à l'époque (le 22/03) :
  • The Arctic and Antarctic have experienced record lows in sea ice extent so far in 2017, according to the latest data from the US National Snow and Ice Data Centre (NSIDC).
    • L'Arctique et l'Antarctique ont connu des niveaux record en étendue de banquise jusqu'à présent en 2017, selon les dernières données du National Snow and Ice Data Centre (NSIDC).



Cela me donne l'occasion de mettre à jour mes données personnelles tirées du site ADS.

La dernière fois c'était en avril, avec un billet intitulé Quoi de neuf aux pôles ?  ; je vais reprendre le même système pour garder une certaine cohérence, même si j'ai conscience des limites de l'exercice.

  • février-mars 1980's (moyenne): 2,82 + 15,60 = 18,42
  • septembre-octobre 1980's (moyenne) : 7,23 + 18,60 = 25,83
  • septembre-octobre 2012: 3,18 + 19,35 = 22,53
  • février-mars 2016 : 2,66 + 13,96 = 16,62
  • août-septembre 2016 : 4,02 + 18,50 = 22,52 
  • mars 2017 :  2,15 + 13,88 = 16,03
  • septembre 2017 : 4,47 + 18,06 = 22,53
Je rappelle mes choix, comme d'habitude, et afin que mes lecteurs soient amplement informés de mon approche et de ses limites :
  • j'ai pris la moyenne des années 1980 parce que c'était la plus ancienne à ma disposition
  • j'ai pris septembre-octobre 2012 parce que cela correspond au fameux record concernant l'Arctique
  • j'ai repris février-mars 2016 de mon premier billet
  • j'ai repris août-septembre 2016 de mon deuxième billet
  • j'ai repris mars 2017 de mon troisième billet
  • j'ai pris septembre 2017 parce que c'est le plus récent et que cela correspond au minimum de l'Arctique
A chaque fois je note sur la courbe la valeur correspondant au maximum et au minimum de chaque banquise, mais cette valeur n'est pas forcément à la même date, le même jour, c'est-à-dire que le maximum d'une banquise n'a pas lieu forcément le même jour que le minimum de l'autre banquise, mais je pense que ce qui est important est de sommer les deux à leur maxi-mini afin d'avoir une idée globale de l'étendue pour un mois donné.

On remarquera donc, avec ces valeurs, qu'en 2012, année du fameux record de la banquise arctique, le total des deux banquises était de 22,53m de km2, soit exactement le même montant qu'en septembre 2017 ; or comme la banquise arctique a atteint seulement son 8ème minimum, cela veut simplement dire que l'Antarctique a bien baissé ! En 2012 la banquise antarctique était à 19,35 alors que cette année elle a atteint "seulement" 18,06...

Comme une image vaut mieux qu'un long discours, la preuve avec les graphiques :

Extension de la banquise arctique en septembre 2017.

Extension de la banquise antarctique en septembre 2017.

Les beaux jours de la banquise antarctique semblent derrière elle, elle est "rentrée dans le rang", quant à l'arctique, ce n'est que partie remise, la tendance à long terme est clairement à la baisse, surtout si l'on considère sa masse avec le site PIOMAS (le site "officiel" étant inaccessible, j'ai puisé chez Neven pour fournir l'information) :


Si en superficie l'année 2017 est la 8ème, il semblerait qu'en ce qui concerne le volume de glace cette année talonne de très près l'année 2012 ; en tout cas nous sommes très au-dessous de la moyenne 1979-2016.

Et pour finir la courbe depuis 1979 avec ses hauts et ses bas, et la tendance :


Comme on le voit il n'y a pas à se réjouir de la "remontée" de cette année, il y en a eu bien d'autres auparavant, mais globalement les baisses l'emportent nettement sur les hausses, ce qui nous fait penser que bientôt le passage du nord-ouest sera praticable en été par de simples plaisanciers un peu téméraires et pas frileux pour deux sous ; pour l'instant ils sont rares à l'avoir réussi, avec des bateaux à coque renforcée, ce qui n'est pas le cas de notre courageux (ou inconscient ?) Yvan Bourgnon qui tente de se frayer un chemin en solitaire avec sa (littéralement) coque de noix sans cabine et qui voit enfin le bout du tunnel...

  • Hier alors qu’il était encalminé sur une mer d’huile, Yvan a annoncé la bonne nouvelle du jour. Etait-ce une pêche fructueuse ? Un spectacle unique comme une aurore boréale ? Une amélioration au niveau des crevasses de ses mains ? Du plaisir pris à la barre ?
  • Non vous n’y êtes pas du tout : « Aujourd’hui, c’est dingue mais j’ai pu enlever mon bonnet, je crois que c’est la première fois depuis le départ ! C’est fou ce que ça fait du bien de sentir le soleil me chauffer le crâne ! »
  • Il est vrai que la température qui a frôlé les 10 degrés, sous un soleil éclatant, arrivait à point pour réconforter le marin qui souffre énormément du froid la nuit, depuis qu’il a perdu son duvet. Bien sûr le spectacle des aurores boréales le réjouit, mais la sensation offerte par la caresse des rayons du soleil surpasse tout quand on sort d’une telle privation !
  • Yvan a tellement attendu à diverses reprises, soit que la glace le laisse passer, soit qu’une tempête se calme, que la pétole qui s’installe et devrait durer toute la journée de mercredi, ne l’impatiente même pas : « J’arriverai quand j’arriverai, c’est dommage que je n’ai pas embarqué plus de livres, c’est un moment idéal pour la lecture. J’ai vu des globicéphales dans l’après midi et parlé à la vhf avec un voilier qui faisait route au moteur. Bon sang, si on m’avait dit avant de partir que je passerais plus de 70 jours en mer ! »
  • Yvan profite de ce calme pour soigner son alimentation, les conditions extrêmes lui ayant souvent fait négliger ses repas. En surpoids d’une dizaine de kilos au moment de partir, Yvan les a perdus et le froid lui est plus difficilement supportable à cause de cela.
  • Progressant hier à 1,5 nœud, Yvan croit toujours en la possibilité d’arriver vendredi à Nuuk, avec le retour du vent.
Rappelons à ceux qui pensent que ce passage a été franchi sans problème à plusieurs reprises, sous-entendant par là qu'il n'y aurait en 2017 aucune condition exceptionnelle, i.e. que la banquise ne serait pas exceptionnellement réduite cet été, qu'il s'agit bien d'une première mondiale, puisque Yvan Bourgnon est parti en solitaire sur un catamaran de sport, sans moteur ni assistance ; on pourrait penser qu'il a été imprudent, mais connaissant ce genre d'individu j'imagine qu'il a dû se dire que s'il attendait des conditions "un peu plus favorables " quelqu'un d'autre aurait pu lui chipper son record, c'est pour cela à mon avis qu'il s'est "jeté à l'eau" cette année en croisant les doigts pour que la glace le laisse passer ; et c'est ce qui s'est produit, on peut lui tirer notre chapeau.

Pour l'Antarctique j'ai vu il y a deux jours un reportage tard dans la nuit, sur LCI, qui parlait de la base Dumont d'Urville (je pense qu'il s'agit de ceci) ; une scientifique évoquait la glace qui s'étendait par endroits anormalement, rendant la vie des manchots plutôt difficile, car ils ont bien davantage de chemin à parcourir pour aller se baigner ; elle expliquait notamment que cette glace était de très mauvaise qualité, faite de plusieurs couches "pourries" et qu'il fallait faire attention quand on marchait dessus (le poids d'un humain n'est pas celui d'un manchot...) ; l'extension de la banquise antarctique est donc en quelque sorte, si je peux employer cette image, l'arbre qui cache la forêt : ce qui est important ce n'est pas ce que l'on voit depuis le ciel, pour s'en rendre compte il faut aller sur le terrain, et c'est ce que font les scientifiques (les vrais, pas ceux qui prétendent l'être tout en restant dans leur fauteuil)


source lci






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