mercredi 1 juillet 2020

Emmanuel Garnier à l'honneur chez les climato-irréalistes

Le site des climato-irréalistes, dans 500 années de sécheresses et de canicules en Île de France, nous gratifie d'un énième article supposé nous prouver que ce que nous vivons de nos jours n'est finalement rien d'autre qu'une situation normale et que dans le passé il y a déjà (toujours) eu des événements exceptionnels ; ainsi le titre est suffisamment parlant, nous avons une histoire de « 500 ans de sécheresses et de canicules en Ile de France », ce qui montre, n'est-ce pas, que les sécheresses et canicules d'aujourd'hui, et de demain ne l'oublions pas, ne sont rien d'autre que la continuation d'un long passé.

Il est bien évidemment intéressant de se pencher sur le passé et de le faire, comme s'y emploie Emmanuel Garnier, en étudiant les textes anciens, et notamment les archives sur les processions religieuses, mais le procédé a ses limites qui tiennent surtout au ressenti des personnes chargées à l'époque de transcrire sur le papier ce qu'elles expérimentaient « sur le terrain » ; il n'y avait malheureusement pas de thermomètres durant une grande partie des 500 années recensées, on ne pourra donc se fier qu'aux « proxies climatiques » qui sont, comme nous l'explique Futura Sciences :
[des] indicateurs biologiques, géochimiques ou sédimentaires qui permettent de quantifier empiriquement les paramètres climatiques et environnementaux utilisés pour les reconstitutions climatiques (tout particulièrement les reconstitutions du passé climatique de la terre : proxies paléoclimatiques).
Les proxies climatiques sont très variés, Wikipédia nous donne la liste :

Il n'est pas sûr que cette liste soit exhaustive, quoiqu'il en soit on voit bien qu'à côté la simple consultation d'« archives sur les processions religieuses » est quelque peu réductrice et qu'on ne pourra en tirer que des informations à prendre avec de grandes pincettes.

Par ailleurs Emmanuel Garnier ne fait que suivre les pas du géant qu'est Emmanuel Le Roy Ladurie dont j'ai déjà parlé à plusieurs reprises, par exemple dans Emmanuel Le Roy Ladurie et Guillaume Séchet climatosceptiques, vraiment? (1)Emmanuel Le Roy Ladurie et Guillaume Séchet climatosceptiques, vraiment? (2) ou Il faut écouter et lire Emmanuel Le Roy Ladurie ; dans ces billets j'expliquais comment Ladurie s'était fait embaucher par la caste des climato-irréalistes qui lui faisait dire ce qu'il n'avait jamais écrit dans ses livres.

Un des nombreux mantras des climato (soi-disant) sceptiques est, vous le savez pour ceux d'entre vous qui me lisez régulièrement, que « le climat a toujours changé » et que par conséquent il n'y a rien d'anormal dans ce que nous vivons depuis un siècle ou deux, donc quand Ladurie relate les aléas climatiques des temps passés ils comprennent que l'historien veut dire lui aussi que « le climat a toujours changé » et que par conséquent etc. (vous avez pigé le reste)

Cependant lorsqu'on prend la peine de lire Ladurie, ce que j'ai fait, on s'aperçoit qu'il est parfaitement en phase avec ce que disent tous les climatologues de la planète (à l'exception de ceux payés pour nier l'évidence) ; par exemple (tiré de ce billet)  :
Page 86 (1901-1910) - « Le fil conducteur, maintenant, dans ce volume troisième, c'est bien plutôt le réchauffement lent et long ; il entrainera cette météo et l'humanité avec elle en direction de conjonctures encore inexploitées, et semble-t-il périlleuses [...] au cours de notre XXIe siècle »
Page 96 ( 1911-1950) - « [...] le réchauffement français [...] se situe à 0,09° par décennie, soit 0,9° pour un siècle [...] A partir de 1975, ce réchauffement devient plus rapide et même plus impressionnant »
Page 99 (1911-1920) - « [...] avec 20,8° de moyenne [...] l'été 1911 [...] domine 1976 (20,3°), et se fait écraser par 2003 (22,6°) »
Page 111 (1911-1920) - « [...] l'hiver doux [...] 1911-1912 : 6,9° (DJF) [...] n'est pas indigne des 7,2° de l'hiver dulcissime 2006-2007, lui-même typique de notre ultra-réchauffement des débuts du IIIe millénaire »
Page 203 (1941-1950) - « Le XXe siècle (1911-2003) est nettement plus fourni en canicules que le XIXe, a fortiori que le XVIIIe...Réchauffement oblige. »
Page 304 (1981-1990) - « L'« inoubliable tiercé » [1988-1989-1990] n'a pas seulement valeur intrinsèque. [...] une annonciation d'ampleur prédictive pour le réchauffement qui va désormais s'imposer dans le « définitif » (?) au cours de l'ultime décennie du XXe siècle et pour les débuts du XXIe. »
Page 336 (2001-2008) - « Vis-à-vis des productions agricoles, la canicule 2003 relève de la puissance du négatif. Trop de chaleur, trop de sécheresse : on se situe cette fois au-delà de l'optimum. »
Ce ne sont que quelques exemples tirés du livre Le réchauffement de 1860 à nos jours, « nos jours » signifiant l'année 2008, sachant que les huit années les plus chaudes à la date d'aujourd'hui, 12 ans après la parution du livre, sont dans l'ordre 2016, 2019, 2017, 2015, 2018, 2014, 2010 et 2013 (source wikipedia) ; j'ai noté bien d'autres exemples dans mon billet, si vous désirez les consulter c'est ici.

On remarque avec amusement que Ladurie cite un certain Marcel Garnier :
Page 131 (1921-1930) - « [...] L'excellent météorologiste que fut Marcel Garnier note des maxima 1921 assez extraordinaires [...] Cela dit, l'été 1921, localement, n'offre pas le record thermique JJA des XXe et XXIe siècles. On connaitra mieux... »
Je subodore un lien de parenté entre Marcel et Emmanuel, mais sans pouvoir le certifier, ce qui n'a après tout pas grande importance. Néanmoins le point commun entre ces deux Garnier est qu'ils semblent être « embauchés à l'insu de leur plein gré », tout comme le fut Le Roy Ladurie, par la coterie des climato-gogos ; en effet, le seul fait d'être cité dans un article du site des climato-crétins est un indice suffisant pour en être persuadé, alors que le principal intéressé, dans Comment l’historien peut-il contribuer à reconstituer les climats du passé ?, nous dit ceci :
Du haut de ses siècles d’archives, l’historien ne peut que constater les fluctuations longues ou courtes ayant affecté les sociétés du passé. Ce constat est encore plus frappant quand il s’intéresse aux événements extrêmes des 500 dernières années et qu’il découvre que non seulement ils ont toujours existé mais que, de surcroît, ils ont été plus fréquents à certaines périodes qu’au cours de la période contemporaine. Néanmoins, il convient de rappeler que le climat vu par l’historien est surtout un climat perçu par nos ancêtres dans la mesure où la documentation est pétrie de chair humaine. Sans hommes pas d’archives et, sans archives, il n’y a pas d’histoire du climat…
L'historien semble ici parfaitement conscient des limites de son travail, lequel se base sur des éléments subjectifs, alors que les thermomètres ou les proxies climatiques sont des données objectives que les scientifiques concernés, spécialistes dans leurs domaines respectifs, utilisent pour reconstituer les températures (entre autres) des temps anciens ; l'historien et le climatologue ne jouent pas dans la même cour, et même si leurs résultats peuvent se prêter à des comparaisons les informations des climatologues seront toujours plus précises et dignes de confiance que celles des historiens.

Concernant l'aspect subjectif des données historiques, Emmanuel Garnier nous dit par exemple :
les sources phénologiques [...] existent dès le XIIIe siècle. On y trouve pêle-mêle les bans de vendanges, les dates de moissons ou de récoltes des fruits (olives, pommes, etc.). Elles n’en demeurent pas moins sujettes à discussion. On reproche à leurs utilisateurs de ne pas tenir compte d’un certain nombre de paramètres anthropiques fondamentaux comme les changements culturels et les contextes géopolitique et épidémiologique. C’est à ce niveau d’incertitude qu’il revient à l’historien, spécialiste des archives, d’intervenir afin de « dépolluer » les séries de leur empreinte sociale4.
Mais un passage interpelle quand il écrit :
La méthodologie employée pour reconstruire les climats passés relève d’une question nettement plus épineuse dans la perspective de recherches transdisciplinaires.
 Ici l'historien avoue qu'il ne peut pas travailler tout seul, il a besoin de l'assistance d'autres spécialistes, notamment pour effectuer les indispensables calibrations :
Cette étape [i.e. la détermination des indices saisonniers] indispensable franchie, intervient alors la calibration qui met en œuvre les différentes communautés scientifiques.
L'interdisciplinarité est confirmée par Ladurie lui-même qui s'exprimait ainsi (voir thierry-guinhut-litteratures) :
Aussi Emmanuel Le Roy Ladurie peut-il conclure : « Il n’est de bonne histoire du climat qu’interdisciplinaire et comparative ». La démarche historienne a fait bien des émules, comme Emmanuel Garnier, avec Les dérangements du temps. 500 ans de chaud et de froid en Europe[3]
Seul petit souci en ce qui concerne Emmanuel Garnier, c'est que celui-ci ressemble davantage à un loup solitaire qu'à une fourmi besogneuse travaillant en communauté, car voici ce que l'on pouvait lire en 2010 dans une critique de son livre Les dérangements du temps. 500 ans de chaud et de froid en Europe paru en 2009 :
On est tout d’abord surpris de voir l’auteur évoquer sa « solitude » de chercheur dans un domaine comme celui de l’histoire du climat. Voilà plusieurs décennies déjà qu’est menée, au sein du CNRS notamment, une réflexion sur la nécessité d’une recherche intégrée, sur l’obligation de s’inscrire dans l’interdisciplinarité, et que les approches réunissent sciences de l’homme et de la société, sciences de la terre et de la vie.
Si Emmanuel Garnier mentionne les travaux des fondateurs de l’histoire du climat, il ne fait, en revanche, nullement état des travaux plus récents du Programme interdisciplinaire de recherches en environnement ou du programme « Environnement, vie et société » du CNRS, pourtant jalonnés, entre 1987 et 2002, de nombreuses publications qui ont fait date. Il semble également ignorer les thèses réalisées dans le cadre de ces programmes, tout comme il ignore les publications des colloques, tels ceux qui se sont tenus à Antibes en 1995 et en 2008.
On regrettera le manque de réflexion sur la question des échelles d’observation, pourtant très importante dans le dialogue interdisciplinaire avec les « disciplines à protocoles » et « disciplines à mesure ».
Les critiques ne sont pas tendres envers lui en continuant ainsi :
On ne peut qu’être frappé par le caractère réducteur et indigent de cette fresque, par la méconnaissance de la bibliographie, des laboratoires traitant ces questions [...] On ne peut qu’être frappé par la méconnaissance des paléo-climatologues travaillant en lien avec les archéologues [...] Assurément, cette connaissance lui aurait évité de déclarer de manière péremptoire qu’« il est impossible de mesurer l’impact des changements climatiques sur les sociétés à partir des archives naturelles » (p. 33). L’archéologie des lacs jurassiens de Chalain et de Clairvaux au IIIe millénaire avant J.-C. et de l’habitat de Charavines autour de l’an Mil prouve le contraire.
Ainsi Emmanuel Garnier serait à classer dans la catégorie des « climatosceptiques » qui doutent des informations « naturelles » fournies par les proxies climatiques ! Il prétendrait également que
« la part de l’anthropique échappe » (p. 22)
Comme il s'agit d'une citation provenant de la page 22 de son livre on peut donc avoir confiance en la véracité de cette affirmation plutôt gênante venant de quelqu'un qui prétend reconstituer le climat passé, car comme le précisent dans la foulée les critiques :
ce qui est faux. Ce sont d’autres archives – les archives du sol – qu’il faut mettre à contribution. C’est une autre démarche, interdisciplinaire, qu’il faut adopter. L’auteur affirme que « l’homme est un paramètre incalculable » (p. 22), ce qui est tout aussi faux. Les travaux du programme Archaeomedes ont montré qu’il était possible de modéliser la part des sociétés. On ne comprend guère que l’auteur parle de « l’anachronisme » qui consiste à « reconstruire les climats du passé » (p. 24), ce qui est contradictoire avec ce qu’il rapporte des travaux sur les carottes glaciaires et leurs « archives », et ce qui montre son ignorance de la façon de procéder et une certaine confusion quant à la documentation.
Je vous laisse lire le reste de la critique, très bien argumentée, de ce livre d'Emmanuel Garnier qui précède donc l'ouvrage plus récent dont nous parle le site des climato-rigolos, à savoir « Sécheresses et canicules avant le global Warming – 1500-1950 », dont je n'ai pas réussi à retrouver la moindre trace, y compris aux éditions Hermann où il est censé avoir été publié !

Par contre on peut trouver des références à Emmanuel Garnier sur plusieurs sites de réinformation (comprendre le plus souvent « la fachosphère ») tels que ceux-ci, agrémentés de quelques extraits évocateurs :
Le blog de Francis Richard
Il y avait longtemps que nous n'avions pas entendu parler du réchauffement climatique. Je n'ai jamais désespéré que cet épouvantail climatique ne refasse surface tôt ou tard.
Je laisse l'internaute méditer sur cette forte parole d'Alexis de Tocqueville que citait le regretté Marcel Leroux [voir sur lui mon article Mort du climatologue dissident Marcel Leroux ] :" Les complications fatiguent l'esprit humain et il se repose volontiers avec une sorte d'orgueil dans l'idée d'une seule cause produisant à elle seule une infinité de grands effets.
Le dénommé Francis Richard ne se rend même pas compte que la citation d'Alexis de Tocqueville s'applique surtout à lui.

LE BLOG DE JLDURET
Voici quelques extraits d'une étude qu'[Emmanuel Garnier] consacra au "Sociétés méditerranéennes à l'épreuve du climat 1500-1850", extraits qui permettent de relativiser certains phénomènes météorologiques actuels.
JL Duret se permet de relativiser, comme Einstein, cependant il n'a de toute évidence pas les mêmes capacités cognitives.

belgotopia
En feuilletant d’anciennes revues, je suis tombé sur un article paru dans « Le Patriote Illustré » du 22 octobre 1939, et qui me semble représentatif de l’opinion qu’on pouvait avoir sur l’évolution du climat en fonction des connaissances de l’époque. J’en reprends ci-dessous de larges extraits.
Jo Moreau feuillette une revue de 1939 et en conclut que « le climat a toujours changé ».


On peut aussi trouver quelques traces dans des sites autrement plus sérieux :
Arrêt sur Images
LAURENT auditeur sud radio02 juillet 2019 à 16:09:10
Le résultat historique sur 500 ans nuance très fortement la certitude contemporaine d'une recrudescence inédite des épisodes de sécheresses en France et en Europe ! Force est de constater une inadéquation entre les reconstitutions historiques et les prédictions alarmistes produites par les différents modèles des Climatologues .
A lire dans son intégralité :
BASSESSES EXTRAORDINAIRES ET GRANDES CHALEURS.
500 ANS DE SÉCHERESSES ET DE CHALEURS EN FRANCE ET DANS LES PAYS LIMITROPHES.
Par Emmanuel GARNIER ( CEA - CNRS )
Continuer à dire en boucle que les épisodes climatiques et météorologiques actuels sont le fait des hommes est surréaliste !!
Le Climat et L'Humanité sont des systèmes chaotiques complexes que personne ne pourra orienter !
Laurent
Le prénommé Laurent (que nous connaissons bien ici, voir Les explications alambiquées de Benoit Rittaud) semble décontenancé par le chaos climatique, je dirai plutôt que c'est le chaos dans son cerveau qui est la principale cause de ses tourments.


Je vous parie tout ce que vous voulez qu'Emmanuel Garnier va devenir très bientôt la nouvelle coqueluche des climato-gigolos, en remplacement d'Emmanuel Le Roy Ladurie qui se trouve en fin de course et dont la date de péremption est sur le point d'arriver.

Comme je l'ai souvent dit ici ou là, les climato-gâteux s'accrochent à toutes les branches qu'ils peuvent trouver dans leur chute, Emmanuel Garnier est l'une d'elle et à mon avis il s'agit d'une branche basse, le sol n'est plus très loin et ça va faire mal.

Climato-barjo en situation difficile se demandant comment il a pu en arriver là.


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