vendredi 2 juillet 2021

L'(an)alpha(bète) et l'oméga

 Je ne pensais pas revenir si tôt chez eux, mais la situation exceptionnelle que vivent les Canadiens et Américains de l'ouest m'a donné envie d'aller voir si le niveau de bêtise avait (un peu) évolué ; j'ai été vite rassuré, nous avons toujours affaire à la même fine équipe de bras cassés qui a fait le bonheur de mes sottisiers et fadaisiers, et j'ai la confirmation que si je décide un jour de reprendre hebdomadairement les balivernes dont le site est coutumier je n'aurais qu'à me pencher pour ramasser.

Oui, je parle de ce site qu'il ne faut pas confondre avec un James Bond, le 007 pouvant éventuellement figurer le QI moyen des habitués des lieux ; ainsi sans avoir eu à chercher très longtemps je suis tombé sur cette véritable pépite :

Fil info de sceptiques 2020 - Changement Climatique (skyfall.fr)

2586. Hug | 29/06/2021 @ 1:06

Vague de chaleur historique sur l’ouest de l’amérique du nord:

Cette situation de blocage en oméga est classique mais l’ampleur du phénomène actuel s’inscrit pleinement dans la tendance liée au changement climatique.

MF chercherait pas à nous embrouiller un peu (même beaucoup) ?
Ils ne le disent pas, mais ils sont bien conscients que ces situations de blocage en omega que l’on retrouve systématiquement lors des grosses vagues de chaleurs de ces dernières années (que ce soit aux USA, en Europe ou en Sibérie), n’ont rien à voir avec la hausse du taux de CO2 atmosphérique. Alors on nous dit que ça s’inscrit dans la « tendance liée au changement climatique ». Jolie façon de noyer le poisson pour rattacher des situations meteo sans rapport avec la hausse du CO2 – et dont la récurrence particulièrement notable ces dernières années constitue un changement climatique naturel – avec le prétendu réchauffement climatique anthropique.

Ainsi notre guignol du jour, j'ai nommé monsieur Hug, nous fait ici un magnifique sophisme de l'homme de paille (straw man in English) en insinuant que Météo France lierait la situation de blocage en oméga à la hausse du taux de CO2 atmosphérique ; évidemment il n'en est rien, à aucun moment Météo France, ni aucun autre organisme météo, ni aucun scientifique, qu'il soit météorologue ou climatologue, n'a jamais affirmé qu'une situation de blocage en oméga pouvait être causée par une augmentation des gaz à effet de serre dans l'atmosphère, il s'agit là d'un fantasme incrusté dans un cerveau qui aurait bien besoin d'être examiné par un spécialiste.

J'ai déjà à deux reprises évoqué ces situations de blocage en oméga :

A aucun moment je ne mentionne le CO₂ dans ces deux billets, et pour cause, car une situation de blocage en oméga est un phénomène purement météorologique bien connu des spécialistes depuis pas mal de temps.

Ainsi le Met Office explique dans Blocking patterns :
Omega blocks are named due to pattern they form which resembles the uppercase Greek letter omega, Ω. An area of high pressure will be sandwiched in between two lows to the east and west, and also slightly to the south. These blocks frequently occur on the eastern edges of the Atlantic and eastern Pacific, and can lead to easterly flows to the UK.
Les blocages oméga sont nommés en raison du motif qu'ils forment et qui ressemble à la lettre grecque majuscule oméga, Ω. Une zone de haute pression sera prise en sandwich entre deux dépressions à l'est et à l'ouest, et aussi légèrement au sud. Ces blocages se produisent fréquemment sur les bords orientaux de l'Atlantique et du Pacifique oriental, et peuvent entraîner des flux d'est vers le Royaume-Uni.


On notera deux choses :
  1. aucune mention du CO₂ atmosphérique ;
  2. cette situation se trouve souvent...dans le Pacifique oriental !
Aux Etats-Unis la NOAA nous donne des précisions dans NWS JetStream - Basic Wave Patterns :
Omega blocks get their name because the upper air pattern looks like the Greek letter omega (Ω). Omega blocks are a combination of two cutoff lows with one blocking high sandwiched between them.

Because of their size, Omega blocks are often quite persistent and can lead to flooding and drought conditions depending upon one's location under the pattern. Cooler temperatures and precipitation accompany the lows while warm and clear conditions prevail under the high.

Les blocages oméga tirent leur nom du fait que la configuration de l'air en altitude ressemble à la lettre grecque oméga (Ω). Les blocages Omega sont une combinaison de deux dépressions de coupure avec un anticyclone de blocage pris en sandwich entre les deux. En raison de leur taille, les blocs oméga sont souvent assez persistants et peuvent entraîner des inondations ou des sécheresses selon l'endroit où l'on se trouve dans la configuration. Des températures plus fraîches et des précipitations accompagnent les dépressions tandis que des conditions chaudes et claires prévalent sous l'anticyclone.

Dans l'exemple ci-dessus le blocage en oméga est situé au centre du pays, mais nous avons vu qu'en juin 2021 il était davantage positionné à l'ouest ; peu importe, l'essentiel est de comprendre les conséquences d'un tel système : de l'air (très) chaud est emprisonné entre deux dépressions, et il peut faire du sur-place pendant assez longtemps pour auto-entretenir la chaudière constituée par l'anticyclone (lettre H sur l'image)

Assez ironiquement il n'y a pas longtemps, en avril dernier, une situation similaire prévalait, mais elle ressemblait plutôt à l'exemple montré par la NOAA ; le 5 avril dernier nous apprenions avec Omega block set to deadlock the weather across Canada que

The omega block will create quite the weather backlog in the West and focus all the coldest air across Alberta, British Columbia, Yukon, and The Northwest Territories. It's conceivable that temperatures may plunge close to 20°C below seasonal across the Yukon by this upcoming weekend.
Le blocage oméga va créer un sérieux problème de météo dans l'Ouest et concentrer tout l'air le plus froid sur l'Alberta, la Colombie-Britannique, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. Il est concevable que les températures puissent plonger de près de 20°C en dessous des normales saisonnières sur le Yukon d'ici le week-end prochain.

Eh oui, c'était il y a seulement trois mois ! La région ayant actuellement battu de nombreux records de chaleur se voyait alors gratifiée de températures inférieures de 20°C par rapport à la normale de saison. Et voici plus précisément la position des hautes et basses pressions :

This omega blocking pattern will flourish over Eastern Canada and feature a final upper trough in the textbook omega configuration. (Cette configuration de blocage oméga s'épanouira sur l'est du Canada et présentera un dernier creux en altitude dans la configuration oméga classique.)

Mais comme je le disais plus haut ces situations de blocage en oméga sont connues depuis longtemps ; ainsi en avril 2016 nous pouvions lire dans Omega Block Weather Pattern Impacted Weather From Coast to Coast :

The term omega block is not new — it's often first taught in basic meteorology courses.
Le terme " blocage oméga " n'est pas nouveau - il est souvent enseigné pour la première fois dans les cours de météorologie de base.
Etonnant non ? Ainsi il s'agit d'une connaissance de base, et plus étonnant encore, aucune mention du CO₂ pour expliquer le phénomène, monsieur Hug sera déçu s'il vient à être mis au courant. En fait ce qu'il n'a manifestement pas compris c'est que le réchauffement climatique exacerbe toute situation météorologique : plus il fait chaud, de manière globale, et plus les phénomènes météorologiques ont tendance a être amplifiés, ce qui explique assez facilement que nous battions régulièrement des records de chaleur alors que les records de froid se font de plus en plus rares.

Et qu'est-ce qui provoque ce réchauffement climatique, responsable de l'amplification des phénomènes météo intenses tels que nous les voyons aujourd'hui à l'oeuvre ?

Ne posez surtout pas la question à monsieur Hug, cela risquerait de le faire disjoncter, tant la dissonance cognitive est elle-même amplifiée par les activités humaines.

Probablement nous pourrions aussi parler de blocage oméga en matière de psychologie, la lettre grecque ayant la forme d'une tête qui serait sur le point d'exploser.


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