vendredi 18 mars 2022

Benoit Rittaud et l'épilepsie

 Décidément Benoit Rittaud ne nous décevra jamais.

Nous savions déjà depuis longtemps à quel point il était nul au sujet du changement climatique qu'il n'a pas compris, dans ce cas ce n'est qu'un imbécile de plus, ou qu'il se plait à caricaturer afin de vendre ses bouquins, et dans ce cas ce n'est qu'un escroc de plus parmi tant d'autres.

Nous savions aussi que malgré ses présumées compétences en mathématiques il était un bien piètre épidémiologiste incapable de comprendre ce qu'est une exponentielle (voir Leçon d'exponentielle à l'attention de Benoit Rittaud), ce qui ne l'empêchait pas de donner son avis au début de l'épidémie en mars 2020.

Aujourd'hui il remet une pièce dans la machine à produire de la bouillie pour neuneus avec un article intitulé présomptueusement Voyez ce qu’ils font de la science ; chaque fois que Rittaud écrit le mot science il faut s'attendre au pire, et à chaque fois le pire est encore pire que précédemment.

Dans cet article du 16 mars il tente de se surpasser en écrivant :

Nouveau cas d’école de la gangrène idéologique qui imprègne la science : l’institut de neurologie de l’University College de Londres publie une offre d’emploi pour recruter un chercheur sur un programme de recherche qui porte, tenez-vous bien, sur « changement climatique et épilepsie ». Non, nous ne sommes pas le premier avril.

Avec Benoit Rittaud nous avons la sensation d'être à chaque fois un 1er avril tellement ce qu'il nous raconte est décalé par rapport à la réalité. Son blog semble faire de la concurrence au Gorafi, mais non il est vraiment sérieux et ses adorateurs qui commentent régulièrement afin de le conforter dans ses errements tombent tous (sauf un) dans le grand trou qu'il s'échine à creuser de plus en plus profondément ; exemples :

Il suffisait d’y penser. Quant au résultat des recherches à venir il établira formellement que: « Oui, il y a bien un rapport entre épilepsie et changement climatique, au moins dans certains cas ». Et puisque c’est la science qui le dit…..Pauvre science.

Les conclusions précèdent la recherche comme dit dans l’intitulé du poste [blablabla]

Le biais est dans le fruit dès le départ pour parodier « le vers est dans le fruit ».
Ce genre de recherche est inexploitable. Du gaspillage d’argent public.

Bonjour. J’envisage une thématique « cors aux pieds et changement climatique ». Vers qui m’orienteriez-vous ?

Etc.

Aucun n'a de toute évidence essayé de creuser le sujet, sauf un qui est un peu plus lucide que le reste de la bande :

Mr Rittaud, votre post, qui dénigre un projet scientifique sous prétexte que le sujet de recherche proposé ne vous convient pas m’atterre au plus haut point et ce d’autant plus qu’il est écrit par un scientifique. AVDIATUR ET ALTERA PARS est un principe de droit romain qui devrait guider la démarche scientifique me semble-t-il et que vous semblez avoir oublié.

Vous n’avez aucune compétence dans le domaine médical, pas plus que moi d’ailleurs, pour juger du bien fondé des recherches proposées. Seuls les paires ( pères ) sont juges, n’est-ce pas ? [...]

Le réchauffement climatique, avéré ou non, ne mérite-t-il pas un débat étayé par des travaux académiques et non une bordée d’anathèmes. Comme les autres sujets pas plus, pas moins.

Le seul passage répréhensible de ce commentaire est « Le réchauffement climatique, avéré ou non », le dénommé Cunctator91 devrait pourtant savoir que le « ou non » est de trop et qu'il est facile de le vérifier.

Mais le plus beau dans le billet de Rittaud c'est quand il écrit :

La recherche scientifique est une fleur fragile, éternellement attaquée par ceux qui l’accusent d’être « déconnectée du réel ». Combien de fois, après avoir répondu à la question de mon sujet de recherche, ai-je dû faire face à l’insidieux « et alors, ça a des applications ? » Un chercheur normalement compétent sait répondre.
J'ai dit plus haut que quand Rittaud évoquait la science il fallait s'attendre au pire, j'ajouterai que quand il parle de « réel » il faut immédiatement rejoindre l'abri anti-atomique le plus proche, car ça va très vite péter et faire mal !

Ainsi Rittaud nous dit dans la foulée :
on ne peut pas défendre une recherche menée pour des raisons aussi évidemment militantes. Quel sérieux le grand public peut-il accorder à la recherche scientifique lorsqu’elle se travestit de cette manière ? Comment le quidam normalement cultivé ne se dira-t-il pas qu’il s’agit là d’un scandaleux gaspillage d’argent et de moyens ?
Des raisons militantes ?

La bonne blague !

De toute évidence il n'est pas au courant (en tout cas il n'en dit pas un mot) qu'il existe des études scientifiques depuis plusieurs années pour rechercher un lien entre réchauffement climatique et épilepsie ; il existe même au Royaume Uni une Epilepsy Society qui a organisé en novembre 2021 une conférence virtuelle :

On 25 November 2021, EpiCC – Epilepsy Climate Change – held its first ever virtual conference ‘Epilepsy in change’ to address the links between climate change and epilepsy and how we might all take action.

Le 25 novembre 2021, EpiCC - Epilepsy Climate Change - a organisé sa toute première conférence virtuelle intitulée "Epilepsy in change" (L'épilepsie dans le changement) afin d'examiner les liens entre le changement climatique et l'épilepsie et la manière dont nous pouvons tous agir.
De plus cette Epilepsy Society a créé un site dédié à cette problématique, l'EPICC, acronyme d'Epilepsy Climate Change.  

Mais il est vrai que si l'on nie, comme le fait Benoit Rittaud, qu'il y ait le moindre réchauffement significatif de la planète, et que par-dessus le marché on croit qu'on pourrait retourner bientôt vers un âge de glace, alors on ne voit pas où pourrait bien se nicher le problème avec l'épilepsie, n'est-ce pas ?

Or il y a bien un problème avec la hausse des températures et cette affection neurologique qui toucherait plus de 50 millions de personnes dans le monde (source OMS)

Ainsi dans Climate change and epilepsy: Insights from clinical and basic science studies publié en février 2021 on peut lire dans le résumé :
A number of climatic variables are associated with increased seizure frequency in people with epilepsy.
Un certain nombre de variables climatiques sont associées à une augmentation de la fréquence des crises chez les personnes épileptiques.
Mais il est bien précisé ceci :
Links between climate change and epilepsy are likely to be multifactorial, complex, and often indirect, which makes predictions difficult.
Les liens entre le changement climatique et l'épilepsie sont probablement multifactoriels, complexes et souvent indirects, ce qui rend les prédictions difficiles.
Les chercheurs ont donc besoin d'y voir plus clair :
We need more data on possible climate-driven altered risks for seizures, epilepsy, and epileptogenesis, to identify underlying mechanisms at systems, cellular, and molecular levels for better understanding of the impact of climate change on epilepsy. Further focussed data would help us to develop evidence for mitigation methods to do more to protect people with epilepsy from the effects of climate change.
Nous avons besoin de davantage de données sur les risques de modification des crises, de l'épilepsie et de l'épileptogenèse liés au climat, afin d'identifier les mécanismes sous-jacents aux niveaux systémique, cellulaire et moléculaire pour mieux comprendre l'impact du changement climatique sur l'épilepsie. Des données plus ciblées nous aideraient à développer des preuves pour des méthodes d'atténuation afin de faire plus pour protéger les personnes épileptiques des effets du changement climatique.
Mais on ne s'est pas rendu compte seulement en 2021 qu'il y avait un lien possible et probable entre réchauffement climatique et épilepsie, ainsi le 11 septembre 2019 était publiée l'étude Climate change and epilepsy: Time to take action qui nous dit dans son résumé :
We briefly review the history of climate change science and the subsequent response of the global scientific community. We consider how climate change effects might in general affect health and disease. We consider some of the underlying complex interactions that, for example, favor the spread of vector-borne diseases and how climate models operate and may help plan for global and local changes. We then speculate specifically on how these generic ideas may apply specifically to epilepsy.
Nous passons brièvement en revue l'histoire de la science du changement climatique et la réponse ultérieure de la communauté scientifique mondiale. Nous examinons comment les effets du changement climatique pourraient en général affecter la santé et les maladies. Nous examinons certaines des interactions complexes sous-jacentes qui, par exemple, favorisent la propagation des maladies à transmission vectorielle et comment les modèles climatiques fonctionnent et peuvent aider à planifier les changements mondiaux et locaux. Nous spéculons ensuite sur la manière dont ces idées génériques peuvent s'appliquer spécifiquement à l'épilepsie.
Par conséquent nous voyons que l'épilepsie n'est qu'une toute petite partie des nombreux problèmes de santé que le réchauffement climatique va entrainer dans le futur ; cet article se propose donc uniquement de faire un focus sur cette maladie en particulier, comme d'autres études pourraient éventuellement se concentrer sur les accidents cardio-vasculaires (voir Le réchauffement climatique et la pollution : un désastre au plan des maladies cardiovasculaires) ou les cancers (voir Réchauffement climatique : vers une hausse des cancers de la peau ?), pour ne citer que ces exemples.

L'étude mentionnée au-dessus est reprise dans cet article Epilepsy – Global Warming: Effects and Prevention :

Epilepsy and Global Warming

Sisodiya et al in 2019 shed light on the worrying links between global warming and neurological conditions, specifically focusing on epilepsy as an example. Dravet Syndrome is a type of epilepsy and occurs due to mutations which build up in SCN1A, a sodium channel encoding gene [1]. The sodium channel protein which is then constructed from this mutated gene is greatly affected by temperature. As Sisodiya et al described, when heatwaves occur in the summer carers of patients with Dravet Syndrome report that the number and length of epileptic seizures greatly increases. Not only is this alarming for people with Dravet Syndrome, but as global temperatures continue to rise neurologists are undoubtedly going to see many further links between other forms of epilepsy and temperature.

En 2019, Sisodiya et al ont mis en lumière les liens inquiétants entre le réchauffement climatique et les maladies neurologiques, en se concentrant spécifiquement sur l'épilepsie comme exemple. Le syndrome de Dravet est un type d'épilepsie et se produit en raison de mutations qui s'accumulent dans SCN1A, un gène codant pour un canal sodique [1]. La protéine du canal sodique qui est ensuite construite à partir de ce gène muté est fortement affectée par la température. Comme l'ont décrit Sisodiya et al, lorsque des vagues de chaleur surviennent en été, les soignants des patients atteints du syndrome de Dravet signalent que le nombre et la durée des crises d'épilepsie augmentent considérablement. Cette situation est non seulement alarmante pour les personnes atteintes du syndrome de Dravet, mais les neurologues vont sans doute constater que d'autres liens entre d'autres formes d'épilepsie et la température continueront d'être établis à mesure que les températures mondiales continueront d'augmenter.

Je reprends ce que j'ai surligné en rouge :

lorsque des vagues de chaleur surviennent en été, les soignants des patients atteints du syndrome de Dravet signalent que le nombre et la durée des crises d'épilepsie augmentent considérablement.

Il s'agit donc de constatations, pas de prédictions : quand il y a des canicules il y a davantage de crises d'épilepsie, c'est factuel, cela n'a rien d'imaginaire, de supposé et encore moins de fantaisiste.

Or on sait qu'avec le réchauffement climatique les canicules, ou épisodes de fortes chaleurs, vont se multiplier et devenir plus violentes ; là aussi c'est factuel puisqu'on le constate déjà avec seulement un petit degré (à la louche) de plus par rapport aux années 1970s ; et l'étude Sisodiva 2019 nous montre ces graphiques suffisamment éclairants :

Schéma montrant l'effet sur les températures extrêmes lorsque (A) la température moyenne augmente, (B) la variance augmente, et (C) lorsque la moyenne et la variance augmentent toutes deux pour une distribution normale de la température (source Climate change and epilepsy: Time to take action - Sisodiya - 2019 - Epilepsia Open - Wiley Online Library)

Enfin, il suffit de consulter Google Scholar en recherchant les mots « Epilepsy and Global Warming  » et l'on obtient...9 560 résultats !


Mais comme le dit si bien Benoit Rittaud :

Comme dit l’expression, ne nous arrêtons pas de rire, sinon nous nous mettrons à pleurer. Au fond, il vaut peut-être mieux faire semblant de croire que nous sommes réellement le premier avril, après tout.


Sacré Rittaud, toujours le mot pour rire à l'insu de sa pleine incompétence.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire