samedi 31 décembre 2022

Le visionnaire Phillips O'Brien

 L'année touche à sa fin, je profite de quelques instants de calme avant la tempête de cette nuit pour vous faire profiter d'un article de Phillips O'Brien daté du 14 janvier 2022, soit un mois et dix jours exactement avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie (en fait il s'agit de la deuxième phase d'une invasion commencée en 2014 avec l'annexion de la Crimée et les troubles fomentés dans le Donbass)

L'article s'intitule The New Appeasement, en voici quelques extraits traduits par mes soins.

[...] Tucker Carlson, de Fox News, et Katrina vanden Heuvel, de The Nation [...] Ces deux-là, qui viennent de l'extrême droite et de l'extrême gauche de la politique américaine, sont unis pour presser les États-Unis de jeter l'Ukraine aux loups - ou plus exactement à la Russie de Vladimir Poutine. Ils sont rejoints en cela par une foule de penseurs en relations internationales, qui aiment à se qualifier de "réalistes" et qui, à l'instar de Chamberlain, affirment qu'ils font simplement preuve d'une grande fermeté dans leur analyse de la structure du pouvoir dans la région. 

[...]

Pourtant, loin d'être les durs réalistes comme ils se décrivent, ces "apaiseurs" (appeasers) modernes font passer Neville Chamberlain pour un Churchillien. 

[...] 

Toutefois, lorsqu'il s'agit de l'Ukraine et de la Russie d'aujourd'hui, ces nouveaux "apaiseurs" surestiment considérablement la force de la Russie, sous-estiment la capacité de l'OTAN à dissuader la Russie (même sans soutenir directement l'Ukraine militairement) et font preuve d'une volonté grotesque de sacrifier une démocratie en plein essor à une nation autoritaire qui souhaite la dominer. Qui plus est, leur approche est plus susceptible de conduire au déclenchement d'une guerre que de la prévenir.

[...]

Si nous avons retenu une leçon au cours des deux dernières décennies, c'est que les opérations militaires sont coûteuses, généralement contre-productives et qu'elles risquent constamment de tourner au désastre pour les économies les plus riches et les plus avancées, sans parler des économies faibles. Il est certain que les déploiements militaires russes de ces vingt dernières années, de la Géorgie à la Syrie, ont révélé des lacunes importantes. Si la Russie était assez stupide pour attaquer l'Ukraine, cela mettrait à l'épreuve son armée comme jamais depuis la fin de la guerre froide. Elle entamerait une guerre à grande échelle, en utilisant une armée de conscrits, à un moment où la population russe montre une résistance significative à son propre gouvernement. Nous ne connaissons pas l'état de l'opinion publique russe, car le pays n'est pas libre, mais il est clair qu'il existe un réel malaise dans la société russe quant à la nature autocratique et oppressive du régime.  

De plus, ils déclencheraient une guerre avec un ennemi qui, en raison du comportement menaçant précoce de la Russie, s'est montré encore plus déterminé à résister que les Tchèques en 1938. L'un des aspects les plus affligeants de certains arguments des partisans de l'apaisement est qu'ils discutent de l'Ukraine comme s'il s'agissait d'une société profondément divisée ou d'un pays qui peut être facilement écarté. Il y a plus de dix ans, un pourcentage très important de la population ukrainienne était favorable à des relations étroites avec la Russie. Toutefois, l'agression russe et la nature oppressive du régime russe ont contribué à créer une identité ukrainienne croissante, démocratique et pro-européenne. 

[...]


Un peu plus tard, le 8 mars exactement, Phillips O'Brien publia un article sur la logistique russe ; comme il est payant (voir All those big Russian weapons will go nowhere without fuel) il en propose des extraits dans Looking back on the war through some writings ; à mon tour d'en tirer quelques parties intéressantes :

L'hypothèse selon laquelle l'armement russe est si puissant et l'armée russe si nombreuse que ce n'est qu'une question de temps avant qu'elle ne submerge l'Ukraine semble être largement répandue.

Cependant, d'un point de vue logistique, la machine de guerre russe semblait tout sauf écrasante. Pour des raisons de doctrine, d'équipement et d'expérience, la Russie était loin d'être une superpuissance logistique. Si l'on remonte à l'époque de l'Union soviétique en Afghanistan, la Russie a développé un système logistique descendant, inflexible et peu capable d'innover.

[...] 

Tout cela signifiait que la Russie devait mener une guerre rapide, sinon son système logistique serait mis à rude épreuve. Dès le début, les Russes ont agi comme s'ils pouvaient s'emparer de Kiev et d'autres grandes villes en quelques jours. Ils semblaient s'attendre à ce que la résistance soit relativement facilement balayée alors que tout leur nouvel équipement prestigieux se mettait en marche le 24 février.

[...] 

Le signe le plus marquant de l'échec de la stratégie (et de la doctrine logistique) russe initiale et du succès de la stratégie ukrainienne d'attaque de la logistique pourrait être la fameuse colonne de 40 miles de véhicules, dont de nombreux camions logistiques remplis de munitions, qui s'est étirée du Belarus vers Kiev.


Je vous laisse lire la totalité de l'article (il est en libre lecture) de Phillips O'Brien qui, il faut bien l'avouer, avait prédit parfaitement les déboires de l'armée russe.


vendredi 30 décembre 2022

Climactualités - décembre 2022

 

Concentration de l'atmosphère en CO₂

Global Monitoring Laboratory - Carbon Cycle Greenhouse Gases (noaa.gov)

Moyenne mensuelle récente du CO₂ à l'observatoire de Mauna Loa.

Variation de la concentration en CO₂ depuis 1960.

Les lignes et symboles rouges représentent les valeurs moyennes mensuelles, centrées sur le milieu de chaque mois. Les lignes et symboles noirs représentent les mêmes valeurs, après correction pour le cycle saisonnier moyen.

Taux de croissance annuel moyen du CO₂ au Mauna Loa.

Le tableau et le graphique montrent les taux de croissance annuels moyens du dioxyde de carbone pour Mauna Loa. Dans le graphique, les moyennes décennales du taux de croissance sont également représentées sous forme de lignes horizontales pour les années 1960 à 1969, 1970 à 1979, et ainsi de suite.

Voir aussi : Mauna Loa carbon dioxide forecast for 2022 - Met Office


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Divers graphiques montrant l'évolution du CO2 (et de la température) au cours des âges.


Changement en parties par million par 1000 ans (Source Climate Central)


Source Graphic: The relentless rise of carbon dioxide – Climate Change: Vital Signs of the Planet (nasa.gov)


Concentrations de l'atmosphère en CO2 depuis 500 millions d'années (source Earth.Org)


Evolution (estimation) de la température durant les 500 millions d'années passées (source Earth.Org)


Attention ! L'échelle des abscisses des deux derniers graphiques n'est pas la même !


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ENSO


CURRENT STATUS:

LA NIÑA ADVISORY

Forecasts indicate a 75 percent chance that La Niña—the cool phase of the ENSO climate pattern—will persist across the tropical Pacific for the third winter in a row.

Selon les prévisions, il y a 75 % de chances que La Niña - la phase froide du cycle climatique ENSO - persiste dans le Pacifique tropical pour le troisième hiver consécutif.
Index ENSO de 2013 à 2022 (source weather.plus)

Index ENSO de 1950 à 2022 (source weather.plus)

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Données de températures de la NOAA

Climate Change: Global Temperature | NOAA Climate.gov.

Température annuelle de surface comparée à la moyenne de 1880 à 2021.


FAITS MARQUANTS

  • La température de la Terre a augmenté de 0,14° Fahrenheit (0,08° Celsius) par décennie depuis 1880, mais le taux de réchauffement depuis 1981 est plus de deux fois supérieur : 0,32° F (0,18° C) par décennie.
  • L'année 2021 a été la sixième année la plus chaude jamais enregistrée sur la base des données de température de la NOAA.
  • Moyennée sur les terres et les océans, la température de surface de 2021 était de 1,51 °F (0,84 °Celsius) plus élevée que la moyenne du vingtième siècle de 57,0 °F (13,9 °C) et de 1,87 ˚F (1,04 ˚C) plus élevée que la période préindustrielle (1880-1900). 
  • Les neuf années de 2013 à 2021 se classent parmi les 10 années les plus chaudes jamais enregistrées.

Voir aussi l'évaluation du climat mondial en 2021 : Assessing the Global Climate in 2021 | News | National Centers for Environmental Information (NCEI) (noaa.gov)


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Elévation du niveau moyen des mers

Mean Sea Level: Aviso+ (altimetry.fr)

Niveau moyen global de référence (GMSL) basé sur les données des missions TopEx/Poseidon, Jason-1, Jason-2 et Jason-3 de janvier 1993 à aujourd'hui, après élimination des signaux annuels et semi-annuels et application d'un filtre de 6 mois. En appliquant la correction du rebond postglaciaire (-0,3 mm/an), l'élévation du niveau moyen des mers a ainsi été estimée à 3,5 mm/an avec une incertitude de 0,4 mm/an (mis à jour le 29/10/2022)


Sur les 10 dernières années :

Sur les 10 dernières années : 4,35 mm / an (source Aviso)

Sur les 5 dernières années :

Sur les 5 dernières années : 4,32 mm / an (source Aviso)



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GISS L-OTI anomalies de températures vs 1881-1910

data.giss.nasa.gov

Anomalies de températures pour le mois de novembre 2022 par rapport à la période de référence 1881-1910.


Rappel des années précédentes (à partir de 2016, année la plus chaude) avec leur classement :

  • année 2021 : 1.11 => 5
  • année 2020 : 1.24 => 2
  • année 2019 : 1.21 => 3
  • année 2018 : 1.08 => 6 
  • année 2017 : 1.17 => 4 
  • année 2016 : 1.26 => 1

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Polar Science Center

psc.apl.uw.edu

Evolution du volume de la banquise arctique de PIOMAS par rapport à la moyenne de la période 1979-2021.


Fig 11. Moyenne annuelle du volume de glace de mer de PIOMAS

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Polar Portal

Greenland: Polar Portal

  • Conditions de surface du Groenland :

Bilan de masse de surface du Groenland (journalier)

La carte illustre comment la surface de la calotte glaciaire du Groenland gagne et perd de la masse chaque jour. Cette différence entre les chutes de neige et le ruissellement est connue sous le nom de bilan massique de la surface. Elle est toujours positive au cours d'une année car toute la neige tombée ne s'écoule pas à nouveau de la calotte glaciaire.

Le bilan massique de surface n'est PAS identique au bilan massique TOTAL (c'est-à-dire le gain ou la perte globale de la calotte glaciaire), qui comprend également la masse perdue lorsque les glaciers vêlent des icebergs, la fonte des langues de glacier lorsqu'elles entrent en contact avec l'eau de mer chaude et les effets de friction et autres au fond de la calotte glaciaire.

Bilan de masse de surface du Groenland (cumul)


  • Changement de masse du Groenland :

Changement de masse et impact sur le niveau des mers.

La carte et le graphique montrent l'augmentation de la masse de glace lorsqu'il y a des précipitations, et la quantité de cette masse qui est perdue lorsque la neige et la glace fondent et lorsque des icebergs se détachent des principaux glaciers de sortie de la calotte glaciaire. La différence entre ces changements de masse au cours d'une année glaciologique (septembre-août) est appelée le bilan massique total de l'inlandsis groenlandais.

Tous les changements sont donnés par rapport à avril 2002.

Sur la base de ces données, on constate qu'au cours de la période 2003-2011, l'inlandsis groenlandais a perdu 234 km3 d'eau par an, ce qui correspond à une contribution annuelle à l'augmentation moyenne du niveau de la mer de 0,65 mm (Barletta et al. (2013).


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Arctic Data archive system (ADS)

ads.nipr.ac.jp/vishop/#/extent

Evolution de l'étendue de la banquise arctique.

Evolution de l'étendue de la banquise antarctique.

Evolution globale des deux banquises arctique et antarctique.

Historique des Climactualités (l'Arctique est mentionné en premier ; en bleu les valeurs minimalesen jaune les maximales ; la valeur entre parenthèses est la variation par rapport à l'année précédente)

Valeurs en millions de km².

Moyenne des années 1980 à la même date : 13,62 + 7,45 = 21,07 (+3,54)

Décembre 2022 : 12,13 + 5,41 = 17,53 (-1,29)
Novembre 2022 : 10,19 + 13,24 = 23,43 (-0,84)
Octobre 2022 : 8,10 + 16,69 = 24,79 (-0,15)
Septembre 2022 : 5,01 + 17,97 = 22,97 (-0,11)
Août 2022 : 5,06 + 17,51 = 22,57 (-1,05)
Juillet 2022 : 6,74 + 15,88 = 22,62 (-1,15)
Juin 2022 : 9,32 + 13,36 = 22,68 (-1,22)
Mai 2022 : 11,60 + 10,49 = 22,08 (-0,87)
Avril 2022 : 12,84 + 7,50 = 20,34 (-0,96)
Mars 2022 : 13,79 + 4,16 = 17,95 (-1,20)
Février 2022 : 14,14 + 2,17 = 16,31 (-0,44)
Janvier 2022 : 13,70 + 3,00 = 16,69 (-0,23)
Décembre 2021 : 12,50 + 6,32 = 18,82 (-0,32)
Novembre 2021 : 10,79 + 13,48 = 24,27 (+0,37)
Octobre 2021 : 7,97 + 16,98 = 24,94 (+0,99)
Septembre 2021 : 5,04 + 18,04 = 23,08 (+0,20)
Août 2021 : 5,05 + 18,57 = 23,62 (+1,14)
Juillet 2021 : 6,38 + 17,39 = 23,77 (+1,48)
Juin 2021 : 9,09 + 14,81 = 23,90 (+0,33) 
Mai 2021 : 11,29 + 11,66 = 22,95 (+0,54)
Avril 2021 : 12,82 + 8,48 = 21,3 (+0,78)
Mars 2021 : 13,62 + 5,53 = 19,15 (+0,65)
Février 2021 : 13,73 + 3,02 = 16,75 (-0,35)
Janvier 2021 : 13,43 + 3,50 = 16,92 (-0,13)
Décembre 2020 : 12,07 + 7,07 = 19,14 (+0,23)
Novembre 2020 : 9,71 + 14,19 = 23,90 (+0,77)
Octobre 2020 : 6,02 + 17,94 = 23,95 (-0,33)
Septembre 2020 : 4,08 + 18,81 = 22,88 (+0,22)
Août 2020 : 4,06 + 18,43 = 22,48 (+0,26)
Juillet 2020 : 5,78 + 16,51 = 22,29 (-0,17)
Juin 2020 : 9,18 + 14,39 = 23,57 (+0,80)
Mai 2020 : 10,83 + 11,58 = 22,41 (+1,35)
Avril 2020 : 12,60 + 7,92 = 20,52 (+1,30)
Mars 2020 : 13,56 + 4,94 = 18,50 (+0,94)
Février 2020 : 14,30 + 2,81 = 17,10 (+0,64)
Janvier 2020 : 13,63 + 3,42 = 17,05 (+0,56)
Décembre 2019 : 12,26 + 6,65 = 18,91 (+0,99)
Novembre 2019 : 9,85 + 13,27 = 23,13 (-0,67)
Octobre 2019 : 7,06 + 17,21 = 24,28 (+0,01)
Septembre 2019 : 4,31 + 18,35 = 22,66 (-0,03)
Août 2019 : 4,34 + 17,89 = 22,23 (-0,27)
Juillet 2019 : 6,08 + 16,39 = 22,46 (-0,65)
Juin 2019 : 9,09 + 13,68 = 22,77 (-1,01)
Mai 2019 : 10,88 + 10,18 = 21,06 (-0,61)
Avril 2019 : 12,56 + 6,66 = 19,22 (+1,07)
Mars 2019 : 13,73 + 3,83 = 17,56 (+0,19)
Février 2019 : 14,02 + 2,44 = 16,46 (+0,47)
Janvier 2019 : 13,48 + 3,01 = 16,49 (+0,35)
Décembre 2018 : 11,85 + 6,07 = 17,92 (-0,97)
Novembre 2018 : 10,54 + 13,26 = 23,8 (+0,48)
Octobre 2018 : 7,18 + 17,09 = 24,27 (-0,82)
Septembre 2018 : 4,68 + 18,01 = 22,69
Août 2018 : 4,8 + 17,7 = 22,5
Juillet 2018 : 6.67 + 16.44 = 23.11
Juin 2018 : 9.19 + 14.59 = 23.78
Mai 2018 : 11.02 + 10.65 = 21.67
Avril 2018 : 12.82 + 6.33 = 18.15
Mars 2018 : 13.87 + 3.50 = 17.37
Février 2018 : 13.68 + 2.31 = 15.99
Janvier 2018 : 12.68 + 3.46 = 16.14
Décembre 2017 : 11.76 + 7.13 = 18.89
Novembre 2017 : 10.07 + 13.25 = 23.32
Octobre 2017 : 7.82 + 17.27 = 25.09
Septembre 2017 : pas de stats

samedi 24 décembre 2022

Pourquoi la Russie va perdre sa guerre ? A cause de Poutine !

 

Tout le monde sait aujourd'hui que l'invasion de l'Ukraine par la Russie, qui date en fait de 2014 avec une brutale intensification à partie du 24 février 2022, a été décidée à l'initiative d'un seul homme, Vladimir Poutine.

Vladimir Poutine qui, en despote autoritaire qu'il est, décide de tout et n'admet pas la contestation. Ou si peu qu'on n'arrive pas à voir d'où elle pourrait bien venir.

Je vous fais cadeau en ce jour de Noël d'un article du Wall Street Journal (Putin, Isolated and Distrustful, Leans on Handful of Hard-Line Advisers) dont je vous livre la traduction des premiers paragraphes.


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Poutine, isolé et méfiant, s'appuie sur une poignée de conseillers à la ligne dure

Le président russe a mis en place une structure de pouvoir conçue pour lui fournir les informations qu'il souhaite entendre, ce qui a contribué à ses erreurs de calcul dans la guerre en Ukraine.

Par Evan Gershkovich , Thomas Grove , Drew Hinshaw et Joe Parkinson

23 déc. 2022 12:18 pm ET

MOSCOU - Les troupes russes étaient en train de perdre la bataille pour Lyman, une petite ville de l'est de l'Ukraine, à la fin du mois de septembre, lorsqu'un appel est arrivé pour le commandant sur la ligne de front, par une ligne cryptée depuis Moscou.

C'était Vladimir Poutine, leur ordonnant de ne pas battre en retraite.

Le président semblait n'avoir qu'une compréhension limitée de la réalité de la situation, selon des responsables américains et européens, anciens et actuels, ainsi qu'un ancien officier supérieur des services de renseignement russes informé de l'échange. Ses troupes de première ligne, mal équipées, étaient encerclées par une avancée ukrainienne soutenue par l'artillerie fournie par l'Occident. M. Poutine a ignoré les ordres de ses propres généraux et a dit aux troupes de tenir bon, ont-ils dit.

Les embuscades ukrainiennes se sont poursuivies et, le 1er octobre, les soldats russes se sont retirés à la hâte, laissant derrière eux des dizaines de cadavres et des stocks d'artillerie pour réapprovisionner les caches d'armes de l'Ukraine.

M. Poutine s'attendait à ce que la guerre en Ukraine soit rapide, populaire et triomphante. Pendant des mois, il s'est efforcé de venir à bout de ce qui est devenu un coûteux bourbier, et s'est retrouvé isolé et méfiant au sommet d'une structure de pouvoir conçue pour renforcer sa vision belliqueuse du monde et le protéger des nouvelles décourageantes.

Tout au long de l'été, des délégations d'experts militaires et de fabricants d'armes sont sorties des réunions présidentielles en se demandant si M. Poutine comprenait la réalité du champ de bataille, selon des personnes connaissant bien la situation. Et si, depuis, M. Poutine a fait des efforts pour se faire une idée plus claire de la guerre, le président reste entouré d'une administration qui se plie à sa conviction que la Russie va réussir, malgré les sacrifices humains et économiques croissants.

"Les personnes qui entourent Poutine se protègent elles-mêmes", a déclaré Ekaterina Vinokurova, membre de son conseil des droits de l'homme trié sur le volet jusqu'à ce que M. Poutine la destitue en novembre. "Ils ont cette conviction profonde qu'ils ne peuvent pas contrarier le président."

Les erreurs qui en ont résulté ont façonné l'invasion désastreuse de l'Ukraine par la Russie - depuis les premiers jours, lorsque M. Poutine pensait que ses soldats seraient accueillis par des fleurs, jusqu'aux récents retraits humiliants dans le nord-est et le sud. Au fil du temps, M. Poutine, qui n'a jamais servi dans l'armée, s'est tellement méfié de sa propre structure de commandement qu'il a donné des ordres directement à la ligne de front.

Cet article se fonde sur des mois d'entretiens avec des responsables russes, anciens et actuels, ainsi qu'avec des personnes proches du Kremlin, qui ont largement décrit un dirigeant isolé qui ne pouvait pas, ou ne voulait pas, croire que l'Ukraine résisterait avec succès. Selon ces personnes, le président a passé 22 ans à construire un système destiné à le flatter en dissimulant ou en édulcorant des données décourageantes.

[le reste disponible sur l'archive du site)

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On remarquera aisément que Poutine rime avec Staline et que la comparaison ne s'arrête pas là. Les deux ont fait en sorte d'éliminer tous les opposants qui pouvaient leur faire de l'ombre afin de ne garder que de serviles serviteurs n'osant en aucun cas contredire leur « bienfaiteur ».

Poutine jusqu'à présent est responsable de beaucoup moins de morts que son prédécesseur, mais cela pourrait changer, Staline n'ayant pas possédé l'arme nucléaire...Cela-dit il est peu probable que Poutine aille jusqu'à se suicider en appuyant sur le gros bouton, comme un autre de ses prédécesseurs, avec qui on l'associe de plus en plus au point de le surnommer Putler (ou Puthler) sur les réseaux sociaux, aurait pu le faire s'il en avait eu les moyens, préférant se tirer une balle dans la tête à défaut d'ogive nucléaire à portée de main. S'il voit que les choses tournent vraiment mal en 2023 il lui reste le choix de ne pas se représenter en 2024 et de couler des jours heureux caché quelque part en laissant la responsabilité de la gestion du chaos qu'il aura créé à la marionnette qu'il aura choisie avant de partir. Et si la Russie devient une terre vraiment inhospitalière pour lui il aura toujours la possibilité de s'exiler sous des cieux plus cléments, en Corée du Nord, en Chine ou au Venezuela. 

Avec Kim j'ai un alter ego, mais la Corée du Nord c'est pas le pied pour passer sa retraite.


Xi, un ami qui ne me veut peut-être pas autant de bien que vous le pensez.

C'est beau le Venezuela, mais Maduro est vraiment trop grand pour moi.


vendredi 23 décembre 2022

Les principaux griefs contre Donald Trump


 Le rapport final de la Commission d'enquête sur les événements du 6 janvier 2021 est maintenant disponible : Report_FinalReport_Jan6SelectCommittee.pdf (house.gov)

Voici 17 points qui résument ce qui est reproché à l'ancien président (traduction par mes soins avec l'aide de DeepL)


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A partir de la page 4 de l'Executive summary.

  1. À partir de la nuit de l'élection et jusqu'au 6 janvier et par la suite, Donald Trump a délibérément diffusé de fausses allégations de fraudes liées à l'élection présidentielle de 2020 afin de contribuer à son effort pour renverser l'élection et dans le but de solliciter des contributions. Ces fausses allégations ont poussé ses partisans à la violence le 6 janvier.
  2. Sachant que lui et ses partisans avaient perdu des dizaines de procès électoraux, et malgré le fait que ses propres conseillers principaux réfutaient ses allégations de fraude électorale et l'exhortaient à reconnaître sa défaite, Donald Trump a refusé d'accepter le résultat légal de l'élection de 2020. Au lieu de respecter son obligation constitutionnelle de "veiller à ce que les lois soient fidèlement exécutées", le président Trump a plutôt comploté pour renverser le résultat de l'élection.
  3. Bien que sachant qu'une telle action serait illégale, et qu'aucun État n'avait ou n'allait soumettre une liste électorale modifiée, Donald Trump a fait pression sur le Vice-président Mike Pence pour qu'il refuse de compter les votes électoraux pendant la session conjointe du Congrès le 6 janvier.
  4. Donald Trump a cherché à corrompre le ministère de la Justice des États-Unis en essayant d'enrôler des fonctionnaires du département pour faire des déclarations délibérément fausses et ainsi aider son action pour annuler l'élection présidentielle. Après que cet effort ait échoué, Donald Trump a offert le poste de procureur général par intérim à Jeff Clark, sachant que ce dernier avait l'intention de diffuser de fausses informations visant à renverser l'élection.
  5. Sans aucune base probante et contrairement aux lois de l'État et fédérales, Donald Trump a illégalement fait pression sur les fonctionnaires de l'État et les législateurs pour changer les résultats de l'élection dans leurs États.
  6. Donald Trump a supervisé un effort pour obtenir et transmettre de faux certificats électoraux au Congrès et aux Archives nationales.
  7. Donald Trump a fait pression sur des membres du Congrès pour qu'ils s'opposent aux listes électorales valides de plusieurs États.
  8. Donald Trump a délibérément confirmé de fausses informations déposées dans une cour fédérale.
  9. Sur la base de fausses allégations selon lesquelles l'élection a été volée, Donald Trump a convoqué des dizaines de milliers de partisans à Washington pour le 6 janvier. Bien que ces partisans aient été en colère et que certains aient été armés, Donald Trump leur a demandé de marcher vers le Capitole le 6 janvier pour "reprendre" [take back] leur pays.
  10. Sachant qu'une attaque violente sur le Capitole était en cours et sachant que ses paroles inciteraient à plus de violence, Donald Trump a délibérément envoyé un message sur les médias sociaux condamnant publiquement le vice président Pence à 14 h 24 le 6 janvier.
  11. Sachant que des violences étaient en cours au Capitole, et malgré son devoir de s'assurer que les lois sont fidèlement exécutées, Donald Trump a rejeté les demandes répétées pendant plusieurs heures lui demandant d'ordonner à ses partisans violents de se disperser et de quitter le Capitole, et a préféré regarder l'attaque violente se dérouler à la télévision. Cette inaction a perpétué la violence au Capitole et a empêché le Congrès de procéder au décompte des votes électoraux.
  12. Chacune des actions de Donald Trump a été prise en soutien d'une conspiration à plusieurs volets visant à renverser les résultats légaux de l'élection présidentielle de 2020.
  13. La communauté du renseignement et les forces de l'ordre ont réussi à détecter la planification d'une violence potentielle le 6 janvier, y compris la planification spécifique des groupes de miliciens Proud Boys et Oath Keeper qui ont finalement mené l'attaque contre le Capitole. À l'approche du 6 janvier, les services de renseignement ont spécifiquement identifié le potentiel de violence au Capitole des États-Unis. Ces renseignements ont été partagés au sein de l'exécutif, notamment avec les services secrets et le Conseil national de sécurité du président.
  14. Les renseignements recueillis avant le 6 janvier ne permettaient pas de conclure que des Antifa ou d'autres groupes de gauche s'engageraient probablement dans une contre-manifestation violente, ou attaqueraient des partisans de Trump le 6 janvier. En effet, les renseignements recueillis le 5 janvier indiquaient que certains groupes de gauche demandaient à leurs membres de "rester chez eux" et de ne pas participer à la manifestation du 6 janvier. En fin de compte, aucun de ces groupes n'a été impliqué de manière significative dans l'attaque du Capitole le 6 janvier.
  15. Ni la communauté du renseignement ni les forces de l'ordre n'ont obtenu de renseignements avant le 6 janvier sur l'étendue complète de la planification en cours par le président Trump, John Eastman, Rudolph Giuliani et leurs associés pour renverser les résultats certifiés de l'élection. Ces agences n'ont apparemment pas (et ne pouvaient potentiellement pas) anticiper la provocation que le président Trump offrirait à la foule dans son discours de l'Ellipse, que le président Trump demanderait "spontanément" à la foule de marcher vers le Capitole, que le Président Trump exacerberait l'émeute violente en envoyant son tweet de 14 h 24 condamnant le vice président Pence, ou l'échelle complète de la violence et de l'anarchie qui s'ensuivraient. Les forces de l'ordre n'avaient pas non plus prévu que le président Trump refuserait d'ordonner à ses supporters de quitter le Capitole une fois que les violences avaient commencé. Aucune analyse préalable de la communauté du renseignement n'a prédit exactement comment le président Trump se comporterait ; aucune analyse de ce genre n'a identifié l'ampleur et la portée de la menace qui pesait sur le Capitole le 6 janvier. 
  16. Des centaines d'agents de la police du Capitole et de l'agglomération de Washington ont accompli leur mission avec bravoure le 6 janvier, et l'Amérique leur doit une immense gratitude pour leur courage dans la défense du Congrès et de notre Constitution. Sans leur bravoure, le 6 janvier aurait pu être bien pire. Bien que certains membres de la direction de la police du Capitole aient considéré que leur approche du 6 janvier était "tout le monde sur le pont", la direction de la police du Capitole ne pouvait pas disposer de suffisamment de moyens pour faire face à la foule violente et anarchique. La direction de la police du Capitole n'a pas anticipé l'ampleur de la violence qui s'ensuivrait après que le président Trump a demandé à des dizaines de milliers de ses partisans dans la foule de l'Ellipse de marcher vers le Capitole, puis a tweeté à 14 h 24. Bien que le chef Steven Sund ait évoqué l'idée d'un soutien de la Garde nationale, le conseil de la police du Capitole n'a pas demandé l'aide de la Garde avant le 6 janvier. La police métropolitaine a adopté une approche encore plus proactive le 6 janvier et a déployé environ 800 agents, notamment pour répondre aux appels d'urgence au Capitole. Les émeutiers ont tout de même réussi à briser leur ligne à certains endroits, lorsque la foule a déferlé immédiatement après le tweet de 14 h 24 de Donald Trump. Le ministère de la Justice a préparé un groupe d'agents fédéraux à Quantico et dans le district de Columbia, anticipant que le 6 janvier pourrait devenir violent, puis a déployé ces agents lorsqu'il est devenu évident que la police du Capitole était débordée. Des agents du Département de la Sécurité Intérieure ont également été déployés pour aider.
  17. Le président Trump avait l'autorité et la responsabilité de diriger le déploiement de la Garde nationale dans le district de Columbia, mais il n'a jamais donné l'ordre de déployer la Garde nationale le 6 janvier ou tout autre jour. Il n'a pas non plus donné l'ordre à un organisme fédéral chargé de l'application de la loi d'apporter son aide. Le pouvoir de déployer la Garde nationale ayant été délégué au ministère de la Défense, le secrétaire à la Défense pouvait, et a finalement, déployé la Garde. Bien que les preuves identifient un malentendu probable entre les membres de la direction civile du ministère de la Défense ayant un impact sur le calendrier de déploiement, la commission n'a trouvé aucune preuve que le ministère de la Défense ait intentionnellement retardé le déploiement de la Garde nationale. La commission spéciale reconnaît que certains membres du ministère étaient sincèrement préoccupés, en conseillant la prudence, par le fait que le président Trump pourrait donner un ordre illégal d'utiliser l'armée pour soutenir ses efforts pour renverser l'élection.


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Finalement on se rend compte que presque tous ces points étaient connus quasiment dès le début, certains dès le jour même, à l'heure près, comme par exemple le discours de Donald Trump à l'Ellipse qui fut retransmis en direct et ne peut donc souffrir aucune contestation possible.

Maintenant il reste peut-être le plus dur à faire : mettre Donald Trump sous les verrous. Une bagatelle.

Il a poussé au coup d'État et devrait être derrière les barreaux.


lundi 19 décembre 2022

Que va faire Poutine maintenant ?

 

Bonne question que se pose Sergey Radchenko dans The Spectator.

Voici ma traduction de son article daté du 18 décembre (aidé en cela par DeepL Traduction avec quelques menues modifications de ma part)


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Que va faire Poutine maintenant ?


Si vous étiez Poutine, que feriez-vous ? Pour prédire les actions futures de votre adversaire, vous devez vous mettre à sa place. Alors que la mésaventure de la Russie en Ukraine approche de son triste anniversaire, nous devrions nous demander comment Poutine voit le monde, voire comment nous verrions le monde et quelle politique nous mènerions si nous étions confrontés à une série d'options désagréables.

Première option. Il pourrait déclarer la guerre perdue et se retirer. Si j'étais Poutine, je ne choisirais pas cette option. Pourquoi ? Il y a un grand danger à admettre la défaite. La Russie a été construite sur le mythe de l'infaillibilité. Tant que l'espoir de la victoire est vivant, le peuple suivra le Tsar. Mais à peine aura-t-il reculé qu'il se détournera de lui, car le Kremlin n'est pas un endroit pour les perdants.

Si j'étais Poutine, je me dirais que je suis toujours populaire. Ils pensaient me renverser - ils ne connaissent pas notre peuple. Les Russes ont plus peur de l'incertitude que de la tyrannie. Ils embrasseraient volontiers la terreur si seulement je le voulais. Vous pensez que Navalny est mal en point ? Je l'ai gardé en vie, je dirais, juste parce que je peux. Il est autorisé à partager les histoires de sa misère avec le monde entier : c'est ainsi que je montre mon pouvoir.

Non, ils ne se déverseront pas dans les rues pour réclamer ma tête, pas à moins que je montre une faiblesse. C'est pourquoi je ne peux pas reculer. C'est pourquoi j'ai annexé Kherson et Zaporizhzhia - pour leur montrer que je suis à fond dedans.

Je ne peux pas accepter la défaite car l'influence de la Russie dans son étranger proche s'effondrerait. Mes soi-disant alliés en Asie centrale et dans le Caucase (qui se sont révélés si peu fiables - je leur ferai payer leur déloyauté) attendent avec impatience la disparition de la Russie. Je ne peux pas leur donner cette satisfaction. En revanche, je dois leur montrer que le coût de la résistance est élevé, afin qu'ils apprennent à me respecter.

Deuxième option. Obtenir un statu quo. Nous nous sommes retirés à Kherson. C'était la bonne décision. Nous pouvons maintenant consolider nos positions et nous retrancher, rendant plus difficile pour les Ukrainiens de tenter ce qu'ils ont réussi à faire à l'extérieur de Kharkiv. Je pourrais alors proclamer que nous avons réalisé des gains stratégiques : sécurisé un pont terrestre et établi un contrôle total sur la mer d'Azov. Je peux vendre cela comme une victoire à l'opinion publique. Je sais qu'ils veulent un retour à la normalité. Mais il y a un hic.

Je doute que je puisse amener Zelensky à accepter le statu quo. Que peut-il y gagner ? Il a de nouvelles armes. Il a la confiance, née de victoires inattendues à l'automne. Il va persévérer. Les Ukrainiens ont senti le goût de mon sang, et ils sont prêts à tuer. Ils ne s'arrêteront pas tant qu'ils ne m'auront pas poussé hors d'Ukraine. Ils attendent l'opportunité de le faire au printemps. Et ils vont essayer, sans aucun doute. Ils comprennent qu'ils sont désavantagés sur le long terme. Ils dépendent des largesses américaines. Ils dépendent de l'Occident qui ne doit pas être distrait et préoccupé par d'autres problèmes. Ils ont besoin que l'Occident les maintienne à flot - économiquement et militairement. L'Occident continuera-t-il à le faire ? Peut-être. Mais je sens une certaine lassitude.

Donc, un cessez-le-feu, s'il survient, sera court et sans danger. A peine aurons-nous repris des forces que nous frapperons à nouveau. Parce que si nous ne le faisons pas, ils le feront.

Troisième option. Se battre jusqu'à ce que nous ayons une partition de facto de l'Ukraine. Le temps nous dira jusqu'où ira la ligne vers l'ouest. Au minimum, nous devons reconquérir les territoires que j'ai déjà annexés. Je pourrai alors dire que j'ai atteint mes objectifs et proclamer la victoire. Ai-je une raison de ne pas le faire ? L'Occident assouplira-t-il ses sanctions si je modère mes objectifs en Ukraine ? Ils ne le feront pas. Ils ne comprennent que la force, et seule ma victoire décisive sur le champ de bataille les impressionnera. En attendant, ils vont railler et encourager les Ukrainiens. Et je ferais exactement la même chose si j'étais à leur place.

La guerre n'est certainement pas perdue - je me disais - pas encore. Certes, nous n'avons pas fait aussi bien que nous l'espérions, mais nous n'avons pas non plus épuisé notre potentiel. La population est docile. Ma mobilisation partielle a bouché les trous de notre défense sans que l'opinion publique s'en émeuve. Je pourrais facilement mobiliser dix fois plus. Mais je n'ai rien pour les équiper. En temps voulu, je le ferai. Oui, nous manquons de munitions, mais nous pouvons en accumuler au fil du temps, tout en nous approvisionnant auprès de l'Iran et de la Corée du Nord.

Ils ont essayé de nous paralyser avec des sanctions, mais ils n'ont pas réussi. La situation n'est pas brillante, je le sais, mais j'ai une excellente équipe économique. Les chiffres montrent seulement un léger déclin cette année et une stabilisation économique dans un an. Contrairement à l'Ukraine qui a été dévastée.

La Russie est une puissance nucléaire, et je ne peux donc pas perdre. Hitler aurait-il utilisé tous les moyens à sa disposition s'il avait pu éviter la défaite de l'Allemagne ? Oui, il l'aurait fait. C'est aussi ma philosophie. Je vais aller de l'avant, jusqu'à ce que je ne puisse plus rien faire. Avec l'aide de Dieu, je gagnerai, mais si ce n'est pas le cas, je ne répugne pas à mourir dans la gloire. Nous devons tous mourir un jour. Pourquoi pas aujourd'hui ? Pourquoi pas au service de la Grande Idée russe ? C'est ce qu'ils ne comprennent pas. Ils pensent que je vais flancher devant le choix : la défaite (et mon humiliation, voire mon éviction) ou la fin de la civilisation. La fin de la civilisation n'a-t-elle jamais semblé plus attrayante ?

Mais la civilisation ne peut pas aller à sa fin - pas du tout. Il y a un long chemin à parcourir entre une Ukraine irradiée et un cataclysme nucléaire mondial. Ils - les Américains - vont devoir faire le choix de l'escalade. Le feront-ils ? J'en doute. Ils savent que je sais que dans le grand schéma des choses, l'Ukraine est un spectacle secondaire. Pour eux, bien sûr. Pas pour moi. Pour moi, c'est une question de vie ou de mort. Pour l'instant, je garde la carte nucléaire en réserve. Certains disent que c'est juste une menace en l'air. Peut-être que oui, peut-être que non. Nous verrons bien quand nous en serons là.

Voilà mes options, me disais-je en m'accrochant aux bras de mon fauteuil comme s'il s'agissait de mon seul ami, et c'est pourquoi la guerre se poursuivra jusqu'au bout. Il se peut que l'Ukraine devienne un terrain vague entre-temps - et alors ? Il pourrait y avoir plus de souffrance et plus de morts - ai-je l'air de m'en soucier ? Les vainqueurs ne sont jamais jugés. Je le sais aussi bien qu'ils le savent à La Haye. Et à la fin, il y aura peut-être une guerre nucléaire. Si elle a lieu, ce sera la volonté de Dieu.

Est-ce ainsi que Poutine voit le monde ? Est-ce ce qu'il pense ? Nous ne pouvons pas le savoir. Nous sommes dotés d'une raison qui nous permet de faire des choix, et pourtant, si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que nous faisons souvent de mauvais choix, puis d'autres mauvais choix pour sauver une situation que nous avons aggravée en faisant de mauvais choix au départ. Poutine s'est fourvoyé dans une guerre en Ukraine. Il doit maintenant redoubler d'efforts pour gagner.

Il sait - et nous savons - que la guerre ne s'est pas bien passée pour lui, du moins jusqu'à présent. Mais elle n'a pas non plus été désastreuse - pas encore. La Russie tient bon. Elle s'adapte à sa nouvelle réalité, celle d'un conflit perpétuel avec l'Occident. Les élites ont accepté leur sort et se sont ralliées au tsar.

Poutine parie sur son succès dans une longue guerre. Il sait que sa victoire est loin d'être certaine. Mais il estime qu'il a de bonnes chances de tenir bon et d'obtenir, par une brutalité méthodique et de la persévérance, ce qu'il n'a pas pu obtenir dans une démonstration de témérité il y a un an.

Si c'est ce qu'il pense - et c'est probablement le cas - nous devons nous aussi nous préparer à une lutte douloureuse qui pourrait durer des années avant d'être résolue d'une manière ou d'une autre. Lorsque Poutine voit le monde à travers nos yeux, voit-il une conviction inébranlable et une volonté d'aller jusqu'au bout ? Il ne le voit probablement pas. Cela aussi contribue à sa confiance.

Un an après, il y a de la lumière au bout du tunnel. C'est Poutine qui brûle sa rampe de lancement alors qu'il se prépare à une longue, longue guerre.


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Le risque c'est de croire que Poutine raisonne comme nous. En tout cas ce qui est certain c'est que s'il voit que nous ne sommes pas prêts, nous l'« Occident », à défendre l'Ukraine jusqu'au bout, alors il n'y a aucune « raison » pour qu'il baisse les bras.