dimanche 21 janvier 2018

Tim Ball, l'un des nombreux clowns climatosceptiques américains, se fait remonter les bretelles par plus compétent que lui !

Desmogblog nous apprend que Tim Ball (CV disponible ici) est un ancien professeur de géographie qui s'est transformé en « orateur prolifique » au service de la communauté climatosceptique ; il est affilié à différents think tanks ainsi qu'à diverses organisations conservatrices (i.e. de droite) ; il est également membre du Clexit qui affirme que « The world must abandon this suicidal Global Warming crusade. Man does not and cannot control the climate » (Le monde doit abandonner cette croisade suicidaire du réchauffement climatique. L'homme ne contrôle pas et ne peut pas contrôler le climat)

Inutile donc de préciser que nous avons affaire à du lourd avec Tim Ball, lequel a d'ailleurs son rond de serviette à la table d'Anthony Watts, sur WUWT, où il vient de commettre son dernier délit de désinformation à l'usage des gogos avec un article intitulé What do the Ice Core Bubbles Really Tell Us? (Qu'est-ce que les bulles de carottes de glace nous disent vraiment ?)

Je ne commenterai ni ne tenterai de résumer son speech, car je ne connais pas grand chose au sujet (comme Tim Ball au passage), je vais seulement me contenter de citer deux commentaires d'un lecteur assidu du site WUWT, climatosceptique lui-aussi, pour juger de la pertinence de ce que raconte notre géographe en carton.

Ferdinand Engelbeen est un ingénieur qui a un profil de climatosceptique lukewarmer, c'est-à-dire se situant tout au-dessus du panier de crabes appartenant à la grande communauté disparate du climatoscepticisme universel ; voici ce qu'il a à dire au sujet de ce que Tim Ball nous narre.

Ferdinand Engelbeen says:

Dear Dr. Ball,
While do appreciate your many years of work in the skeptic community, in this case you are completely wrong.
– The temperature proxy is derived from δD and δ18O from water in the ice, not from the enclosed air. Depending of the accumulation rate, even layers of 1 year resolution over the past 110,000 years can be recognised and measured, as is the case for the Greenland summit.
– One doesn’t need meters of ice nowadays, a few cm is sufficient with modern sublimation techniques, cryogenic separation and mass spectroscopy. For the isotopes in the ice mass that is in many cases enough for yearly resolution, for the enclosed gases, that depends of the accumulation rate: from less than a decade over the past 150 years (Law Dome) to 560 years for the past 800,000 years (Dome C).
– Ice cores are choosen at the top of domes, because that is where there is little to no sideward movement, little to no cracks, etc.
Further:
Then there is the constant flow of water across and through every portion of the glacier.
Sorry, we are NOT talking about glaciers which are largely melting in summer. Ice cores are taken at domes with average temperatures between -20ºC (coastal) and -40ºC (inland). Even at the Greenland summit, mid-summer surface melt only happens once in about 100 years. That influences the ice age – gas age differences for which is corrected. How much water do you think percolates at -40ºC in the Vostok or Dome C ice cores?
Last but not least: please let the late Dr. Jaworowski rest in peace, together with his completely outdated (1992!) ideas about ice cores. He was an expert about metals (ions) in ice cores as result of the Tsjernobyl disaster, but as far as I know, he never made one analyses of CO2 or other gases in ice cores, only wrote a lot of objections. These were completely, point by point, refuted by the work of Etheridge e.a. on the high resolution ice cores of Law Dome in 1996.
Dr. Jaworowski made several statements which were physically impossible, like CO2 escaping (preferentially?) via cracks in the ice to the outside world, while inside one found 180-280 ppmv and the outside air in the labs was at least 380 ppmv (or more in enclosed rooms with people in it).
See further my comment on his objections:
http://www.ferdinand-engelbeen.be/klimaat/jaworowski.html
About modern ice core measurements, see some interesting background:
http://courses.washington.edu/proxies/GHG.pdf
The original work of Etheridge from 1996:
onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1029/95JD03410/full (if available, at this moment their web site is in maintenance?)

Traduit en bon français cela donne :

Cher Dr. Ball,Tout en appréciant vos nombreuses années de travail dans la communauté sceptique, dans ce cas, vous avez complètement tort.- Le proxy de température est dérivé de δD et δ18O de l'eau dans la glace, pas de l'air y inclus. Selon le taux d'accumulation, même des couches de résolution d'un an au cours des 110 000 dernières années peuvent être reconnues et mesurées, comme c'est le cas pour le sommet du Groenland.- On n'a pas besoin de mètres de glace de nos jours, quelques centimètres suffisent avec les techniques de sublimation modernes, la séparation cryogénique et la spectroscopie de masse. Pour les isotopes dans la masse de glace qui est dans de nombreux cas suffisant pour la résolution annuelle, pour les gaz enfermés, cela dépend du taux d'accumulation : de moins d'une décennie au cours des 150 dernières années (Law Dome) à 560 années  pour les derniers 800000 ans (Dôme C).- Les noyaux de glace sont choisis au sommet des dômes, car c'est là qu'il y a peu ou pas de mouvement latéral, peu ou pas de fissures, etc. Par ailleurs : Ensuite, il y a le flux constant d'eau au milieu et à travers chaque partie du glacierDésolé, nous ne parlons PAS des glaciers qui fondent en grande partie en été. Les carottes de glace sont prises aux dômes avec des températures moyennes entre -20ºC (côtières) et -40ºC (intérieures). Même au sommet du Groenland, la fonte de la surface au milieu de l'été ne se produit qu'une fois en une centaine d'années. Cela influe sur l'âge de la glace - les différences d'âge de gaz pour lesquelles il y a  correction. Combien d'eau pensez-vous percoler à -40ºC dans les carottes de glace de Vostok ou de Dome C ? Dernier point, mais non des moindres : s'il vous plaît laissez le défunt Dr. Jaworowski reposer en paix, avec ses idées complètement obsolètes (1992 !) sur les carottes de glace. Il était un expert des métaux (ions) dans les carottes de glace à la suite de la catastrophe de Tchernobyl, mais autant que je sache, il n'a jamais fait une seule analyse du CO2 ou d'autres gaz dans les carottes de glace. Celles-ci étaient complètement, point par point, réfutées par le travail d'Etheridge e.a. sur les carottes de glace à haute résolution de Law Dome en 1996.Dr Jaworowski a fait plusieurs déclarations qui étaient physiquement impossibles, comme le CO2 s'échappant (préférentiellement ?) via des fissures dans la glace vers le monde extérieur, tandis qu'à l'intérieur on trouvait 180-280 ppmv et l'air extérieur dans les laboratoires était au moins à 380 ppmv (ou plus dans des pièces fermées avec des personnes dedans).

Un peu plus loin le même Ferdinand Engelbeen nous montre une magnifique crosse de hockey :


Une autre courbe en crosse de hockey, le taux de CO2 reconstitué à partir des carottes glaciaires !

On ne peut évidemment s'empêcher de penser à la « courbe de Mann » qui suit une trajectoire quasiment identique (une coïncidence pour les climatosceptiques qui ne s'en laissent pas compter si facilement)

Et pour finir :

Ferdinand Engelbeen says:

Arbeegee,
Over the lifetime of the earth, CO2 levels have been much higher than today. Despite that, we have had colder and warmer temperatures. Nowadays, most of that CO2 resides in thick chalk layers all over the world and we are at a quite low CO2 level, compared to millions of years ago.
What we see in the ice cores is that over the past few millions of years, CO2 follows temperatures with some lag (800 +/- 600 years), probably a matter of deep ocean – atmosphere circulation and changing temperatures, while the opposite (the influence of CO2 on temperature) is not measurable.
Since about 1850, the main start of the industrial revolution, CO2 levels in the atmosphere increased about in ratio with human emissions of CO2. It is as good as certain that human emissions caused that increase, which benefits near all plants on earth.
(If you are interested, here are the arguments:
http://www.ferdinand-engelbeen.be/klimaat/co2_origin.html )
Some sceptics here don’t accept that humans are the cause of the CO2 increase and all kinds of arguments are used, probably because if humans aren’t to blame, the whole AGW meme is gone, as that is one of the pilars of the theory.
Unfortunately, that humans are the cause of the increase is rock solid and the only point where the “warmistas” are right and the sceptics are wrong. Using arguments which don’t hold to any scrutiny is shooting in your own foot and weakens your arguments where the other side has little defence, like the (lack of) influence of CO2 on temperature…
The above writing from Dr. Ball is a clear example of using the wrong arguments…

Soit en français :

Au cours de la vie de la Terre, les niveaux de CO2 ont été beaucoup plus élevés qu'aujourd'hui. Malgré cela, nous avons eu des températures plus froides et plus chaudes. De nos jours, la plus grande partie de ce CO2 réside dans des couches épaisses de craie partout dans le monde et nous sommes à un niveau de CO2 relativement bas, comparé à des millions d'années auparavant.
Ce que nous voyons dans les carottes de glace est qu'au cours des derniers millions d'années, le CO2 suit des températures avec un certain décalage (800 +/- 600 ans), probablement une affaire de circulation océanique profonde et des températures changeantes, tandis que le contraire (l'influence du CO2 sur la température) n'est pas mesurable.
Depuis environ 1850, le principal début de la révolution industrielle, les niveaux de CO2 dans l'atmosphère ont augmenté environ en proportion des émissions humaines de CO2. Il est absolument certain que les émissions humaines ont causé cette augmentation, ce qui profite à toutes les plantes sur terre. [...] 

Certains sceptiques n'acceptent pas que les humains sont la cause de l'augmentation du CO2 et toutes sortes d'arguments sont utilisés, probablement parce que si les humains ne sont pas à blâmer, tout le mème RCA disparaît, car c'est l'un des piliers de la théorie.
Malheureusement, que les humains sont la cause de l'augmentation est solide comme un roc et représente le seul point où les « réchauffistes » ont raison et les sceptiques ont tort. Utiliser des arguments qui ne résistent pas à l'analyse, c'est se tirer soi-même  une balle dans le pied et affaiblir vos arguments là où l'autre partie a peu de défense, comme l'influence (ou l'absence d'influence) du CO2 sur la température ...
Le texte ci-dessus du Dr. Ball est un exemple clair d'utilisation des mauvais arguments ...


Evidemment il y a dans le commentaire d'Engelbeen à boire et à manger, notamment son scepticisme sur l'influence du CO2 dans l'augmentation des températures et sa supposition qu'il y aurait peu d'arguments côté scientifiques pour prouver cette influence, mais il reconnaît quand même que c'est bien l'Homme qui est responsable de l'augmentation de 40% du taux de CO2 depuis 1850 environ ; le plus important après tout n'est pas de savoir ce que pense Engelbeen du role du CO2 sur la température, il n'est pas climatologue et ses nombreuses apparitions sur le site WUWT montrent qu'on peut le classer parmi les personnes pouvant avoir des biais cognitifs préjudiciables sur ses raisonnements (il a travaillé pour AkzoNobel, un groupe chimique...) ; le plus important est sa critique de Tim Ball, à laquelle ce dernier n'a à l'heure actuelle toujours pas répondu (peut-être le décalage horaire entre le Canada et les Etats-Unis...), ainsi que sa reconnaissance que beaucoup de ses compagnons d'arme utilisent des arguments qui les desservent, mais ça on le savait depuis pas mal de temps déjà.

Au passage signalons que nous autres français sommes à la pointe de ces recherches sur les carottes de glace avec Claude Lorius et Jean Jouzel, l'un sur le terrain l'autre dans son labo, pour nous raconter l'histoire du CO2, et par là-même des températures, au cours des  millions d'années qui nous ont précédées.


Reconstitution de la température moyenne sur Terre pendant les 500 derniers millions d’années. Les données jusqu’à 800 000 ans viennent des carottes de glace. Source Wikipedia. (tiré du site lasciencepourtous)

Et pour la parfaite corrélation entre CO2 et températures, entre autres explications, voir l'excellent billet de blog warmgloblog duquel on peut tirer ce graphique :

Atmospheric CO2 concentration (orange line) and estimated global average temperature (navy blue line) from the present (right end of horizontal axis, not including information since industrialization) and as much as 1 million years ago (left end of horizontal axis). 
Source:  Slide 13 in Coursera course on Climate Literacy: Navigating Climate Change Conversations, https://class.coursera.org/climateliteracy-001/lecture/index; based on temperature proxy data in Zachos et al., 2001, Science Vol. 292, p. 686,  as transformed by Hansen and Sato, 2012 http://www.columbia.edu/~jeh1/mailings/2012/20120508_ClimateSensitivity.pdf; and CO2 measurements in Luthi et al., 2008, Nature Vol. 453|doi:10.1038/nature06949. 

Ce qui montre bien qu'on peut s'informer assez facilement sur le sujet sans avoir besoin de lire la prose indigeste et indigente servie par monsieur Ball sur WUWT.




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