mercredi 4 décembre 2019

Encore une compagnie pétrolière qui a retourné sa veste

Heureusement que le site climatefiles existe pour nous dénicher des « vieux » documents qui nous en apprennent de bien belles sur nos amies les industries fossiles.

Dans Introduction to the Imperial Oil Archival Document Collection on nous fait remonter jusqu'en 1970 pour nous informer qu'en janvier de cette année l'Imperial Oil Enterprises Ltd, une société créée en 1942 et démantelée (mangée par un plus gros poisson ?) en 1978, avait publié un rapport intitulé Pollution Is Everybody's Business.

On sait que la gent climato-« sceptique » (en vérité une fausse s[c]eptique…) dénie au CO₂ le caractère de polluant, or qu'apprend-on dans ce document ? On y apprend pas moins que le CO₂ était à l'époque considéré par l'industrie pétrolière comme un véritable polluant !

Voici la page introductive du document en question (excusez la mauvaise qualité) :
Page 2 du rapport (source Pollution-Is-Everybody-s-Business)

On y définit ainsi ce qu'est un polluant :
The Oxford dictionary defines pollution as "the destruction of purity or sanctity". In relation to providing protection to our environment, a better definition is "the addition of foreign matter to an ecological system in such quantity that the system cannot adjust successfully and so suffers an undesirable change."
Le dictionnaire Oxford définit la pollution comme "la destruction de la pureté ou de la sainteté". En ce qui concerne la protection de notre environnement, une meilleure définition est " l'ajout de matières étrangères à un système écologique en une quantité telle que le système ne peut s'ajuster avec succès et subit ainsi un changement indésirable ".
Ainsi les « experts » de cette société pétrolière avaient à l'époque correctement identifié ce qu'était réellement un polluant en ne restant pas englués dans la définition trop restrictive du dictionnaire qui évoquait notamment une supposée « sainteté » que seuls des culs-bénits pourraient invoquer.

A la suite de cette introduction une liste de polluants était soumise au lecteur :
Page 4 du rapport (source Pollution-Is-Everybody-s-Business)

On voit que le CO2 était clairement mentionné comme polluant, avec le renvoi suivant en bas de page :
Carbon Dioxide Affects Global Ecology - E.K Peterson, P 1162 - Environmental Science and Technology, November, 1969.
Le dioxyde de carbone affecte l'écologie mondiale - E.K. Peterson, P 1162 - Environmental Science and Technology, novembre 1969.
Donc les « pétroliers » citaient en janvier 1970 un article d'un certain Peterson publié en novembre 1969 dans une revue scientifique ; l'article en question est disponible ici et voici son sous-titre sans équivoque :
Continued increases in atmospheric carbon dioxide will change worldwide weather and plant growth.
L'augmentation continue du dioxyde de carbone dans l'atmosphère modifiera les conditions météorologiques et la croissance des plantes à l'échelle mondiale.
On remarquera la terminologies employée, « modifiera » et non « pourrait modifier », en 1969 on était donc sûr et certain que le CO₂ est bien un moteur du changement climatique !

Et c'est sur cette base scientifique qui n'a jamais depuis été démentie que notre société pétrolière a publié le rapport de janvier 1970 classant le CO₂ parmi les polluants ; mais ça c'était avant !

En effet, en 1998 la nouvelle société (ayant probablement absorbé en 1978 la petite compagnie ayant publié le rapport) Imperial Oil a simplement changé son fusil d'épaule (ou retourné sa veste) comme nous l'explique le site Climate Files :
Indeed by 1998, Imperial had done an about face, with the CEO publishing in the Imperial Oil Review, a document titled “A Cleaner Canada” doubling down on over and over on climate denial:

“One thing is clear in this debate. There is absolutely no agreement among climatologists on whether or not the planet is getting warmer or, if it is, on whether the warming is the result of man-made factors or natural variations in the climate.”

“It is possible that the warming observed during this century may have resulted from natural variations…”

“The debate over [global warming] centres around whether the burning of fossil fuels…will cause temperatures around the world to rise to the point where we will be faced with a planetary disaster. It is important to understand that this issue has absolutely nothing to do with pollution and air quality.”

“Carbon dioxide is not a pollutant but an essential ingredient of life on this planet – the plant world cannot live without it.” “I feel very safe in saying that the view that burning fossil fuels will result in global climate change remains an unproved hypothesis.”
En fait, en 1998, Impérial avait fait volte-face et le PDG avait publié dans l'Imperial Oil Review un document intitulé " Un Canada plus propre " qui en remettait encore une couche sur la négation du changement climatique :

"Une chose est claire dans ce débat. Les climatologues ne s'entendent absolument pas sur la question de savoir si le réchauffement de la planète est dû ou non à l'action de l'homme ou à des variations naturelles du climat.

"Il est possible que le réchauffement observé au cours de ce siècle soit dû à des variations naturelles..."

"Le débat sur[le réchauffement planétaire] est centré sur la question de savoir si la combustion de combustibles fossiles[...] fera monter les températures dans le monde entier au point où nous serons confrontés à une catastrophe planétaire. Il est important de comprendre que cette question n'a absolument rien à voir avec la pollution et la qualité de l'air."

"Le dioxyde de carbone n'est pas un polluant mais un ingrédient essentiel de la vie sur cette planète - le monde végétal ne peut vivre sans lui." "Je me sens très en sécurité en disant que la thèse selon laquelle la combustion de combustibles fossiles entraînerait un changement climatique global reste une hypothèse non prouvée."
Le comique de la situation est que le PDG en question s'appelle Peterson, comme le signataire de l'étude scientifique qui a été reprise dans le rapport de 1970 !

Un Peterson peut donc en cacher un autre et un financier uniquement préoccupé par sa bottom line remplacer un scientifique qui avait déjà quasiment tout compris et tout dit quelque temps auparavant.

Tous comptes faits tout s'explique avec un simple dessin.


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