C'est à peine croyable, mais Anthony Watts, le désinformateur en chef de la société Climatosceptic and co, publie une étude intéressante intitulée What psychological science can offer to reducing climate change (Ce que la science psychologique peut offrir pour réduire le changement climatique)
Non je rigole.
Ce serait trop beau, en fait Tony Watts jette cette étude en pâture à ses lecteurs comme on jette un os à ses chiens, en qualifiant les auteurs de l'étude en question de « département qui traite les autres de fous » (Department of calling other people crazy) tout en montrant une caricature de Stefan Lewandowski, qui au passage n'est pas co-auteur de ladite étude, assis sur le « trône » dans une camisole de force.
Mais il est vrai que les climatosceptiques n'aiment pas qu'on les traite de crétins, ce que ni Lewandowski ni les auteurs de l'étude ne font, mais ils pensent qu'on les traite de crétins quand on analyse leurs biais cognitifs à la lumière de tous les sophismes et contrevérités qu'ils sont capables de proférer.
Ainsi Watts assimile les trois auteurs de l'étude à Lewandowski, en les mettant tous dans le même panier, en oubliant d'y inclure Daniel Kahneman qui a obtenu en 2002 son Nobel d'économie pour ses travaux sur la théorie des perspectives qui montre que les individus sont très loin d'agir et de penser selon leurs intérêts, contrairement à ce que certains croient naïvement.
Watts se contente de reprendre un texte qui fait référence à l'étude, sans donner aucune indication sur la véritable source comme à son habitude, pour le cas où quelques lecteurs plus curieux que la moyenne auraient l'idée saugrenue d'aller voir exactement ce qui est écrit.
Voici le résumé ainsi que la conclusion :
Sauf que dans l'étude elle-même il n'est jamais question de « gouvernements » et encore moins de lavage de cerveau, sauf à considérer qu'éduquer des populations sur un risque avéré est un lavage de cerveau opéré par un gouvernement, et dans ce cas beaucoup de gouvernements pratiquent le lavage de cerveaux de leurs populations, par exemple les Japonais qui éduquent la population pour faire face au risque de tremblements de terre, tout comme les Californiens ou n'importe quelle autre administration qui sur la planète prend en charge de tels risques ; et on peut étendre ce lavage de cerveau à bien d'autres risques, comme les inondations, les événements extrêmes (orages, cyclones, sécheresses, canicules, etc.), les incendies de forêts, et pourquoi pas les risques terroristes, la liste est longue et j'en oublie des tonnes.
Nous voyons bien là, avec notamment le premier exemple que je cite, poindre le nez rouge de la théorie du complot : le gouvernement veut contrôler notre esprit et nous dire ce que nous devons croire !
Mais comme l'écrit Kahneman dans Thinking, Fast and Slow :
Et quand un climatosceptique comme ci-dessus est confronté à une problématique trop compliquée pour lui, il la transforme en « contrôle de l'esprit et lavage de cerveau », c'est tellement plus simple.
Kahneman conclut d'ailleurs l'introduction de son livre comme suit :
De Kahneman et des trois auteurs de l'étude brocardée par Anthony Watts.
Alors parlons un peu de cette étude qui, je dois l'avouer, me laisse un peu sur ma faim et ne m'a pas complètement convaincu.
Les auteurs identifient essentiellement deux causes qui freinent ou carrément empêchent que le problème du réchauffement climatique soit correctement traité :
En effet, les auteurs proposent trois « solutions » qui apparaissent assez clairement dans le résumé :
Ma conclusion toute personnelle est que tout cela est bien beau, mais comment fait-on ?
Que les gens soient en majorité guidés par leurs propres intérêts au détriment de l'intérêt collectif, que ce soit à court terme et à plus forte raison à long terme, cela me semble une évidence et cette étude n'apporte pas grand chose sur le sujet ; les solutions proposées peuvent sembler logiques et pouvoir éventuellement marcher sur un nombre limité d'individus, mais comment les généraliser à l'ensemble de la planète ? Les auteurs ne donnent pas les clefs permettant d'ouvrir les portes de manière concrète, ils restent dans le virtuel, presque dans le wishful thinking ou vœu pieu.
Ils expliquent d'ailleurs très bien toutes les difficultés auxquelles nous sommes confrontés pour faire face à la difficulté, notamment le caractère abstrait et incertain du changement climatique pour beaucoup de gens, ce qui ne facilite pas leur prise de conscience d'un problème n'apparaissant pas brusquement et brutalement comme peut le faire un tremblement de terre ; mais même dans ce dernier cas les populations susceptibles d'être touchées par un séisme peuvent faire preuve de déni et se dire qu'elles ne sont pas ou peu concernées, par exemple en Californie où le « Big One », s'il se produisait, pourrait faire des milliers de victimes, ce qui n'empêche apparemment pas grand monde de venir s'y installer (et je ne parle pas des incendies de forêts…)
C'est bien beau de « recommander que les décideurs politiques produisent des informations factuelles d'une manière concrète », quand on voit le paysage politique américain on peut douter de l'efficacité de la « recommandation » ! Et il n'y a pas qu'aux Etats-Unis que la volonté des politiques de vraiment traiter le problème soit sujette à caution, on ne peut pas dire qu'en France tous les moyens soient mis en branle pour arriver à une solution, et je ne vois en fait aucun pays ayant décidé de prendre le taureau par les cornes, nous sommes en pleine tragédie des biens communs et pas près d'en sortir…
Et que dire de la recommandation consistant à sensibiliser les « jeunes et vulnérables » afin de franchir la frontière du temps ? Il s'agit peut-être de la moins irréaliste, étant donné que de toute façon ce sont les jeunes qui sont déjà, dès à présent, les plus sensibilisés au réchauffement climatique ainsi qu'à tous les problèmes environnementaux que nous connaissons, puisqu'ils se doutent bien qu'ils en souffriront un jour alors que leurs ainés ne seront plus là pour payer les pots cassés après avoir bien profité de la « croissance » liée en très grande partie aux énergies fossiles ; de plus, ces ainés vont petit à petit disparaitre et seront donc de moins en moins influents, ils seront progressivement remplacés par une nouvelle génération davantage apte à prendre en charge ces problèmes environnementaux, quels qu'ils soient, le seul problème étant que ce sera peut-être trop tard…
Je trouve par ailleurs totalement irréaliste la proposition qui consiste à faire intervenir des « personnes non impliquées » (non involved people) pour discuter de problèmes d'aménagement urbain et d'infrastructure, je ne vois pas très bien comment cela peut marcher, mais peut-être qu'il me manque certaines informations ou connaissances en matière sociologique me permettant de comprendre le mécanisme.
La partie la plus irréaliste, à mon avis, est la troisième solution qui nous demande de franchir les frontières entre les peuples, les nations de la planète, afin d'atteindre un « consensus » global ; les auteurs admettent que la négociation internationale n'est peut-être pas la meilleure solution, alors ils proposent ce qu'ils appellent l'altruisme compétitif, selon une étude d'un certain Gilbert Roberts, mais il est difficile de voir comment quelque chose qui marche peut-être au niveau de sous-groupes bien individualisés pourrait fonctionner sur la Terre entière sur un sujet comme le réchauffement climatique.
Un passage de l'étude est assez peu convaincant :
La seule chose qui pourrait éventuellement infléchir la position de tels dirigeants, serait, comme dit pour la deuxième solution, que la grande majorité de la population, composée d'anciens jeunes ayant été sensibilisés très tôt, fasse pression sur eux par leurs votes ou leurs protestations.
Cela se produira probablement un jour ou l'autre, dans quelques décennies ou durant le siècle prochain, tellement la faculté de déni de réalité est ancrée dans nos esprits et difficile d'en être extirpée.
Nous verrons bien combien de temps la compétition économique entre les peuples arrivera à tenir face à la compétition altruiste qui est sensée la supplanter ; à mon avis tant que nous aurons du charbon, du pétrole et du gaz à notre portée il n'y a aucune chance que cela se produise.
Non je rigole.
Ce serait trop beau, en fait Tony Watts jette cette étude en pâture à ses lecteurs comme on jette un os à ses chiens, en qualifiant les auteurs de l'étude en question de « département qui traite les autres de fous » (Department of calling other people crazy) tout en montrant une caricature de Stefan Lewandowski, qui au passage n'est pas co-auteur de ladite étude, assis sur le « trône » dans une camisole de force.
Mais il est vrai que les climatosceptiques n'aiment pas qu'on les traite de crétins, ce que ni Lewandowski ni les auteurs de l'étude ne font, mais ils pensent qu'on les traite de crétins quand on analyse leurs biais cognitifs à la lumière de tous les sophismes et contrevérités qu'ils sont capables de proférer.
Ainsi Watts assimile les trois auteurs de l'étude à Lewandowski, en les mettant tous dans le même panier, en oubliant d'y inclure Daniel Kahneman qui a obtenu en 2002 son Nobel d'économie pour ses travaux sur la théorie des perspectives qui montre que les individus sont très loin d'agir et de penser selon leurs intérêts, contrairement à ce que certains croient naïvement.
Watts se contente de reprendre un texte qui fait référence à l'étude, sans donner aucune indication sur la véritable source comme à son habitude, pour le cas où quelques lecteurs plus curieux que la moyenne auraient l'idée saugrenue d'aller voir exactement ce qui est écrit.
Le texte de Watts peut être consulté ici (sciencedaily) ou ici (other-news.info) mais l'étude elle-même est visible ici : researchgate
Abstract: Can psychological science offer evidence-based solutions to climate change? Using insights and principles derived from the literature on social dilemmas and human cooperation, we discuss evidence in support of three solutions: crossing the borders of thought, time, and space. First, borders of thought could be crossed by using persuasion that is concrete and tailored to local circumstances and by highlighting information about people’s efforts as evidence against the myth of self-interest. Second, borders of time could be crossed by using kinship cues, which can help make the future less
distant, and relatively uninvolved advisors, who may help make the future salient. And third, borders of space could be crossed by showing group representatives how they might benefit from a frame of altruistic competition—focusing on the benefits of being seen as moral and global in orientation. Our overall conclusion is that psychological science can offer evidence-based solutions to climate change.
La science psychologique peut-elle offrir des solutions fondées sur des preuves au changement climatique ? En utilisant des idées et des principes tirés de la littérature sur les dilemmes sociaux et la coopération humaine, nous discutons des preuves à l'appui de trois solutions : franchir les frontières de la pensée, du temps et de l'espace. Premièrement, les frontières de la pensée pourraient être franchies en recourant à une persuasion concrète et adaptée aux circonstances locales et en mettant en évidence les informations sur les efforts des gens en tant que preuves contre le mythe de l'intérêt personnel. Deuxièmement, les frontières du temps pourraient être franchies en utilisant des indices de parenté, qui peuvent aider à rendre l'avenir moins lointain, et des conseillers relativement peu impliqués, qui peuvent aider à rendre le futur important. Et troisièmement, les frontières de l'espace pourraient être franchies en montrant aux représentants des groupes comment ils pourraient bénéficier d'un cadre de compétition altruiste - en mettant l'accent sur les avantages d'être perçus comme moraux et globaux dans leur orientation. Notre conclusion générale est que la science psychologique peut offrir des solutions fondées sur des preuves au changement climatique.
Concluding Remarks: Social dilemmas are very challenging at the global level, where collective interests are abstract and primarily visible in the future rather than the present. Uncertainty tends to trigger heuristic thinking, such as the myth of self-interest; people are naturally oriented to self-interest or local interest rather than abstract global interests; and leaders are prone to adopt a competitive mind-set, characterized by distrust and rivalry, resulting in poor collective outcomes. Facing challenges is often the real challenge. The future can become in many ways the present by high-lighting issues or cues relevant to genetic outcomes: offspring, in particular. Another route is to highlight the future: Some distance may help us appreciate the future a little bit more. Advisors—especially those with no strong involvement or vested interest—may be ideally suited to do so. It is plausible that advisors, or media-tors, may be in the best possible position to highlight reputational concerns in national leaders. Competitive altruism may well be one of the most powerful solutions to the complexities of intergroup conflict that our national leaders must face in negotiations about climate change.
Evidemment, et cela n'étonnera personne, je n'ai pas la même lecture de cette étude que les lecteurs de Watts qui en restent à leurs préjugés, comme par exemple, pêle-mêle :Les dilemmes sociaux sont très difficiles au niveau mondial, où les intérêts collectifs sont abstraits et principalement visibles dans le futur plutôt que dans le présent. L'incertitude a tendance à déclencher une réflexion heuristique, comme le mythe de l'intérêt personnel ; les gens sont naturellement orientés vers l'intérêt personnel ou l'intérêt local plutôt que vers des intérêts globaux abstraits ; et les dirigeants sont enclins à adopter un état d'esprit compétitif, caractérisé par la méfiance et la rivalité, aboutissant à des résultats collectifs médiocres. Faire face aux défis est souvent le véritable défi. L'avenir peut devenir à bien des égards le présent en mettant en lumière des questions ou des indices pertinents pour les résultats génétiques : la progéniture, en particulier. Une autre voie consiste à mettre en évidence l'avenir : une certaine distance peut nous aider à apprécier un peu plus l'avenir. Les conseillers, en particulier ceux qui ne sont pas très impliqués ou qui n'ont aucun intérêt personnel, peuvent être idéalement placés pour le faire. Il est plausible que les conseillers, ou médiateurs, soient dans la meilleure position possible pour mettre en évidence les préoccupations de réputation des dirigeants nationaux. L'altruisme compétitif pourrait bien être l'une des solutions les plus puissantes à la complexité des conflits intergroupes que nos dirigeants nationaux doivent affronter dans les négociations sur le changement climatique.
Mind control, brain washing (Contrôle de l'esprit, lavage du cerveau)Ou
> One way to convince people about the reality of climate change, they argue, is to have governments tailor information… Anyone who read further wasted their time. (« Selon eux, l'une des façons de convaincre les gens de la réalité du changement climatique est de faire en sorte que les gouvernements adaptent l'information » Ceux qui lisent davantage perdent leur temps.)
Sauf que dans l'étude elle-même il n'est jamais question de « gouvernements » et encore moins de lavage de cerveau, sauf à considérer qu'éduquer des populations sur un risque avéré est un lavage de cerveau opéré par un gouvernement, et dans ce cas beaucoup de gouvernements pratiquent le lavage de cerveaux de leurs populations, par exemple les Japonais qui éduquent la population pour faire face au risque de tremblements de terre, tout comme les Californiens ou n'importe quelle autre administration qui sur la planète prend en charge de tels risques ; et on peut étendre ce lavage de cerveau à bien d'autres risques, comme les inondations, les événements extrêmes (orages, cyclones, sécheresses, canicules, etc.), les incendies de forêts, et pourquoi pas les risques terroristes, la liste est longue et j'en oublie des tonnes.
Nous voyons bien là, avec notamment le premier exemple que je cite, poindre le nez rouge de la théorie du complot : le gouvernement veut contrôler notre esprit et nous dire ce que nous devons croire !
Ainsi cette équipe de trois chercheurs d'horizons différents (Paul A. M. Van Lange, Jeff Joireman, Manfred Milinski), l'un Néerlandais, l'autre Américain et le dernier Allemand, se seraient réunis pour comploter afin de laver le cerveau des lecteurs d'Anthony Watts !
[…] when faced with a difficult question, we often answer an easier one instead, usually without noticing the substitition. ([...] quand nous sommes confrontés à une question difficile, nous répondons souvent à une plus facile, généralement sans remarquer la substitution)Notez bien que Kahneman écrit « nous », ce qui signifie qu'il s'inclut et qu'il inclut chaque être humain sur la planète, nous sommes tous pareils et commettons tous les mêmes biais cognitifs, avec des niveaux d'intensité certes différents selon les individus, mais personne n'y échappe.
Et quand un climatosceptique comme ci-dessus est confronté à une problématique trop compliquée pour lui, il la transforme en « contrôle de l'esprit et lavage de cerveau », c'est tellement plus simple.
Kahneman conclut d'ailleurs l'introduction de son livre comme suit :
[…] a puzzling limitation of our mind: our excessive confidence in what we believe we know, and our apparent inability to acknowledge the full extent of our ignorance and the uncertainty of the world we live in.([...] une limitation déroutante de notre esprit : notre confiance excessive dans ce que nous croyons savoir, et notre incapacité apparente à reconnaître toute l'étendue de notre ignorance et l'incertitude du monde dans lequel nous vivons.)Cela s'applique à tout le monde, mais de toute évidence davantage à certains qui font tout leur possible pour démontrer aux yeux de tous la justesse des théories de Kahneman.
De Kahneman et des trois auteurs de l'étude brocardée par Anthony Watts.
Alors parlons un peu de cette étude qui, je dois l'avouer, me laisse un peu sur ma faim et ne m'a pas complètement convaincu.
Les auteurs identifient essentiellement deux causes qui freinent ou carrément empêchent que le problème du réchauffement climatique soit correctement traité :
- conflictualité sociale entre intérêts personnels et intérêt collectif (en citant Milinski et al., 2008)
- conflictualité temporelle entre intérêts à court terme et intérêts futurs (en citant Jacquet et al., 2013 (du moins je pense qu'il s'agit de cette étude...), ainsi que Van Lange et al., 2013)
En effet, les auteurs proposent trois « solutions » qui apparaissent assez clairement dans le résumé :
- franchir les frontières de la pensée en utilisant des méthodes de persuasion spécifiques, en fonction des circonstances locales, par exemple se focaliser sur la hausse du niveau des mers si l'on s'adresse à des populations vivant près des côtes ;
- franchir les frontières du temps en rendant le futur plus proche ;
- franchir les frontières spatiales en générant une compétition « altruiste » entre les peuples (et surtout leurs dirigeants)
Tableau synthétique des trois solutions proposées avec les buts à atteindre. |
Ma conclusion toute personnelle est que tout cela est bien beau, mais comment fait-on ?
Que les gens soient en majorité guidés par leurs propres intérêts au détriment de l'intérêt collectif, que ce soit à court terme et à plus forte raison à long terme, cela me semble une évidence et cette étude n'apporte pas grand chose sur le sujet ; les solutions proposées peuvent sembler logiques et pouvoir éventuellement marcher sur un nombre limité d'individus, mais comment les généraliser à l'ensemble de la planète ? Les auteurs ne donnent pas les clefs permettant d'ouvrir les portes de manière concrète, ils restent dans le virtuel, presque dans le wishful thinking ou vœu pieu.
Ils expliquent d'ailleurs très bien toutes les difficultés auxquelles nous sommes confrontés pour faire face à la difficulté, notamment le caractère abstrait et incertain du changement climatique pour beaucoup de gens, ce qui ne facilite pas leur prise de conscience d'un problème n'apparaissant pas brusquement et brutalement comme peut le faire un tremblement de terre ; mais même dans ce dernier cas les populations susceptibles d'être touchées par un séisme peuvent faire preuve de déni et se dire qu'elles ne sont pas ou peu concernées, par exemple en Californie où le « Big One », s'il se produisait, pourrait faire des milliers de victimes, ce qui n'empêche apparemment pas grand monde de venir s'y installer (et je ne parle pas des incendies de forêts…)
C'est bien beau de « recommander que les décideurs politiques produisent des informations factuelles d'une manière concrète », quand on voit le paysage politique américain on peut douter de l'efficacité de la « recommandation » ! Et il n'y a pas qu'aux Etats-Unis que la volonté des politiques de vraiment traiter le problème soit sujette à caution, on ne peut pas dire qu'en France tous les moyens soient mis en branle pour arriver à une solution, et je ne vois en fait aucun pays ayant décidé de prendre le taureau par les cornes, nous sommes en pleine tragédie des biens communs et pas près d'en sortir…
Et que dire de la recommandation consistant à sensibiliser les « jeunes et vulnérables » afin de franchir la frontière du temps ? Il s'agit peut-être de la moins irréaliste, étant donné que de toute façon ce sont les jeunes qui sont déjà, dès à présent, les plus sensibilisés au réchauffement climatique ainsi qu'à tous les problèmes environnementaux que nous connaissons, puisqu'ils se doutent bien qu'ils en souffriront un jour alors que leurs ainés ne seront plus là pour payer les pots cassés après avoir bien profité de la « croissance » liée en très grande partie aux énergies fossiles ; de plus, ces ainés vont petit à petit disparaitre et seront donc de moins en moins influents, ils seront progressivement remplacés par une nouvelle génération davantage apte à prendre en charge ces problèmes environnementaux, quels qu'ils soient, le seul problème étant que ce sera peut-être trop tard…
Je trouve par ailleurs totalement irréaliste la proposition qui consiste à faire intervenir des « personnes non impliquées » (non involved people) pour discuter de problèmes d'aménagement urbain et d'infrastructure, je ne vois pas très bien comment cela peut marcher, mais peut-être qu'il me manque certaines informations ou connaissances en matière sociologique me permettant de comprendre le mécanisme.
La partie la plus irréaliste, à mon avis, est la troisième solution qui nous demande de franchir les frontières entre les peuples, les nations de la planète, afin d'atteindre un « consensus » global ; les auteurs admettent que la négociation internationale n'est peut-être pas la meilleure solution, alors ils proposent ce qu'ils appellent l'altruisme compétitif, selon une étude d'un certain Gilbert Roberts, mais il est difficile de voir comment quelque chose qui marche peut-être au niveau de sous-groupes bien individualisés pourrait fonctionner sur la Terre entière sur un sujet comme le réchauffement climatique.
Un passage de l'étude est assez peu convaincant :
If national leaders tend to have a fair amount of pride (sometimes even narcissism) that they like to see reinforced by reputational gains, the challenge is to use the competitive mindset of representatives to benefit the collective in the future.
Il suffit de voir Trump, ou Poutine, ou Erdogan, ou n'importe quel potentat égocentrique et/ou narcissique comme Kim ou Maduro, pour s'apercevoir assez vite que ce n'est pas avec eux qu'il faudra vraiment compter sur une quelconque « compétition altruiste » afin de prendre des mesures concrètes pour limiter les émissions de gaz à effet de serre ; et même y compris parmi les dirigeants plus « démocratiques » il est difficile d'en trouver qui montreraient des velléités d'altruisme, au risque de déplaire à leurs électeurs par des mesures tendant par exemple à limiter la croissance économique.Si les dirigeants nationaux ont tendance à avoir une certaine fierté (parfois même de narcissisme) qu'ils aiment voir renforcée par des gains de réputation, le défi est d'utiliser la concurrence d'esprit des représentants au profit de la collectivité dans le futur.
La seule chose qui pourrait éventuellement infléchir la position de tels dirigeants, serait, comme dit pour la deuxième solution, que la grande majorité de la population, composée d'anciens jeunes ayant été sensibilisés très tôt, fasse pression sur eux par leurs votes ou leurs protestations.
Cela se produira probablement un jour ou l'autre, dans quelques décennies ou durant le siècle prochain, tellement la faculté de déni de réalité est ancrée dans nos esprits et difficile d'en être extirpée.
Nous verrons bien combien de temps la compétition économique entre les peuples arrivera à tenir face à la compétition altruiste qui est sensée la supplanter ; à mon avis tant que nous aurons du charbon, du pétrole et du gaz à notre portée il n'y a aucune chance que cela se produise.
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