mardi 3 novembre 2020

Bis repetita ?

 Tout d'abord quelques informations factuelles :

Elections américaines de 2000 :

  • George W. Bush : 50 456 002 voix
  • Al Gore : 50 999 897 voix
  • Ecart de voix : 543 895 en faveur d'Al Gore
  • Président élu : George W. Bush

  • Hillary Clinton : 65 853 514 voix
  • Donald Trump : 62 984 828 voix
  • Ecart de voix : 2 868 686 en faveur d'Hillary Clinton
  • Président élu : Donald Trump

On rappellera quelques élections ayant respecté le scrutin dit « populaire » :

  • Bill Clinton : 47 402 357 voix
  • Bob Dole : 39 198 755 voix
  • Ecart de voix : 8 203602 en faveur de Bill Clinton
  • Président élu : Bill Clinton
  • Bill Clinton : 44 909 806 voix
  • George H. W. Bush : 39 104 550 voix
  • Ecart de voix : 5 805 256 en faveur de Bill Clinton
  • Président élu : Bill Clinton
  • George W. Bush : 62 041 268 voix
  • John Kerry : 59 028 548 voix
  • Ecart de voix : 3 012 720 en faveur de George W. Bush
  • Président élu : George W. Bush
  • Barak Obama : 69 456 897 voix
  • John McCain : 59 934 814 voix
  • Ecart de voix : 9 522 083 en faveur de Barak Obama
  • Président élu : Barak Obama
  • Barak Obama : 65 918 507 voix
  • Mitt Romney : 60 934 407 voix
  • Ecart de voix : 4 984 100 en faveur de Barak Obama
  • Président élu : Barak Obama
Première remarque, qui a de l'importance : à part en 2004 nous voyons que l'Amérique vote pour les démocrates depuis 1992, soit depuis près de 30 ans ! Et encore l'élection de Bush fils en 2004 a largement été favorisée par le choc émotionnel qu'ont représenté les attentats du 11 septembre 2001 avec les conséquences déplorables qui ont suivi mais qui à l'époque n'avaient pas été perçues par les Américains, tellement ils étaient sidérés par l'attaque de quelques djihadistes sur leur propre territoire ; Bush l'avait alors emporté avec « seulement » 3 millions de voix de plus que son adversaire, quand Obama écrasait les siens avec 5 à 9,5 millions de voix de plus !

Deuxième remarque, après on arrêtera, si Bush l'avait emporté avec 3 millions de voix de plus on constatera qu'Hillary Clinton a perdu face à Donald Trump avec presque le même nombre de voix en sa faveur !

Et quid de cette élection-ci ? Joe Biden pourrait vaincre Donald Trump en lui mettant 5 millions de voix dans la vue, pourtant il n'est pas assuré à 100% d'être le prochain président, même si au regard des sondages actuels il semblerait que les jeux soient faits :

Moyenne des sondages (source projects.fivethirtyeight)


+8,4 points d'écart à la date du 2 novembre, c'est un peu plus que ce qui était donné à Hillary Clinton peu avant le 8 novembre 2016 (de 1 à 7 points d'écart), donc Biden a simplement « un peu plus » de chances de gagner que Clinton en avait de ne pas perdre, ce qui devrait nous rassurer...hum...

Mais même si Biden l'emporte finalement dans les urnes tant au nombre de voix (ce qui ne fait absolument aucun doute) qu'au niveau du collège électoral qui est le seul qui compte réellement pour définir qui sera l'heureux élu, personne, absolument personne ne peut dire ce qui va se passer entre le 3 novembre 2020 et le 20 janvier 2021, ni même ce qui peut se passer après cette date !

En fait à la lecture de The Election That Could Break America. If the vote is close, Donald Trump could easily throw the election into chaos and subvert the result. Who will stop him? (L'élection qui pourrait briser l'Amérique. Si le vote est serré, Donald Trump pourrait facilement plonger l'élection dans le chaos et fausser le résultat. Qui l'en empêchera ?) on s'aperçoit qu'il existe une multitude de scénarios possibles et que les institutions ainsi que la Constitution américaines ne prévoient pas vraiment des choses qu'un abruti de la trempe de Trump est tout bonnement capable de faire.

Tout d'abord l'auteur de l'article nous explique que depuis qu'un certain William Jennings Bryan, malheureux candidat à l'élection de 1896 (ça ne nous rajeunit pas), a « concédé » officiellement sa défaite, la « concession » est devenue un rituel incontournable de chaque élection :
After Bryan, concession became a civic duty, performed by telegram or telephone call and then by public speech. Al Smith brought the concession speech to radio in 1928, and it migrated to television soon afterward.
Après Bryan, la concession est devenue un devoir civique, accompli par télégramme ou par appel téléphonique, puis par discours public. Al Smith a introduit le discours de concession à la radio en 1928, et il est passé à la télévision peu après.
Et même Al Gore s'y était plié malgré le fait que sa défaite contre Bush fils était plus que contestable :
Consider the 2000 election, which may appear at first glance to demonstrate otherwise. Al Gore conceded to George W. Bush on Election Night, then withdrew his concession and fought a recount battle in Florida until the Supreme Court shut it down. It is commonly said that the Court’s 5–4 ruling decided the contest, but that’s not quite right.
The Court handed down its ruling in Bush v. Gore on December 12, six days before the Electoral College would convene and weeks before Congress would certify the results. Even with canvassing halted in Florida, Gore had the constitutional means to fight on, and some advisers urged him to do so. If he had brought the dispute to Congress, he would have held high ground as the Senate’s presiding officer.
Not until Gore addressed the nation on December 13, the day after the Court’s decision, did the contest truly end. Speaking as a man with unexpended ammunition, Gore laid down his arms. “I accept the finality of this outcome, which will be ratified next Monday in the Electoral College,” he said. “And tonight, for the sake of our unity as a people and the strength of our democracy, I offer my concession.”
La Cour a rendu son jugement dans l'affaire Bush contre Gore le 12 décembre, six jours avant que le Collège électoral ne se réunisse et des semaines avant que le Congrès ne certifie les résultats. Même avec l'arrêt de la campagne de démarchage en Floride, Gore avait les moyens constitutionnels de continuer à se battre, et certains conseillers l'ont exhorté à le faire. S'il avait porté le litige devant le Congrès, il aurait tenu le haut du pavé en tant que président du Sénat.
Ce n'est que lorsque Gore s'est adressé à la nation le 13 décembre, le lendemain de la décision de la Cour, que le combat a véritablement pris fin. S'exprimant en tant qu'homme avec des munitions non utilisées, Gore déposa les armes. "J'accepte le caractère définitif de ce résultat, qui sera ratifié lundi prochain par le Collège électoral", a-t-il déclaré. "Et ce soir, au nom de notre unité en tant que peuple et de la force de notre démocratie, j'offre ma concession."
Ainsi Al Gore avait la possibilité de ne pas « concéder » sa défaite et d'aller devant les tribunaux, avec quelques chances de gagner l'élection sur tapis vert, mais il ne l'a pas fait, estimant que l'intérêt de son pays allait au-delà du sien propre.

Or il est envisagé très sérieusement que Trump ne concède jamais sa défaite...

Par ailleurs nous avons cette fameuse (ou plutôt fumeuse) période comprise entre le jour de l'élection et le jour de la passation de pouvoir effective ; cette période est appelée « interregnum » et ce ne sera pas une partie de plaisir d'après l'auteur de l'article :
This year, if election analysts are right, we know when the trouble is likely to come. Call it the Interregnum: the interval from Election Day to the next president’s swearing-in. It is a temporal no-man’s-land between the presidency of Donald Trump and an uncertain successor—a second term for Trump or a first for Biden. The transfer of power we usually take for granted has several intermediate steps, and they are fragile.
Cette année, si les analystes électoraux ont raison, nous savons quand les problèmes risquent de survenir. C'est ce qu'on appelle l'interrègne : l'intervalle entre le jour de l'élection et la prestation de serment du prochain président. Il s'agit d'un no man's land temporel entre la présidence de Donald Trump et un successeur incertain - un second mandat pour Trump ou un premier pour Biden. Le transfert de pouvoir que nous considérons généralement comme acquis comporte plusieurs étapes intermédiaires, et elles sont fragiles.
On ne peut qu'être abasourdis d'apprendre que le pays le plus puissant de la planète, celui qui se vante d'être un phare civilisationnel bien au-dessus de toutes les autres démocraties, permet que pendant 79 jours, la durée de cet interrègne, il existe des « étapes intermédiaires fragiles » pouvant le faire sombrer dans le chaos !
“Our Constitution does not secure the peaceful transition of power, but rather presupposes it,” the legal scholar Lawrence Douglas wrote in a recent book titled simply Will He Go? The Interregnum we are about to enter will be accompanied by what Douglas, who teaches at Amherst, calls a “perfect storm” of adverse conditions. We cannot turn away from that storm. On November 3 we sail toward its center mass. If we emerge without trauma, it will not be an unbreakable ship that has saved us.
"Notre Constitution n'assure pas la transition pacifique du pouvoir, mais la présuppose", a écrit le juriste Lawrence Douglas dans un récent ouvrage intitulé simplement Will He Go ? L'interrègne dans lequel nous allons entrer sera accompagné de ce que Douglas, qui enseigne à Amherst, appelle une "tempête parfaite" de conditions défavorables. Nous ne pouvons pas nous détourner de cette tempête. Le 3 novembre, nous naviguerons vers sa masse centrale. Si nous en sortons sans traumatisme, ce ne sera pas un navire incassable qui nous aura sauvés.
L'article est trèèèèèèèèès loooooooooong et je vous laisse le lire en entier, voici simplement son dernier paragraphe afin de vous en donner envie :
That is an unsettling precedent for 2021. If our political institutions fail to produce a legitimate president, and if Trump maintains the stalemate into the new year, the chaos candidate and the commander in chief will be one and the same.
C'est un précédent troublant pour 2021. Si nos institutions politiques ne parviennent pas à produire un président légitime, et si Trump maintient l'impasse jusqu'à la nouvelle année, le candidat au chaos et le commandant en chef ne feront qu'un.

Et pour le chaos, nous le savions pourtant dès le début

Chaos. Désordre. Incompétence.


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