mercredi 22 août 2018

En fait non, il nous en faut 65 !

Dans mon précédent billet je montrais qu'avec relativement peu de stations de surface nous pouvions avoir une vue suffisamment précise de l'évolution des températures du globe depuis le début des mesures « fiables » (1880 en principe)

L'excellent Rabett run nous donne quelques précisions avec Temperature correlation scale over time and distance en nous rappelant le papier d'Hansen et Lebedeff de 1987 où l'on peut voir ce graphique :

Fig. 3. Coefficients de corrélation entre les variations annuelles moyennes de la température pour des paires de stations sélectionnées aléatoirement avec au moins 50 années communes dans leurs enregistrements. Chaque point représente une paire de stations. Les zones de latitude sont les mêmes que celles des cases de la figure 2.

La figure 2 nous montre un quadrillage des 80 régions d'égale surface de la planète avec le nombre de stations incluses :

Fig. 2. Nombre total de stations dans chacune des 80 régions de superficie égale et date à laquelle la couverture continue a commencé pour chaque région. Un numéro d'identification de boîte est indiqué dans le coin inférieur droit de chaque boîte.

Et pour être complet, voici l'évolution du nombre de stations dans le temps avec la figure 1 :

Fig. 1. Distribution globale des stations météorologiques avec les relevés de température de l'air en surface pour les quatre dates indiquées. Un cercle de rayon de 1200 kilomètres est dessiné autour de chaque station.


De tout cela d'un premier coup d'œil on remarque :
  • en 1870 seules l'Europe et les Etats-Unis avaient une couverture dense ;
  • dès 1900 quasiment l'ensemble de la planète était couvert, seul l'Antarctique faisait défaut ;
  • plus on se rapproche du pôle Nord et plus la corrélation est bonne (proche de 1) entre la température annuelle moyenne et une sélection aléatoire de stations ayant au moins 50 années de mesures communes.
Eli cite ce passage de l'étude :
The distance over which strong correlations are maintained at high latitudes probably reflects the dominance of mixing by large-scale eddies. At low latitudes the most active atmospheric dynamical scales are smaller, but apparently there are also substantial coherent temperature variations on very large scales (for example, due to the quasi-biennial oscillation, Southern Oscillation, and El Niño phenomena), which account for the slight tendency toward positive correlations at large station séparations.
La distance sur laquelle les fortes corrélations sont maintenues aux hautes latitudes reflète probablement la prédominance du mélange par les tourbillons à grande échelle. Aux basses latitudes, les échelles dynamiques atmosphériques les plus actives sont plus petites, mais il existe apparemment également des variations de température cohérentes à très grandes échelles (par exemple, à cause de l'oscillation quasi-bisannuelle, de l'oscillation australe et des phénomènes El Niño), ce qui explique la légère tendance aux corrélations positives aux séparations des grandes stations.
Tout cela est un peu obscur (le langage scientifique est parfois poétique, parfois abscons…) mais on en déduit qu'aux hautes latitudes (donc près des pôles) il y a des mouvements atmosphériques à grande échelle qui homogénéisent les mesures de températures sur des distances plus importance qu'aux plus basses latitudes ; cependant, même aux basses latitudes il existe des phénomènes comme El Niño qui permettent eux-aussi de garder une cohérence à grande échelle.

Et Eli de citer un autre papier, en fait une thèse soutenue en 1994, dans laquelle on peut lire :
The autocorrelation length scale found in annual averaged observational surface temperature data is about 1500km (Hansen and Lebedeff, 1987; Kim and North, 1991). 1500km is the inherent length scale for long term averages in noise-forced energy balance models (North, 1982). It also happens to be the characteristic size for the synoptic scale features that are prominent on daily weather maps. This latter is probably due to the corresponding size of the Rossby radius of deformation (Hess, 1959). The climate (time averaged data) length scale is not solely determined by dynamical considerations but seems to be dependent on radiation damping as well.
L'échelle de longueur de l'autocorrélation trouvée dans les données annuelles moyennes sur la température de surface par observation est d'environ 1500 km (Hansen et Lebedeff, 1987; Kim et North, 1991). 1500 km est l’échelle de longueur inhérente aux moyennes à long terme dans les modèles de bilan énergétique forcé par le bruit (North, 1982). Il s’agit également de la taille caractéristique des particularités de l’échelle synoptique qui sont visibles sur les cartes météorologiques quotidiennes. Cela est probablement dû à la taille correspondante du rayon de déformation de Rossby (Hess, 1959). L'échelle de longueur du climat (données moyennées sur le temps) n'est pas uniquement déterminée par des considérations dynamiques, mais semble également dépendre de l'amortissement du rayonnement.
It is interesting to see if this is a property exclusively of the surface temperature. If one takes disks of 1500 km radius and covers the earth, about 65 are required. This implies there are about 65 statistically independent regions on the earth with respect to low frequency surface temperature fluctuations (Hardin and Upson, 1993). If the correlation lengths are significantly larger in one season than in the other, it may be possible to use fewer than 65 statistically independent regions to cover the earth during that season. At the same time, the correlation areas seem to be largest in the more variable seasons. This coincidence suggests that a compensation occurs making the sampling errors seasonally invariant. 
Il est intéressant de voir s'il s'agit d'une propriété exclusive de la température de surface. Si l'on prend des disques de 1500 km de rayon et que l'on couvre la terre, environ 65 sont nécessaires. Cela implique qu'il existe environ 65 régions statistiquement indépendantes sur la Terre en ce qui concerne les fluctuations de température de surface à basse fréquence (Hardin et Upson, 1993). Si les longueurs de corrélation sont significativement plus grandes dans une saison que dans l'autre, il peut être possible d'utiliser moins de 65 régions statistiquement indépendantes pour couvrir la terre pendant cette saison. Dans le même temps, les zones de corrélation semblent être les plus importantes au cours des saisons les plus variables. Cette coïncidence suggère qu'une compensation se produit, rendant les erreurs d'échantillonnage invariantes de manière saisonnière.

Et d'arriver à la conclusion suivante :
So the answer is 65 or so.
Donc, la réponse est environ 65.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire