samedi 23 mai 2020

Cela se précise...

Le site mediabiasfactcheck vient juste de publier un article concernant...l'hydroxychloroquine.

Dans Hydroxychloroquine not effective in the Treatment of Covid-19, increased risk for ventricular arrhythmias (L'hydroxychloroquine n'est pas efficace dans le traitement de Covid-19, risque accru d'arythmies ventriculaires) on résume la situation ainsi :
In a study published in the Peer-Reviewed medical journal The Lancet on May 22, 2020 it concluded that Hydroxychloroquine is not an effective treatment for Covid-19, but rather may increase the risk of ventricular arrhythmias and decreased hospital survival.
Dans une étude publiée dans la revue médicale The Lancet le 22 mai 2020, les auteurs ont conclu que l'hydroxychloroquine n'est pas un traitement efficace pour le Covid-19, mais qu'elle pourrait plutôt augmenter le risque d'arythmies ventriculaires et diminuer la survie à l'hôpital.
Et on nous précise :
Hydroxychloroquine or chloroquine, often in combination with a second-generation macrolide, are being widely used for treatment of COVID-19, despite no conclusive evidence of their benefit. Although generally safe when used for approved indications such as autoimmune disease or malaria, the safety and benefit of these treatment regimens are poorly evaluated in COVID-19.
L'hydroxychloroquine ou la chloroquine, souvent en combinaison avec un macrolide de deuxième génération, sont largement utilisées pour le traitement du COVID-19, malgré l'absence de preuves concluantes de leur bénéfice. Bien qu'ils soient généralement sans danger lorsqu'ils sont utilisés pour des indications approuvées telles que les maladies auto-immunes ou le paludisme, la sécurité et les avantages de ces traitements sont mal évalués dans COVID-19.
Le « macrolide de deuxième génération » dont il est question est bien sûr la fameuse azithromycine comme l'indique Wikipédia :
Il existe plusieurs types de macrolides avec 14, 15 ou 16 atomes dans leur macrocycle. On les classe parfois en diverses générations : 
[…]
2e génération  
[…]
cycle à 15 : azithromycine
On retiendra de cette information que :
  • l'hydroxychloroquine avec ou sans azithromycine n'est pas efficace contre le covid-19 ;
  • ces médicaments sont « largement utilisés [...] malgré l'absence de preuves concluantes de leurs bénéfices » ;
  • quand ils sont utilisés dans le cadre pour lequel ils ont été conçus (paludisme ou lupus par exemple) ils sont « généralement sans danger » ;
  • pour le covid-19 ils « sont mal évalués », c'est-à-dire qu'on ne sait pas très bien quels peuvent être leurs effets sur l'être humain.
Il est quand même sidérant qu'à la suite de Raoult nombreux sont ses admirateurs qui avancent que puisqu'ils sont efficaces et (pratiquement) sans danger pour le paludisme ou le lupus alors ces médicaments seraient nécessairement efficaces et sans danger pour traiter le covid-19 ; il me semble que cela ressort du biais de conclusion (jumping to conclusion en anglais) qui, selon Wikipédia, 
is a psychological term referring to a communication obstacle where one "judge[s] or decide[s] something without having all the facts; to reach unwarranted conclusions".[2][3] In other words, "when I fail to distinguish between what I observed first hand from what I have only inferred or assumed".[1] Because it involves making decisions without having enough information to be sure that one is right, this can give rise to poor or rash decisions that often cause more harm to something than good. 
est un terme psychologique désignant un obstacle à la communication où l'on "juge ou décide quelque chose sans disposer de tous les faits ; pour arriver à des conclusions injustifiées"[2]. 3] En d'autres termes, "lorsque je ne fais pas la distinction entre ce que j'ai observé de première main et ce que j'ai seulement déduit ou supposé"[1]. Comme il s'agit de prendre des décisions sans disposer de suffisamment d'informations pour être sûr que l'on a raison, cela peut donner lieu à des décisions médiocres ou irréfléchies qui causent souvent plus de tort que de bien à quelque chose.
La publication dans le Lancet qui est à la base de ce factchecking est titrée Hydroxychloroquine or chloroquine with or without a macrolide for treatment of COVID-19: a multinational registry analysis (Hydroxychloroquine ou chloroquine avec ou sans macrolide pour le traitement de COVID-19 : analyse d'un registre multinational) et voici sa conclusion :
In summary, this multinational, observational, real-world study of patients with COVID-19 requiring hospitalisation found that the use of a regimen containing hydroxychloroquine or chloroquine (with or without a macrolide) was associated with no evidence of benefit, but instead was associated with an increase in the risk of ventricular arrhythmias and a greater hazard for in-hospital death with COVID-19. These findings suggest that these drug regimens should not be used outside of clinical trials and urgent confirmation from randomised clinical trials is needed.
En résumé, cette étude multinationale d'observation en situation réelle de patients atteints de COVID-19 nécessitant une hospitalisation a révélé que l'utilisation d'un traitement contenant de l'hydroxychloroquine ou de la chloroquine (avec ou sans macrolide) n'était associée à aucune preuve de bénéfice, mais plutôt à une augmentation du risque d'arythmies ventriculaires et à un plus grand risque de décès en milieu hospitalier avec COVID-19. Ces résultats suggèrent que ces régimes médicamenteux ne devraient pas être utilisés en dehors des essais cliniques et qu'une confirmation urgente des essais cliniques randomisés est nécessaire.
Donc non seulement le traitement miraculeux (à Marseille uniquement, allez savoir pourquoi) ne semble pas efficace mais il est surtout dangereux, et cela en milieu hospitalier ; on imagine alors hors milieu hospitalier…

On comprend mieux pourquoi l'hydroxychloroquine a été classée parmi les substances vénéneuses et pourquoi également on a interdit aux médecins libéraux de l'utiliser ; cette substance a fait l'objet :
  • [d'un] avis du directeur général de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail en date du 12 novembre 2019 ;
  • [d'une] proposition du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé en date du 13 décembre 2019 ;
  • [d'un] arrêté du 13 janvier 2020 [émanant de la] ministre des solidarités et de la santé [Agnès Buzyn]
Finalement les autorités sanitaires françaises n'ont pas été si mauvaises sur ce coup-là, malgré les quelques ratés qu'on peut leur mettre sur le dos durant la crise mais qu'elles partagent amplement à des degrés divers avec les autorités sanitaires de quasiment tous les pays de la planète.

Le Conseil d'Etat lui-aussi a joué son rôle en rejetant les requêtes de médecins qui voulaient s'affranchir de l'interdiction après avoir été hypnotisés par le gourou voilé phocéen :
Saisi par des médecins libéraux souhaitant pouvoir prescrire de la chloroquine pour soigner leurs patients atteints du coronavirus, le Conseil d’Etat a tranché ce samedi [28 mars 2020] dans le sens du gouvernement.
Nos institutions ont donc été parfaitement clairvoyantes en ne cédant pas aux sirènes marseillaises, cela aura très probablement sauvé un nombre important de vies ; par contre pour les vies qui ont été mises à la disposition du professeur Raoult et qu'il aura gâchées, celui-ci devra peut-être rendre des comptes quand tout sera revenu (presque) comme avant et que l'on pourra passer à la phase judiciaire.

Qui déjà a dit que « l'enquête sera sanglante » ? Ah oui, c'est lui :

Didier Raoult menace : « L’enquête sera sanglante »


Il ne croyait pas si bien dire.


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