mardi 21 septembre 2021

Qui a dit que nous pouvions le faire ?

 Il est de bon ton parmi certains « pro-climat » de refuser le catastrophisme et de faire preuve d'un optimisme en béton armé. Oui, disent-ils, nous pouvons éviter d'atteindre les « deux degrés de plus », il suffit d'une part de jouer au petit colibri qui fait sa part et d'autre part de changer drastiquement notre système économique fondé sur l'accumulation de capital afin de viser le « bien-être » de l'humanité entière, pauvres y compris bien sûr !

Permettez-moi de réitérer ici mes légers doutes sur la capacité de notre civilisation avancée d'arriver à ses fins, et je vais prendre deux exemples qui viennent de tomber sur les téléscripteurs.

Tout d'abord nous avons cette déclaration d'Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, dont nous avons la primeur avec Planet is on catastrophic path to 2.7 degrees of warming, UN report shows (Selon un rapport des Nations unies, la planète est sur la voie catastrophique d'un réchauffement de 2,7 degrés.) :

This is breaking the promise made six years ago to pursue the 1.5-degree Celsius goal of the Paris Agreement. Failure to meet this goal will be measured in the massive loss of lives and livelihoods.
C'est rompre la promesse faite il y a six ans de poursuivre l'objectif de 1,5 degré Celsius de l'Accord de Paris. L'incapacité à atteindre cet objectif se mesurera à l'aune des pertes massives de vies et de moyens de subsistance.
Cette déclaration venait à la suite de la publication, le 17 septembre dernier, du rapport de la CCNUCC intitulé National determined contributions under the Paris Agreement. Synthesis report by the secretariat (Contributions déterminées au niveau national dans le cadre de l'Accord de Paris. Rapport de synthèse du secrétariat) dans lequel on peut voir ce magnifique dessin qui vaut tous les trop longs discours :

Comparaison des émissions mondiales selon les scénarios évalués dans le rapport spécial du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat sur le réchauffement de la planète de 1,5 °C avec les émissions mondiales totales selon les contributions déterminées au niveau national.

Comme on peut le constater il y a du boulot et il faudrait vraiment se retrousser les manches.

Vraiment ?

J'ai comme un léger doute (merde voilà que je radote)

Dans Joe Manchin Will Craft U.S. Climate Plan (Joe Manchin va élaborer le plan climatique américain), un article paru  avant-hier dans le New York Times, on en apprend une bien bonne :

This Powerful Democrat Linked to Fossil Fuels Will Craft the U.S. Climate Plan
Ce puissant démocrate lié aux combustibles fossiles va élaborer le plan climatique américain.
Joe Manchin, le présumé démocrate qui met en péril toutes les décisions prises par l'autre Joe qui ne trouve rien de mieux, à part se foutre de notre gueule (mais c'est une autre histoire et puis nous l'avons bien cherché après tout), que de propulser un climato-charbonnier à un poste lui permettant de
write the climate portion of the budget bill in a way that would keep natural gas flowing to power plants, according to people familiar with his thinking.
rédiger la partie climatique du projet de loi sur le budget de manière à maintenir l'approvisionnement en gaz naturel des centrales électriques, selon des personnes au fait de ses réflexions.
Par ailleurs, et afin de nous rassurer pleinement, l'article du NYT nous informe que 
Mr. Manchin is also closely associated with the fossil fuel industry. His beloved West Virginia is second in coal and seventh in natural gas production among the 50 states. In the current election cycle, Mr. Manchin has received more campaign donations from the oil, coal and gas industries than any other senator, according to data compiled by OpenSecrets, a research organization that tracks political spending.
M. Manchin est également étroitement associé à l'industrie des combustibles fossiles. Sa chère Virginie-Occidentale est, parmi les 50 États, le deuxième producteur de charbon et le septième producteur de gaz naturel. Dans le cycle électoral actuel, M. Manchin a reçu plus de dons de campagne des industries du pétrole, du charbon et du gaz que tout autre sénateur, selon les données compilées par OpenSecrets, un organisme de recherche qui suit les dépenses politiques.
Permettre à quelqu'un qui doit non seulement sa fortune personnelle mais aussi son poste de sénateur aux énergies fossiles de « rédiger la partie climatique » d'un projet de loi, comment dire, c'est un peu comme si on donnait au PDG de Philip Morris le poste de secrétaire à la Santé et aux Services sociaux ou bien qu'on faisait en sorte que les industriels de l'armement définissent la politique étrangère du pays (euh, on me souffle à l'oreille que c'est déjà la cas, au temps pour moi)

Comme dirait l'autre :

On n'a pas le cul sorti des ronces.


Addendum qui vaut la peine d'être mentionné :

Les économies avancées tirent la reprise mondiale (source Le Monde)

Bref...


2 commentaires:

  1. J'aime bien ce post. Il me semble que la question en filigrane, une fois acceptée la synergie des dégradations en cours (dont le climat), est celle de ce que nous souhaitons préserver. L'individu, l'espèce, un mode d'organisation (civilisation), un mode de vie, tout cela à la fois ? La question sous-jacente peut alors être y a t il des incompatibilités entre la préservation de tel ou tel et la diminution des dégradations ? Je me demande si nous aurons le courage (individuellement et collectivement) de poser ouvertement la question. D'ici là, il est logique que "BAU rules".

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    1. L'espèce devrait survivre, pas éternellement mais pendant encore très longtemps ; notre civilisation, telle que nous la connaissons actuellement, je ne vois vraiment pas comment elle pourrait passer le cap du 22ème siècle sans gros dégâts, ne serait-ce que par la raréfaction des ressources énergétiques qui s'ajoutera au réchauffement de quelques 3°C, sans parler de la surpopulation, mais cette dernière a des chances de n'être qu'un faux problème, le nombre d'habitant pourrait très bien s'auto-réguler de façon « naturelle »...

      Quant à la perte de biodiversité je ne pense pas que ce soit le problème le plus crucial, même si ce serait bien qu'elle ne se produise pas ou du moins qu'elle ralentisse un peu ; qu'il y ait moins de rhinocéros ou de papillons c'est dommage mais ce n'est pas vraiment ça qui va nous mettre en grand danger d'extinction.

      Pour les question que nous aurions ou non le courage de poser il me semble que nous allons très vite toutes nous les poser, ce qui ne veut pas dire que nous aurons la capacité de leur donner les réponses adéquates ; le plus plausibles est que les « choses » vont arriver malgré notre non-volonté ou notre réticence, ou notre maladresse !

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