samedi 5 mars 2022

Ukraine, le début de la fin

 Dans Signes, le 19 février dernier, j'avais décelé des raisons qui pouvaient faire furieusement penser que la Russie allait envahir l'Ukraine, je les rappelle ci-après :

  1. Les troupes russes encerclent le territoire ukrainien avec plus de 130 000 soldats, soit environ 15% des effectifs totaux qui s'élèveraient à 900 000 hommes et femmes (dont 72% sont professionnalisés) ;
  2. Les Américains et les Britanniques (mais pas les Français) ont demandé à leurs ressortissants de quitter le territoire ukrainien ;
  3. Les séparatistes évacueraient leur population civile vers...la Russie !

Mais je me suis aussi montré extrêmement timoré et n'ai pas voulu me lancer dans des affirmations péremptoires que je pensais alors « dangereuses » pour ma crédibilité, ainsi j'écrivais :

Tout se passe donc comme si tout ce petit monde se préparait à « quelque chose ».

Immédiatement suivi d'un gros bémol :

Est-ce de la poudre aux yeux américaine, du gonflement de poitrine poutinienne, de la lâcheté occidentale (les Européens semblent curieusement atones, se contentant de « discuter »...) ?

Je n'ai aucune idée si une guerre se prépare ou va avoir lieu, ce que je constate c'est que ceux qui nous promettaient la fin de l'Histoire après la chute de l'URSS se sont gravement plantés.

En fait, par « je n'ai aucune idée » j'ai un peu menti, j'avais bien évidemment dans la tête ce qui est ensuite arrivé puisque je débutais mon billet par

 La Russie va-t-elle envahir l'Ukraine ?

Poser la question c'est, comme on dit toujours, un peu y répondre de manière détournée.

Mais vous savez également ce qu'on dit sur l'avenir, il ne faut jamais l'insulter, alors j'ai préféré rester gentil avec lui et ne pas trop le taquiner, pas comme un certain Jean Bachèlerie qui, dans Ne pas insulter l’avenir :refuser la nouvelle guerre froide, avait tout compris en écrivant le 18 juin 2021 :

Comment des chefs d'états peuvent-ils envisager une nouvelle guerre froide? Au Nom de quelles valeurs? Comment des intellectuels et des journalistes peuvent-ils relayer cette vision caricaturale du monde sans esprit critique?

Une « nouvelle guerre froide », sans blague !

Et il insistait le bougre :

Sortir de la rhétorique russophobe, de l’idéologie dominante (anglosaxonne : néolibérale) confondant les relations d'état à état, les relations entre chefs d'état et de gouvernement et les droits fondamentaux, pour comprendre comment entretenir des relations normales avec un grand pays, le plus grand pays du monde, un état qui compte et un partenaire historique de notre pays dans l’intérêt bien compris de notre pays et des gouvernements Européens qui le souhaitent.

Ça c'est du grand art, de la vision à très long terme, avec la « rhétorique russophobe » associée à l'« idéologie dominante anglosaxonne », voyez comme les choses sont simples n'est-ce pas, et plus loin il surencherissait avec ceci :

La Russie ne se limite pas à Poutine

On croit rêver !

Qui est en train d'envahir l'Ukraine actuellement, c'est la Russie ou Poutine ? Peut-être les deux non ?

Oui car comment distinguer Poutine de la Russie puisqu'il s'agit d'un autocrate au pouvoir depuis 22 ans qui a ficelé la constitution de manière à lui permettre de rester encore au pouvoir au moins jusqu'en 2036 ? Si je compte bien cela ferait au total 36 (ou 37) ans en continu aux manettes du pays, l'intermède Medvedev (2008-2012) ne pouvant tromper personne sur la réalité de celui qui tirait alors les ficelles.

Mais en 2036 Poutine aura (aurait ?) 84 ans, difficile de dire dans quel état il sera (serait ?), mais il est assez probable que s'il est (était ?) encore en bonne santé il n'hésiterait pas à se maintenir pour quelques années supplémentaires, tellement il est difficile de l'imaginer prenant une retraite paisible dans sa datcha des faubourgs de Moscou (ou très loin en Sibérie dans un endroit top secret)

Pour l'instant, comme il est au milieu du gué, on ne voit vraiment pas pourquoi il s'arrêterait en si bon chemin, et cette fois je vais prendre quelques risques en annonçant qu'il va faire en sorte de prendre le contrôle total de l'Ukraine, quoi qu'il lui en coûte selon une formule utilisée par un gros naïf qui a cru qu'il pouvait « discuter » avec lui.

Prendre le contrôle total de l'Ukraine cela signifie, au passage, se débarrasser du président Zelensky afin de le remplacer par un pion du même style que le Biélorusse (ou Bélarus) Loukachenko.

Cela signifie également écraser dans le sang toute forme de rébellion.

Donc il me parait assez clair dès maintenant que les Russes vont mettre le paquet et tapisser de bombes tous les endroits qui leur résisteront. Ils ont déjà commencé à le faire de manière très progressive, mais cela va s'intensifier et des villes comme Kiev/Kyiv pourraient (je préfère garder le conditionnel...) ressembler à d'autres sympathiques localités comme Grozny en Tchéchénie ou Alep en Syrie. Les Russes se sont en quelque sorte fait la main, ils savent dorénavant comment procéder pour mater ceux qui prétendent pouvoir s'opposer à eux.

Syrie : des raids russes sur Alep plus violents que jamais (source Le Point)


Un blindé de l'armée russe dans les ruines d'Alep, le 21 décembre 2016. (source Wikipédia)


De Grozny à Alep: la stratégie de l'anéantissement (source franceculture)


Avoir 20 ans à Grozny (source France Inter)


Ukraine : Kherson tombée entre les mains des Russes, selon Moscou (source actuvrai)

Difficile de ne pas voir l'enchainement logique des choses.

La question qui doit alors se poser est simplement celle-ci : après l'Ukraine Poutine s'arrêtera-t-il ou bien décidera-t-il de continuer un peu plus loin ?

Là je pose mon joker, mon cerveau a déjà trop à faire à digérer ce qui est en train de se passer.


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