dimanche 10 mars 2024

Un Arctique libre de glaces en 2035, cela me rappelle quelque chose...

 Il y a presque 6 ans déjà, en juin 2018 je prévoyais un Arctique libre de glaces en 2035.

Dans Le pôle nord libre de glaces en septembre...2035 ! je montrais le graphique suivant adapté par mes soins avec l'aide de Paint :

Mon extrapolation jusqu'en 2035.


Je m'étais alors basé sur le graphique tiré du site Polar Science Center disponible à cette époque :

Fig.3 Monthly Sea Ice Volume from PIOMAS for April and Sep. (source psc.apl.uw.edu


Pour information voici le même graphique tel qu'on peut le voir aujourd'hui en mars 2024 :

Fig.3 Monthly Sea Ice Volume from PIOMAS for April and Sep. (source psc.apl.uw.edu)


Alors croyez-le ou non, mais quand je me livre au même exercice aujourd'hui j'obtiens ce résultat :

Ma nouvelle extrapolation en date du 10 mars 2024.


Je sais ce que vous pensez, que mon approche est similaire à celle d'un Didier Raoult tentant désespérément de prouver que l'hydroxychloroquine serait efficace dans le traitement d'une maladie apparue récemment, mais à la différence du druide des Calanques et de la Canebière réunies j'ai de solides études qui viennent appuyer mon doux délire.

D'abord, et je l'avais relaté en août 2020 dans L'Arctique libre de glaces en 2035 ?, un article scientifique intitulé Sea ice-free Arctic during the last interglacial supports fast future loss montrait ces prévisions :

Figure 4 Sensibilité climatique à l'équilibre et année de disparition de la glace de mer en septembre pour les modèles CMIP3, CMIP5 et CMIP6. La sensibilité climatique à l'équilibre est représentée en rouge (lignes), l'année de disparition de la glace de mer en bleu (cercles). 


Dans l'article les passages suivants font référence à l'année 2035 :

The predicted year of disappearance of September sea ice under high-emissions scenarios is 2086 for HadCM3 (CMIP3/5), 2048 for HadGEM2-ES (CMIP5), and 2035 for HadGEM3 (CMIP6) (Fig. 4).

L'année prévue pour la disparition de la glace de mer de septembre dans les scénarios à fortes émissions est 2086 pour HadCM3 (CMIP3/5), 2048 pour HadGEM2-ES (CMIP5) et 2035 pour HadGEM3 (CMIP6) (Fig. 4).

The ability of the HadGEM3 model to realistically simulate the very warm LIG Arctic climate provides independent support for predictions of ice-free conditions by summer 2035.

La capacité du modèle HadGEM3 à simuler de manière réaliste le climat très chaud de l'Arctique LIG apporte un soutien indépendant aux prévisions de conditions d'absence de glace d'ici l'été 2035.


Ensuite, plus récemment, en juin 2023 j'écrivais dans L'Arctique libre de glace dans les années 2030 ? :

une étude récente, publiée dans Nature Communications pas plus tard que le 6 juin dernier, c'est-à-dire hier si je ne m'abuse, sous le titre Observationally-constrained projections of an ice-free Arctic even under a low emission scenario, vient nous dire dans ses conclusions, je cite :

Results indicate that the first sea ice-free September will occur as early as the 2030s–2050s irrespective of emission scenarios. Extended occurrences of an ice-free Arctic in the early summer months are projected later in the century under higher emissions scenarios.

Les résultats indiquent que le premier mois de septembre sans glace de mer se produira dès les années 2030-2050, quels que soient les scénarios d'émissions. Des périodes prolongées d'absence de glace dans l'Arctique au début des mois d'été sont prévues plus tard dans le siècle dans le cadre de scénarios d'émissions plus élevés.


Enfin, encore plus récemment puisque cela date...du 5 mars 2024, une étude intitulée Projections of an ice-free Arctic Ocean ose nous dire ceci :

 Consistently ice-free September conditions (frequent occurrences of an ice-free Arctic) are anticipated by mid-century (by 2035–2067), with emission trajectories determining how often and for how long the Arctic could be ice free. 

Des conditions constamment libres de glace en septembre (occurrence fréquente d'un Arctique libre de glace) sont prévues pour le milieu du siècle (vers 2035-2067), avec des trajectoires d'émissions déterminant la fréquence et la durée pendant lesquelles l'Arctique pourrait être libre de glace.

Alors oui, je sais ce que vous allez me rétorquer, il s'agit d'une fourchette allant de 2035 à 2067, on peut donc considérer qu'il est peu probable que l'Arctique soit libre de glaces en septembre 2035, tout comme l'on peut estimer qu'il est également très peu probable que cela se produise en 2067 et encore moins après cette date.

Ce dont on peut par contre être quasiment sûr et certain c'est qu'au train où vont les choses un Artique libre de glaces verra le jour avant la fin de ce siècle.

On peut même être assurés qu'à la fin de ce siècle, donc en 2100, plusieurs mois de l'année verront un Arctique libre de glaces, la seule question restant à se poser étant « combien de mois ? ».

Tout cela aura des conséquences qu'il est impossible à prévoir dans les détails mais que l'on peut quand même essayer d'imaginer.

Je vais vous donner un seul exemple.

Dans Expliquez-nous... Le passage maritime du Nord-Est sur francetvinfo on nous montre la carte suivante :

Le passage du Nord-Est (en rouge) fait gagner plus de dix jours de trajet sur la route maritime du canal de Suez (en jaune). (FRANCETV INFO)


Comprenez bien qu'un Arctique « en grande partie libre de glaces » signifiera que quasiment toute l'année, soit douze mois sur douze, l'itinéraire montré ici en rouge sera disponible aux navires chinois pour acheminer vers l'Europe toute la quincaillerie dont ils se sont faits les spécialistes et que nous sommes dans l'impossibilité de fabriquer étant donné que nous avons détruit, pour longtemps, nos outils de production et qu'en plus nous n'avons plus la main d'oeuvre qualifiée en quantités suffisantes.

La conséquence de toute cela ? C'est simple, la quasi-faillite de l'état égyptien dont les redevances tirées de l'exploitation du canal de Suez représentent environ 20% du total des recettes économiques (voir Indicateurs et conjoncture - ÉGYPTE)

Je passe sur toutes les implications liées à l'exploitation de ressources diverses (minières, touristiques, halieutiques, etc.) dont tous les acteurs régionaux voudront profiter, en premier lieu la Russie, laquelle nous a habitués à l'utilisation de la force brute pour arriver à ses fins.

Mais le réchauffement climatique ne se limite pas à la perte de la banquise arctique qui sera finalement un léger détail dans le grand chambardement prévu.

Les ours polaires ont certainement quelques soucis à se faire, mais en 2100 qui se préoccupera encore de leur sort quand d'autres enjeux seront sur la table ?

L’ours polaire face au tragique sort de la banquise (source le crapaud)


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