Un de mes fidèles lecteurs (je dois en avoir deux ou trois) me demande gentiment mon aide concernant le sujet du réchauffement climatique
moi je sais pas quoi répondre à ce genre de choses (!)
| Ce genre de choses... |
La pièce jointe est sommaire mais contient suffisamment d'informations pour me permettre de répondre.
L'énergumène qui "embête" mon ami lecteur entame donc son message ainsi :
Apport des nuages quasi identique au CO2, donnée supprimée par le GIEC. Donc l'institut spatial Danois (sic), aussi, tous des cons ?
Suit un extrait d'un papier dont le lien est fourni à la fin : Marsh2000(Climate).pdf
En faisant une recherche sur le mot "reconstruction" je trouve rapidement l'extrait en question (c'est la 5ème occurence) :
Using the reconstruction of low cloud cover in figure 11 and the ERBE estimates for cloud radiative forcing (Table I) one can infer a ~1.4Wm⁻² warming attributed to low cloud cover changes over the past century (1901-1995). This is potentially important when considering that over the same period the estimated heating from increased CO₂ emissions is ~1.5Wm⁻² and changes in solar irradiance received at Earth are 0.4 Wm⁻² (Lockwood and Stamper, 1999).
Traduction :
En utilisant la reconstruction de la couverture nuageuse basse de la figure 11 et les estimations ERBE pour le forçage radiatif des nuages (tableau I), on peut déduire un réchauffement d'environ 1,4 Wm-² attribué aux changements de la couverture nuageuse basse au cours du siècle dernier (1901-1995). Ceci est potentiellement important si l'on considère qu'au cours de la même période, le réchauffement estimé dû à l'augmentation des émissions de CO₂ est d'environ 1,5 Wm-² et que les changements de l'irradiance solaire reçue par la Terre sont de 0,4 Wm-² (Lockwood et Stamper, 1999).
Comme on le voit l'étude "Marsh2000" existe bel et bien et l'extrait montré dans la pièce jointe est fidèle (aux bizarreries du copier-coller près que je me suis permis de corriger...) à ce que l'on peut y lire, sauf que...
Sauf que Nigel Marsh, dans cette étude, est accompagné par nul (sic) autre que ...Henrik Svensmark !
Svensmark, on connait bien ici, il s'agit d'un physicien danois (avec un d minuscule puisqu'il s'agit d'un adjectif) dont le dada, je dirai même le mantra est que le soleil serait le principal responsable du réchauffement climatique actuel et non le CO₂.
Google Scholar le crédite généreusement de 772 résultats sur le climat, quand un Michael Mann plafonne à un petit 262000, tout comme James Hansen... Même Jean Jouzel parvient au score de 4230, ce qui montre que tous ces gens ne jouent pas dans la même division, Svensmark évoluant en départemental quand les autres sont en international.
Svensmark a d'ailleurs l'honneur d'avoir sa fiche chez Desmogblog, pour ceux qui désireraient en savoir un peu plus sur le personnage. Pour résumer, une vidéo de 2018 peut faire l'affaire dans laquelle on l'entend dire
We expect that solar activity should cool the Earth, and it could actually be why the temperatures are not increasing. I mean, they haven’t been increasing for the past twenty years.
Nous nous attendons à ce que l'activité solaire refroidisse la Terre, et c'est peut-être la raison pour laquelle les températures n'augmentent pas. Je veux dire qu'elles n'ont pas augmenté au cours des vingt dernières années.
Déclaration qui a posteriori semble plutôt...approximative pour rester poli.
| Evolution des températures mondiales depuis 1880 (source NOAA) |
J'ai mentionné où se situe l'année 2018 en suffisamment gros caractères afin que tout le monde puisse vérifier que comme le prédisait Svensmark nous nous dirigions tout droit vers un rafraichissement, voire pourquoi pas vers un nouvel âge glaciaire !
Et puis "au cours des vingt dernières années" cela remonte donc à l'année 1998 (année El Niño) dont on peut apercevoir le pic suivi d'un gros creux, lequel fut accompagné d'une montée inexorable jusqu'à nos jours !
Comme je le dis souvent pour juger du sérieux d'un individu le mieux est de se reporter à ce qu'il/elle a pu dire dans le passé et le/la confronter à la réalité qui a suivi. Pour Svensmark c'est éliminatoire.
Mais ce qui est intéressant dans l'étude citée c'est la référence à une autre étude parue en 1999, produite par deux chercheurs, Lockwood et Stamper, et intitulée A doubling of the Sun's coronal magnetic field during the past 100 years.
Cette étude est derrière un paywall et comme je n'ai pas envie de payer les 40 dollars demandés je me contente du résumé dans lequel on peut lire :
[...] Here we show that measurements of the near-Earth interplanetary magnetic field reveal that the total magnetic flux leaving the Sun has risen by a factor of 1.4 since 1964: surrogate measurements of the interplanetary magnetic field indicate that the increase since 1901 has been by a factor of 2.3. This increase may be related to chaotic changes in the dynamo that generates the solar magnetic field. We do not yet know quantitatively how such changes will influence the global environment.
[...] Nous montrons ici que les mesures du champ magnétique interplanétaire proche de la Terre révèlent que le flux magnétique total quittant le Soleil a augmenté d'un facteur 1,4 depuis 1964 : les mesures de substitution du champ magnétique interplanétaire indiquent que l'augmentation depuis 1901 a été d'un facteur 2,3. Cette augmentation pourrait être liée à des changements chaotiques dans la dynamo qui génère le champ magnétique solaire. Nous ne savons pas encore quantitativement comment ces changements influenceront l'environnement global.
On voit donc que les auteurs ne nient en aucune manière le rôle du CO₂ puisqu'ils n'en parlent pas !
Par ailleurs ils avouent qu'ils n'ont aucune idée de ce que ces données signifient en ce qui concerne le réchauffement climatique, mais 9 ans plus tard il se trouve que Mike Lockwood, cette fois associé à Claus Fröhlich, publie en 2008 un article intitulé Recent oppositely directed trends in solar climate forcings and the global mean surface air temperature. II. Different reconstructions of the total solar irradiance variation and dependence on response time scale. (Tendances récentes et opposées des forçages climatiques solaires et de la température moyenne de l'air à la surface du globe. II. Différentes reconstructions de la variation de l'irradiation solaire totale et dépendance de l'échelle de temps de réponse.)
Cette étude étant elle aussi derrière un paywall nous nous contenterons du résumé qui dit ceci :
[...] It was shown that all solar forcings of climate have declined since 1987.[...] The conclusions of our previous paper, that solar forcing has declined over the past 20 years while surface air temperatures have continued to rise, are shown to apply for the full range of potential time constants for the climate response to the variations in the solar forcings.
[Il a été démontré que tous les forçages solaires du climat ont diminué depuis 1987 [...] Les conclusions de notre précédent article, à savoir que le forçage solaire a diminué au cours des 20 dernières années alors que les températures de l'air en surface ont continué à augmenter, s'appliquent à toute la gamme des constantes de temps potentielles pour la réponse du climat aux variations des forçages solaires.
Comme il est coutume de dire en pareille occasion, je vous l'enveloppe ou c'est à consommer sur place ?
Pour compléter nous pouvons nous référer à ce qu'a déclaré Lockwood lui-même dans une interview :
In pre-industrial times [...] there was considerable evidence that the sun played a significant role in driving global climate, but [I] was concerned this genuine area of study had been done a "great disservice" by climate sceptics who were trying to confuse people about recent global warming.
À l'époque préindustrielle [...] il existait de nombreuses preuves que le soleil jouait un rôle important dans la régulation du climat mondial, mais [je] me suis inquiété de ce que ce domaine d'étude authentique ait été rendu « très mauvais » par les climato-sceptiques qui tentaient d'embrouiller les gens au sujet du réchauffement récent de la planète.
Ajoutant :
I know we're attacking a bit of a strawman here because there is no serious scientific debate about recent warming, but those who disagree are very vocal. We wrote this up specifically to show they are wrong, and wrong in a dangerous way.
Je sais que nous attaquons ici un homme de paille, car il n'y a pas de débat scientifique sérieux sur le réchauffement récent, mais ceux qui ne sont pas d'accord se font entendre. Nous avons rédigé ce document spécifiquement pour montrer qu'ils ont tort, et qu'ils ont tort d'une manière dangereuse.
Et les deux chercheurs de conclure :
Our results show that the observed rapid rise in global mean temperatures seen after 1985 cannot be ascribed to solar variability, whichever mechanism is invoked.
Nos résultats montrent que l'augmentation rapide des températures moyennes mondiales observée après 1985 ne peut être attribuée à la variabilité solaire, quel que soit le mécanisme invoqué.
Pour terminer ce billet déjà trop long (loi de Brandolini oblige) quoi de mieux que ce graphique qui dit tout :
| Evolution comparée de l'irradiance solaire et de la température globale (source NASA) |
En fait c'est depuis les années 1960s que le train "solariste" a commencé à dérailler.
RIP Henrik Svensmark et les autres (Vincent Courtillot notamment)
PS
Et les données de Svensmark n'ont pas été "supprimées par le GIEC", pour la bonne raison qu'elles n'ont jamais été reprises dans aucun de ses rapports. Et pour cause !
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