dimanche 21 janvier 2024

Idée fixe chez Skyfall

 Il parait que le dénommé Bernnard, qui apparemment est le détenteur des ciseaux de la censure sur Skyfall, serait chimiste ou quelque chose dans le même genre. A mon avis sa formation date des années 1950-60 et il n'a pas bougé d'un iota depuis, pensant que tous les progrès de la science depuis qu'il a lu des trucs dans quelques livres de l'époque ne sont que des bagatelles au mieux ou des escroqueries au pire.

Son idée fixe (d'où le titre de ce billet) du moment, qu'il rabâche après avoir écrit de sa plume un article intitulé, de manière très prétentieuse, À propos des oscillations océaniques. Quelques réflexions, alors qu'il n'est en rien spécialiste de la question, un domaine où seuls les océanographes ont leur mot à dire, son idée fixe disais-je est que le volcanisme sous-marin serait à l'origine du réchauffement des océans.

N'a-t-il pas commencé son laïus par ces deux phrases lunaires :

Je ne suis pas géologue ni océanographe ni météorologue, mais chimiste et physicien.

Donc, par curiosité, je me suis intéressé à ces fluctuations oscillantes des températures de surface des océans.

On dit souvent que la curiosité est un vilain défaut, ce qu'il ne faut évidemment pas prendre au pied de la lettre, mais dans le cas présent nous sommes en présence d'un bonhomme qui va aller bien au-delà de la simple curiosité en osant affirmer des choses qui dépassent de toute évidence ses compétences scientifiques. Ainsi le voici qui se lance maladroitement :

On pense logiquement que ce sont les températures de l’air qui font monter (ou descendre) la température de la surface des océans et comme on pense que la température de la troposphère (la partie de l’atmosphère ou nous vivons.) est déréglée par les activités humaines, le pas est vite fait et certains pointent du doigt les activités humaines ! Sauf que ces variations semblent périodiques et il faut pouvoir relier cela aux activités anthropiques qui elles ne sont pas périodiques.

Pourtant la science est maintenant bien établie et nulle part on ne verra un océanographe imputer à autre chose qu'au réchauffement de l'atmosphère la hausse des températures des océans. Les volcans sous-marins ont pourtant une influence sur le climat, tout comme leurs cousins les volcans terrestres, mais apparemment avec des effets opposés :

  • Les volcans terrestres peuvent envoyer dans l'atmosphère de grandes quantités d'aérosols qui vont faire barrage à la lumière solaire et ainsi faire baisser temporairement les températures (cas par exemple du Pinatubo en 1991) ;
  • Par contre les volcans sous-marins émettent du CO₂ qui peut se retrouver dans l'atmosphère et ainsi contribuer à son réchauffement.
Pour le deuxième cas nous avons de nombreuses études, dont Mid‐ocean ridge eruptions as a climate valve, où l'on peut lire concernant la température (recherche sur ce mot qui apparait...deux fois seulement) :
 The glacial dependence is consistent with observations that ice sheet volume lags CO2 and temperature variations in 100 kyr ice age cycles [Shackleton2000].

La dépendance glaciaire est cohérente avec les observations selon lesquelles le volume de la calotte glaciaire est en retard sur les variations de CO2 et de température dans les cycles glaciaires de 100 kyrs [Shackleton, 2000]. 

There are several ways in which seafloor volcanism can contribute to global climate change. The first is the direct emission of CO2 into the ocean that will eventually contribute to atmospheric levels through venting at upwelling sites. In addition to immediate release of greenhouse gases from seafloor eruptions, the subsequent increased high- and low-temperature hydrothermal venting may impact the CO2 output.

Le volcanisme des fonds marins peut contribuer au changement climatique mondial de plusieurs manières. La première est l'émission directe de CO2 dans l'océan qui contribuera finalement aux niveaux atmosphériques par le biais de l'évent dans les sites de remontée d'eau. Outre la libération immédiate de gaz à effet de serre par les éruptions des fonds marins, l'augmentation subséquente du dégazage hydrothermal à haute et basse température peut avoir un impact sur la production de CO2.

On trouve aussi Dynamics of deep-submarine volcanic eruptions, une étude de février 2022 donc très récente, dans laquelle figure ce graphique qui devrait interpeler un grand scientifique de la trempe de monsieur Bernnard :

(a) Densité du jet par rapport à l'eau ambiante (ligne rouge) et température du mélange eau-solide (ligne noire) calculées à partir du modèle de jet décrit dans le texte.

Comme on peut le constater avec le graphique (a) la température de l'eau chute drastiquement dans l'entourage des events hydrothermaux encore appelés fumeurs noirs ou blancs : de plus de 1000°C à la sortie de l'évent cette température n'est plus que de 400°C à 20 mètres de distance puis se stabilise un peu au-dessus de 0°C au-delà de 50 à 60 mètres. Dans ces conditions on voit mal comment les eaux de surface pourraient être impactées, mais Bernnard n'en démord pas puisqu'il persiste et signe, avec par exemple ce dernier commentaire :

118.  Bernnard | 20/01/2024 @ 18:57 

Un volcanologue raconte la découverte en Méditerranée d’une éruption plus violente que celle du Honga Tonga
https://www.lamontagne.fr/clermont-ferrand-63000/actualites/un-volcanologue-clermontois-raconte-la-decouverte-en-mediterranee-d-une-eruption-plus-violente-que-celle-du-honga-tonga_14436572/
On n’a pas fini de découvrir la puissance mise en jeu par l’activité geo énergétique. Et son implication sur le climat.
Je n’ai pas accès à la totalité de l’article.

Monsieur Bernnard n'a pas accès à la totalité de l'article mais il a surtout la flemme d'aller chercher ailleurs l'information qui est pourtant très facile à trouver.

Ainsi dans cet article (Volcan : cette découverte "exceptionnelle" d'une expédition codirigée par un chercheur de Clermont-Ferrand) qui date du 15 janvier dernier et qui est manifestement en rapport avec celui de La Montagne (Un volcanologue raconte la découverte en Méditerranée d'une éruption plus violente que celle du Honga Tonga) dans lequel le mot "température" ne se retrouve à aucun moment !

On peut même consulter l'étude scientifique parue le 15 janvier avec pour titre Giant offshore pumice deposit records a shallow submarine explosive eruption of ancestral Santorini ; j'ai là aussi cherché les occurrences du mot "temperature" et en ai trouvé le chiffre colossal de 6 ! Passons-les en revue (marqués en rouge afin de mieux les repérer) :

Orange colours in the jet denote higher temperatures.

The depositional temperature of the submarine tuff is hard to assess, but the lack of particle sintering textures or any observed gas escape pipes probably rules out very hot emplacement from gas-supported flows11 at our drill sites. 

La température de dépôt du tuf sous-marin est difficile à évaluer, mais l'absence de textures de frittage des particules ou de tuyaux d'échappement de gaz observés exclut probablement une mise en place très chaude par des écoulements alimentés par du gaz sur nos sites de forage.

Although the evidence favours relatively cold emplacement of the submarine tuff at our drill sites, the abundance of highly vesicular pumice suggests that the initial pyroclastic currents entered the water column at high temperature.

Bien que les preuves soient en faveur d'une mise en place relativement froide du tuf sous-marin sur nos sites de forage, l'abondance de la pierre ponce hautement vésiculaire suggère que les courants pyroclastiques initiaux ont pénétré dans la colonne d'eau à une température élevée.

Dry sample mass and volume were measured after drying the samples in a convection oven for 24 hours at a temperature of 105° ± 5 °C and then cooling them within a desiccator for 3 hours.

La masse et le volume des échantillons secs ont été mesurés après séchage des échantillons dans un four à convection pendant 24 heures à une température de 105° ± 5 °C, puis refroidissement dans un dessiccateur pendant 3 heures.

The washed microfossil residue retained on the sieve was dried on filter paper in low temperature at ~50 °C in a thermostatically controlled drying cabinet and subdivided with a micro-splitter into equal aliquots for examination.

Le résidu de microfossiles lavés et retenus sur le tamis a été séché sur du papier filtre à basse température (~50 °C) dans une armoire de séchage thermostatée et divisé en aliquotes égales à l'aide d'un micro-séparateur en vue de l'examen.

Référence n°48 : Mandeville, C. W., Carey, S., Sigurdsson, H. & King, J. Paleomagnetic evidence for high‐temperature emplacement of the 1883 subaqueous pyroclastic flows from Krakatau Volcano, Indonesia. J. Geophys. Res. Solid Earth 99, 9487–9504 (1994).


Bref, à aucun moment il n'est ne serait-ce que seulement suggéré que la température globale des océans, et encore moins leur température de surface, puisse être impactée par ces phénomènes volcanismes sous-marins.

On peut également lire (je donne quelques extraits) :


    Dans aucun de ces trois articles le mot "température" n'est cité ; comme dirait l'autre, c'est quand même un signe, un signe qui ne veut pas dire Zorro mais qui signifie que la température n'est vraiment pas ce qui est le plus important dans ce qui se passe dans les abysses.

    Mais allez expliquer cela à monsieur Bernnard. Qui veut s'y coller ?


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