lundi 10 avril 2023

Comment commettre avec la Chine les mêmes erreurs qu'avec la Russie en une leçon avec Macron

 Notre estimé président semble ne pas comprendre les véritables enjeux de la planète. Après avoir tenté naïvement de discuter avec Poutine et avoir demandé à la communauté internationale de ne pas humilier la Russie, le voici qui va se prosterner devant l'autre "grand" dictateur de ce monde pour signer quelques contrats et faire de grandes phrases vides de sens.

Je vous livre ci-après la traduction d'un article du Spectator intitulé Macron has made a fool of himself in China. Bonne lecture.


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Macron est allé se ridiculiser en Chine

Par Ian Williams le 7 avril 2023

Ian Williams est un ancien correspondant à l'étranger pour Channel 4 News et NBC, et l'auteur de The Fire of the Dragon : China's New Cold War (Birlinn).

(photo: Getty)

Au moins, à Pékin, aucune table de six mètres de long ne séparait Emmanuel Macron de Xi Jinping. Mais leur rencontre a été à peu près aussi stérile que la discussion socialement distante du président français avec le "meilleur ami" de Xi, Vladimir Poutine, à Moscou l'année dernière, peu avant que le dirigeant russe n'envoie ses chars en Ukraine.

La visite de Macron en Chine avait quelque chose de très rétro. Elle a donné lieu à une scène presque séculaire, lorsque les plénipotentiaires étrangers se rendaient dans l'Empire du Milieu en apportant des cadeaux et en cherchant à obtenir les faveurs de l'empereur. C'était aussi un retour à l'époque plus récente où il était encore possible de parler de réforme en Chine en gardant la tête haute.

La Chine de Xi est désormais un endroit sombre et répressif. Son agressivité internationale croissante, sa coercition économique et son soutien à Poutine ont provoqué la consternation d'une grande partie du monde occidental, les obligeant à réévaluer leurs relations avec Pékin. Pourtant, à en juger par les trois jours passés en Chine, Macron ne semble pas avoir pris la mesure de la situation.

Le président français a déclaré vouloir "relancer un partenariat stratégique et global avec la Chine" et a parlé de "responsabilité partagée pour la paix et la stabilité internationale". Il a rejeté une politique de découplage économique avec la Chine, négligeant le fait qu'il s'agit d'une politique de longue date de Pékin, et non d'un projet concocté à Washington. "Je ne crois pas et ne veux pas croire à ce scénario", a-t-il déclaré.

M. Macron était accompagné d'une cinquantaine de chefs d'entreprise, de cinéastes et de musiciens. Parmi les cadeaux qu'il a apportés à son homologue chinois figurent les clichés d'un photographe français sur la Chine du milieu du XXe siècle et un vase en porcelaine bleue de Sèvres décoré de poissons dorés.

La raison principale de cette visite était censée inciter Xi à faire pression sur la Russie pour qu'elle mette fin à la guerre en Ukraine. "Je sais que je peux compter sur vous pour ramener la Russie à la raison et amener tout le monde à la table des négociations", a-t-il déclaré au président chinois lors de ce qui a été présenté comme une conférence de presse conjointe (une présentation pas très exacte puisqu'aucune question n'a été autorisée).

Xi, qui n'a pas condamné l'agression de la Russie et qui est allé dans le sens des justifications de Poutine, a exprimé des platitudes familières. "La Chine est prête à lancer un appel conjoint avec la France à la communauté internationale pour qu'elle reste rationnelle et calme", c'est à peu près le mieux qu'il ait pu faire dans des remarques soigneusement scénarisées. M. Macron, qui a parfois improvisé, a parlé deux fois plus longtemps que son hôte, ce qui a été perçu comme une violation du protocole. Xi semblait impatient, poussant plusieurs soupirs profonds, et la fin de la conférence de presse n'a pas été assez rapide pour lui.

Cela dit, Xi aime être courtisé en tant que pacificateur potentiel, même si c'est totalement absurde. La priorité de Xi est Xi, et la guerre en Ukraine lui convient parfaitement en ce moment. Elle lie ses adversaires occidentaux, détournant leur attention de l'Indo-Pacifique, et lui procure d'importants avantages économiques en termes d'hydrocarbures bon marché en provenance de Russie. Elle consolide également le rôle de la Chine en tant que partenaire principal de Poutine. Xi finance effectivement l'agression de Poutine en augmentant massivement les échanges commerciaux, qui comprennent des produits à double usage (qui peuvent être utilisés à des fins civiles et militaires) tels que des puces et des drones grand public. S'il a évité de franchir les lignes rouges occidentales en fournissant ouvertement des armes et des munitions, il a tout de même été à l'encontre de celles-ci.

La soi-disant place de la paix de Pékin n'est pas une réalité. Il s'agit d'une collection de platitudes vides et contradictoires, et le cessez-le-feu qu'il préconise récompenserait l'agression russe. Xi et Poutine se ressemblent trop, partageant une vision du monde fondée sur la construction d'un nouvel ordre sûr pour les autocrates et la restauration des notions mythiques de la grandeur impériale, étayée par les griefs et le statut de victime. Xi n'a peut-être jamais été aussi proche d'exprimer ses véritables sentiments que lors de remarques sans fard à Moscou, alors qu'il faisait ses adieux à Poutine à l'issue de leur sommet du mois dernier. "Nous assistons à un changement qui ne s'est pas produit depuis 100 ans et nous conduisons ce changement ensemble", a-t-il déclaré.

L'objectif immédiat de M. Xi est de tenter d'éloigner l'Europe de l'Amérique, et il considère M. Macron comme un outil utile à cette fin. "La Chine considère toujours l'Europe comme un pôle indépendant dans un monde multipolaire et soutient ses efforts pour parvenir à l'autonomie stratégique", a-t-il déclaré lors de leur conférence de presse.

Il est plus difficile de savoir ce que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a fait de la prestation de M. Macron. Elle était également à Pékin, ayant accepté une invitation de dernière minute de Macron à le rejoindre. Elle a rencontré Xi avec le président français et sans lui, mais son accueil a été beaucoup plus froid. Elle a eu un itinéraire limité et n'a pas été invitée au banquet de Macron. Elle a adopté une ligne de plus en plus dure, exhortant récemment l'Europe à "se libérer du risque" de sa trop grande dépendance à l'égard de la Chine, ce pour quoi les médias d'État chinois l'ont attaquée en la qualifiant de "marionnette américaine".

Elle a déclaré que Pékin "allait avoir la grande responsabilité d'user de son influence dans une amitié qui s'est construite sur des décennies avec la Russie" et a mis en garde contre la fourniture d'armes. Et elle a ajouté que Xi avait réitéré sa volonté de parler au président ukrainien Zelensky "quand le moment sera venu". Malheureusement, le moment ne semble jamais venu. Ils ne se sont pas parlé depuis le début de la guerre, malgré le désir de Zelensky de le faire, et l'absurdité totale de Xi se posant en médiateur tout en évitant de parler à la victime du conflit semble échapper aux dirigeants européens crédules.

Bien entendu, la visite de Macron en Chine était également une opération visant à renforcer ses compétences en tant qu'homme d'État international à un moment où son pays est en proie à des difficultés. Un conseiller anonyme de l'Élysée a quelque peu dévoilé le jeu lors d'un briefing juste avant la visite, en se vantant : "On peut compter sur les doigts d'une main le nombre de dirigeants mondiaux qui pourraient avoir une discussion approfondie avec Xi." C'est en quelque sorte une prestation ridicule, mais aussi dangereuse, car se plier aux prétentions absurdes de Xi en tant que médiateur ne peut que renforcer la position du dirigeant chinois.

Parmi les accompagnateurs de M. Macron figurait le musicien Jean-Michel Jarre, qui se targue d'avoir été le premier Occidental à se produire en République populaire de Chine, lors d'un concert donné en 1981. Jarre vient d'achever un projet épique intitulé Oxymore, un jeu de mots sur Oxymoron, une figure de style où l'on associe des termes opposés ou contradictoires. On pourrait aussi qualifier d'une façon moins charitable la démarche de foutoir. Il ne pouvait y avoir de thème plus approprié pour les trois jours de gesticulation de Macron en Chine.


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Ce que cette visite à deux en Chine a en fait révélé c'est que le véritable chef d'Etat de stature internationale est...Ursula von der Leyen !


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