dimanche 10 septembre 2023

Patrick Brown le nouveau tartuffe au secours des climato-irréalistes

 C'est la rentrée et le site de Benoit Rittaud reprend du service après un été planplan occupé essentiellement par un supplétif qui a tenté, en quatre leçons tellement ils sont durs de la feuille, de convaincre les quelques lecteurs assidus que le changement climatique serait un canular monté par les escrologistes. Avec Un scientifique avoue promouvoir l’alarmisme climatique pour être publié Rittaud ne fait rien d'autre que régurgiter ce qu'il a dû lire sur quelques sites penchant plus ou moins lourdement vers l'extrême-droite (il publie d'ailleurs l'article également sur Valeurs actuelles...) tels que telegraph.co.ukFox NewsThe Daily Callergbnews.comDaily Mail Onlinethetimes.co.ukThe SunClimate Depotdreuz.info, à moins que ce ne soit tout simplement chez Watts Up With That?...

Un lecteur (un certain rustica) a bien essayé de pointer l'arnaque de manière diplomatique mais argumentée, et n'a reçu pour toute réponse de notre mathématimancien 

Cette objection du reviewer n’a rien à voir avec le problème

Alors que justement l'objection en question est au cœur de l'« affaire Patrick Brown » !

Bref Rittaud soit fait l'imbécile, soit il nous montre qu'il en est vraiment un.

Afin de vous désintoxiquer, pour le cas où vous auriez jeté un oeil imprudent sur le billet inepte de Rittaud, je vous propose un article autrement plus sérieux, accompagné de quelques autres sources du même acabit. Attention, si vous êtes habitué à la prose de Rittaud vous allez probablement devoir vous munir d'un masque à oxygène car vous allez monter en altitude à la vitesse grand V. Pour la version originale c'est ici : Climate Scientists Don't Have to Exaggerate to Get Published (Les climatologues n'ont pas besoin d'exagérer pour être publiés) et c'est sur Bloomberg.

Bonne lecture quand même.


*****


Non, les climatologues ne sont pas forcés d'exagérer

L'affirmation d'un chercheur selon laquelle une revue de premier plan fait du sensationnalisme sur les résultats concernant le réchauffement climatique ne tient pas la route.

Pas besoin d'exagérer. Photographe : Yuki Iwamura/AFP/Getty Images




C'est un peu comme si le rêve des négationnistes du climat devenait réalité : Un climatologue prestigieux avoue publiquement qu'il a falsifié ses recherches pour être publié.

C'est en gros la façon dont les titres excités des médias de droite ont dépeint l'affirmation du scientifique Patrick Brown cette semaine, selon laquelle il aurait exagéré l'influence du changement climatique sur les risques d'incendie de forêt afin de faire publier un article récemment dans la prestigieuse revue Nature.

Mais la réalité n'est pas aussi simple.

Au début de son mea culpa, Brown renvoie à un article que j'ai écrit sur les incendies de Maui le mois dernier, en le citant comme un exemple de la manière dont les médias contribuent à faire croire que de telles conflagrations sont "principalement le résultat du changement climatique". Bien que j'apprécie le lien, je dois souligner que nulle part dans mon article je ne prétends que le changement climatique est la cause principale des incendies de Maui. Je suggère fortement qu'il s'agit d'un facteur contributif, une grande partie de la côte sous le vent des îles hawaïennes étant piégée dans un cycle de sécheresse qui a été et continuera d'être exacerbé par le réchauffement de la planète.

Mais bien sûr, une foule d'autres facteurs ont contribué à la catastrophe de Maui, de la gestion discutable des terres à l'erreur humaine. Attribuer un pourcentage précis de responsabilité au changement climatique est impossible, du moins pour moi, et probablement pour tous les scientifiques.

Ce genre de réflexion devrait être familier à Brown, car c'est à peu près ainsi que commence son article sur les incendies de forêt publié dans Nature, mais en plus scientifique :

"Une partie du changement dans le comportement des incendies de forêt est attribuable au réchauffement climatique anthropique, mais il est difficile de quantifier formellement cette contribution en raison de nombreux facteurs de confusion..." 

Dans le reste de l'article, Brown et ses sept coauteurs utilisent l'apprentissage automatique (machine learning) pour essayer de comprendre comment le changement climatique a affecté, et continuera d'affecter, le risque d'incendies de forêt, principalement en asséchant les combustibles tels que les sous-bois et l'herbe (comme cela s'est produit à Maui, par exemple). Ils ont constaté, avec un degré raisonnable de certitude, que le changement climatique a effectivement augmenté le risque d'incendie de forêt dans un passé récent et qu'il l'augmentera encore davantage dans un avenir proche. L'article est bien raisonné, n'est pas manifestement exagéré et a fait l'objet d'un examen par les pairs. Il fait écho à de nombreuses autres études récentes dont les conclusions sont similaires. M. Brown s'en tient même à ce qu'il dit.

Mais M. Brown affirme également, dans sa chronique publiée dans The Free Press, une société de médias fondée par Bari Weiss, ancien rédacteur du New York Times, que lui et ses coauteurs "n'ont pas pris la peine d'étudier" d'autres facteurs contribuant aux incendies de forêt, limitant leur analyse au changement climatique. Selon M. Brown, cette décision a été prise pour que l'article corresponde à la thèse selon laquelle le changement climatique est le principal problème mondial et que la réduction des émissions de gaz à effet de serre est la seule solution. Si vous vous écartez de cette voie, les éditeurs de revues prestigieuses et les pairs évaluateurs rejetteront votre article, explique M. Brown, ce qui vous obligera à recourir à des publications de moindre importance, au détriment de votre carrière.

"[L]es rédacteurs en chef de ces revues ont très clairement indiqué, tant par ce qu'ils publient que par ce qu'ils rejettent, qu'ils veulent des articles sur le climat qui soutiennent certains récits préapprouvés - même lorsque ces récits se font au détriment d'une connaissance plus large pour la société", écrit M. Brown.

Pourtant, Richard Black, consultant en énergie et en climat, a effectué une enquête rapide sur les publications du mois dernier dans Nature et a trouvé des articles :

Ce troisième article a été cosigné par Friederike Otto, pionnière de la science naissante qui consiste à attribuer les phénomènes météorologiques extrêmes au changement climatique. Ces travaux lui ont pratiquement valu le statut de Cassandre du climat, une carrière très médiatisée qu'elle ne voit apparemment pas d'inconvénient à risquer en s'opposant à la prétendue thèse de Brown.

Tout cela laisse à penser que Nature n'a aucun problème à publier des recherches qui vont à l'encontre de ce récit. La rédactrice en chef de Nature, Magdalena Skipper, a nié que sa publication ait un quelconque agenda et a critiqué Brown pour avoir essayé de la manipuler.

Skipper a également souligné que les pairs ont suggéré à Brown d'inclure d'autres facteurs que le climat dans sa recherche sur les incendies de forêt, mais il a fait valoir (de manière assez convaincante) que ce n'était pas nécessaire pour les besoins de son article. Cela suggère non seulement que le travail de Brown aurait pu avoir plus de facilité à être publié si ces facteurs avaient été inclus, mais aussi que, s'il y a eu censure dans la communauté des sciences du climat, c'est Brown qui s'est censuré lui-même.

Il est vrai qu'il est tentant, du moins pour ceux d'entre nous qui travaillent dans les médias, de verser dans le pittoresque lorsqu'il s'agit du climat. Il est difficile d'attirer l'attention des lecteurs autrement. Si ça saigne, ça entraîne, et tout le reste. Mais il est également vrai que la plupart des scientifiques et des auteurs spécialisés dans le domaine du climat s'efforcent toujours d'éviter d'être trop apocalyptiques ou définitifs dans leurs déclarations, de peur d'être accusés d'un catastrophisme qui inciterait les négateurs du climat et déclencherait un désespoir improductif chez les gens normaux. Beaucoup d'entre nous réfléchissent et se disputent constamment sur ces messages. C'est une chose saine.

Prétendre le contraire, comme le font l'article de Brown et ses agrégateurs jubilatoires dans les médias de droite, ne fait que conforter les négateurs du climat, embrouiller la science et rendre l'action réelle beaucoup plus difficile.

Il se trouve que M. Brown est codirecteur de l'équipe chargée du climat et de l'énergie au sein du Breakthrough Institute, une organisation à but non lucratif connue pour susciter la controverse et prôner l'"écomodernisme", c'est-à-dire le recours à la technologie pour aider l'humanité à s'adapter au changement climatique. L'idée sous-jacente est que le réchauffement climatique n'est pas aussi catastrophique que l'affirment de nombreux scientifiques, ce qui sous-entend également qu'il n'est pas si urgent d'agir pour abandonner les combustibles fossiles. S'il est un récit dangereux qui doit être démenti, c'est bien celui-là.

Mark Gongloff est rédacteur en chef et chroniqueur de Bloomberg Opinion sur le changement climatique. Ancien directeur de la rédaction de Fortune.com, il a dirigé la couverture des affaires et de la technologie du HuffPost et a été journaliste et rédacteur au Wall Street Journal.

*****


Voir aussi


4 commentaires:

  1. En complément : https://heatmap.news/climate/patrick-brown-nature-climate-scientist?utm_source=mailchimp&utm_medium=email&utm_campaign=em_newsletter
    Patrick Brown claims to have “left out the full truth” in order to get published. But his full story is much more perplexing.

    RépondreSupprimer
  2. Bonjour Géd.
    Bon sang je sens que ca va encore s'exciter sur les réseaux sociaux. Certain en sont encore à douter que le CO2 soit un GES et donnent encore de l'importance à CLINTEL parce qu'il y a 2 prix Nobel (en physique quantique mais pour eux c'est secondaire) qui ont signé le truc alors une info non décortiquée comme celle de Brown...... Je me demande pourquoi ce Brown a fustigé Nature sans preuve et, ce qui m'embête le plus, pourquoi Nature a publié son article s'il manquait des paramètres important à prendre en compte (ce que relève les reviewers)...
    A l'heure où la moindre petite déviance non significative sur le sujet renforce les climato-crétins dans des proportions astronomiques, c'est le genre de faux pas à ne surtout pas faire :-/

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. "c'est le genre de faux pas à ne surtout pas faire"
      Exactement, et c'est bien pour cela que je traitre Brown de tartuffe dans le titre de mon billet.
      Il est probablement un bon scientifique mais extrêmement maladroit, en l'occurence il donne des cartouches gratuites à tous les guignols tels que Benoit Rittaud.
      Nature a publié l'article parce que les réviseurs se sont laissé convaincre par les réponses de Brown à leurs critiques. Pas sûr qu'aujourd'hui si c'était à refaire Nature publierait ce même papier...On verra ce qu'il en sera, mais une rétractation est toujours possible, elle serait même méritée.
      En attendant vous avez raison, les réseaux sociaux, essentiellement de droite bien sûr, vont frétiller de la queue pendant un moment, puis ils oublieront et passeront à une autre ânerie. Benoit Rittaud est un spécialiste en la matière, combien de fois il a "dénoncé" un scandale qui a fait pschitt dans la foulée.

      Supprimer
  3. SkepticalScience publie un article qui à son tour démonte l'arnaque Patrick Brown : https://skepticalscience.com/patrick-brown-hallucination.html?utm-source=facebook&utm-campaign=socialnetworks&utm-term=sks&fbclid=IwAR3-H0s_Lex9_9GtUKPjAU555NFcoWY74lnIZpZRMPWvQnq-wCCNX6Da_yA

    RépondreSupprimer