mercredi 20 mai 2020

J'approuve Laurent Alexandre (une fois n'est pas coutume)


Il ne peut pas avoir tort sur tout, comme Didier Raoult ne peut pas avoir tort sur tout, comme Olivier Berruyer ne peut pas avoir tort sur tout, comme Michel de Lorgeril ne peut pas avoir raison sur tout.

Qui ? Ben oui, c'est de Laurent Alexandre qu'il s'agit, celui-là même qui délire régulièrement sur le transhumanisme et nous a prédit que l'humanité sauverait la Galaxie (oui, notre Galaxie) dans quatre milliards d'années et l'Univers (oui, notre Univers) dans gogol années (voir Laurent Alexandre, le nouvel étalon de l'intelligence de notre temps ?)

Non il ne peut pas avoir tort sur tout et notamment en matière de médecine puisque parait-il il est, ça tombe bien, médecin urologue de son état, même s'il ne doit pas exercer cette profession de manière régulière...

Dans La Querelle Raoult (Série) : L’intuition médicale tue ! il publiait le 21 avril dernier un article qu'il me serait difficile de renier étant donné qu'il va exactement dans le sens que je pressens.

Effectivement, il me semble avoir déjà dit que la recherche médicale française filait un mauvais coton ( je ne retrouve plus l'article mais ça me reviendra peut-être à moins qu'un lecteur attentif...) à cause de celui que Michel de Lorgeril qualifie de polichinelle du Vieux-Port et Olivier Berruyer de pur charlatan.

Cela commence d'ailleurs à bien se voir que son traitement miraculeux ressemble davantage à de la poudre de perlimpinpin qu'à de la matière pour prix Nobel de médecine (voir notamment « Fin de partie » pour le professeur Raoult ? et Deux pierres de plus dans le jardin de Didier Raoult)

Je suis pourtant le premier à avoir souhaité que son traitement à base de chloroquine marche vraiment tellement j'aimerais être définitivement débarrassé de cette saloperie de virus qui nous empoisonne à tous l'existence depuis plusieurs mois et menace de continuer ainsi pendant « un certain temps » que personne, et surtout pas Raoult, ne sait évaluer ; j'écrivais ainsi dans L'autre Didier Raoult (c'était le 22 mars dernier, il y a environ deux mois déjà) :
L'avenir nous dira si Raoult est le sauveur de la planète, ce que nous espérons tous finalement, car si son médicament s'avère efficace comme il le dit c'est plutôt une excellente nouvelle. A confirmer.
Les confirmations tombent les unes après les autres et elles ne constituent pas vraiment d'excellentes nouvelles.

Je suis donc assez d'accord avec Laurent Alexandre quand il écrit notamment :
Les fans du professeur Didier Raoult, dans un déni complet, ont d’ailleurs oublié qu’il avait dit que le coronavirus serait grâce à la chloroquine l’infection respiratoire la plus facile à traiter de notre histoire et qu’elle faisait moins de victimes que les accidents de trottinettes.
Comment ne pas être d'accord, hein ? J'ai moi-même à maintes reprises rappelé à mes lecteurs les divers errements du gourou voilé de la Canebière qui entraine ses suivants (ou suiveurs) dans son naufrage, tels les professeurs Perronne et Douste-Blazy qui ont tous deux manqué une bonne occasion de rester humbles et discrets.

Je ne détaillerai pas tout ce que dit Laurent Alexandre, notamment sur la politisation du sujet et sa « giletjaunisation », quelque chose certes intéressant mais que je préfère laisser de côté, par contre je citerai ce passage vers la fin où il tutoie son tropisme transhumaniste sans pourtant déraper, ce qui fait que je ne peux qu'acquiescer :
Le rôle de l’Intelligence Artificielle dans le management de cette crise a été marginal. Mais la crise de la chloroquine -qu’elle se révèle finalement efficace ou inefficace- accélérera le déclin de ma profession. Elle a augmenté le pouvoir des médecins anti-sciences au détriment des partisans de la médecine basée sur des preuves scientifiques.

A l’ere de la génétique et du big data cette évolution est suicidaire : aucun médecin ne pourra avec son intuition et ses tripes -pour paraphraser le Professeur Péronne- traiter des milliards d’informations. En 2040, il y aura un million de fois plus de données dans un dossier médical qu’aujourd’hui. Les médecins vont affronter une véritable « tempête numérique » : ils devront interpréter demain des milliers de milliards d’informations quand ils ne gèrent aujourd’hui que quelques poignées de données. L’analyse complète de la biologie d’une seule tumeur représente, par exemple, 20.000 milliards de données. On découvre 100.000 nouvelles mutations génétiques chaque jour. Dans le génome de chacun de nous, il existe en moyenne 2 millions de mutations par rapport au génome de référence. On connaît déjà 200 millions de single nucleotide polymorphisms (SNPs), qui sont les positions de notre ADN pouvant faire l’objet d’une variation chez tout un chacun et potentiellement responsable d’effets cliniques.
Et il porte l'estocade finale :
Dans ce contexte, refuser la médecine basée sur les preuves et les statistiques est suicidaire. Si ma profession ne se ressaisit pas rapidement, nous allons devenir des sous-médecins. Le retour à la médecine de 1970 est voué à l’échec : personne n’acceptera en 2030 de devoir passer par son cancérologue travaillant à l’intuition et refusant les statistiques avec 50 % seulement de chance de survie pour son enfant leucémique si l’IA de Google, Alibaba ou Amazon apporte 95 % de taux de guérison.
Bien que je ne sois pas totalement persuadé qu'en 2030 (dans dix ans) les GAFA pourront nous soigner mieux que ne le ferait un médecin, je pense qu'il n'a pas tort (encore !) et que tôt ou tard les robots, quelle que soit leur forme et leur aspect physique ou immatériel, seront capables d'effectuer des diagnostics très corrects et de proposer les meilleurs médicaments disponibles sur le marché.

En fin de compte Didier Raoult est un dinosaure de la médecine qui n'a pas compris qu'une météorite était en train de s'abattre sur lui dans le dessein (intelligent ?) de le faire disparaitre. Mais comme ce n'est pas pour tout de suite et qu'il est plus proche de la retraite que du jardin d'enfant il devrait s'en remettre sans trop de problème.

A titre de bonus je vous offre la vidéo, proposée par Laurent Alexandre dans son article, d'un jeune médecin qui nous narre sept histoires d'essais cliniques ayant prouvé que l'intuition pouvait avoir des effets néfastes au point de causer parfois autant de morts que la guerre du Vietnam :


Le genre de vidéo dont pourraient s'inspirer des gens comme Benoit Rittaud qui en profiterait pour améliorer la forme de ses interventions ennuyantes (ou ennuyeuses) ainsi que Philippe Catier qui en tirerait quelques leçons pouvant lui servir dans son métier de médecin-dépeceur. On apprendra dans cette vidéo dynamique où pas une seule seconde n'est perdue en blabla inutile que les essais cliniques ont une utilité que même de grands professeurs (surtout à barbe blanche) n'ont toujours pas comprise.

Un grand merci donc à Laurent Alexandre qui remonte (un peu) dans mon estime, à charge pour lui de ne pas gâcher ce beau travail d'analyse avec de futures élucubrations dont il semble avoir le secret.



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