vendredi 21 février 2020

Malfaisant ou stupide ? Les deux types de négateurs du changement climatique

J'ai souvent dit que confronté à un climatosceptique nous avions affaire soit à un crétin soit à un désinformateur professionnel, sachant que pour certains il était difficile de les situer dans l'une ou l'autre de ces catégories ; pour des gens comme Fred Singer ou Christopher Monckton le doute n'est guère permis, ce sont des désinformateurs payés par qui-vous-savez pour embobiner les crétins dont font partie la plupart de ceux qui s'expriment dans les réseaux sociaux pour nier ce qui constitue aujourd'hui une évidence.

Le site dailykos vient de publier un article que je ne peux renier puisqu'il va exactement dans le même sens ; avec Evil or Stupid? The Two Types Of Climate Change Deniers nous avons une distinction assez similaire à celle que je mets régulièrement en avant en classant les « climate change deniers » en malfaisants/diaboliques/méchants/mauvais/néfastes/etc. (différentes traduction de evil) d'une part et stupide/idiot/imbécile/abruti/etc. d'autre part.

Voici la traduction intégrale du texte anglais que je vous livre en vous souhaitant une bonne lecture !

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Les gens se demandent souvent ce qui motive le déni du changement climatique. Notre réaction est toujours que cela dépend de la personne. Mais elle se résume généralement à deux réponses très simples : les négateurs (ou négationnistes, premier choix du traducteur DeepL…NDT) sont soit stupides, soit malfaisants.

Bien que cela puisse sembler être une réponse trop réductrice ou cynique, il est difficile de trouver des exemples de négateurs qui ne correspondent à aucun des deux.

En effet, il est clair que les trolls de Twitter et la plupart des gens qui croient les diverses voix financées par Koch qui colportent le déni ne sont pas assez au fait de la science pour l'évaluer eux-mêmes. (Et pourquoi devraient-ils l'être ?)

Lundi, Eos*, de l'AGU, a publié un article d'opinion décrivant un tel scénario. L'article est de Lucas Vargas Zeppetello, dont le premier article évalué par les pairs a été déformé par des négateurs sur Twitter.

Il décrit comment la réaction des négateurs l'a fait se sentir "démoralisé, embarrassé et frustré", mais qu'il s'est senti mieux après avoir parlé avec des collègues qui avaient leurs propres histoires sur la déformation de leur travail par les négateurs. Il présente également quelques leçons apprises sur la manière dont les universitaires devraient réfléchir à ce risque de fausse représentation lorsqu'ils rédigent des articles et inclure des déclarations explicites pour rendre les résultats plus difficiles à déformer, et sur la manière dont les rédacteurs de journaux devraient mieux réagir à la désinformation lorsqu'elle se produit.

La réaction aux travaux de Zeppetello se situe clairement dans le camp des "stupides", car il est clair que ceux qui ont pris connaissance de l'étude n'ont probablement pas compris ce qu'elle disait. Pour remédier à ce genre d'échec, nous avons besoin d'un meilleur enseignement des sciences en général, et plus particulièrement des sciences du climat. Sur ce dernier point, nous sommes ravis d'apprendre que le nouveau livre de John Cook, Cranky Uncle vs. Climate Change, sortira dans quelques semaines, avec un extrait sur les négateurs et le fossé du consensus en guise de bande annonce. 

Bien que l'approche de l'Oncle grincheux [i.e. Cranky Uncle] soit excellente pour montrer à ses amis et à sa famille comment le déni est construit sur des mensonges, elle ne va évidemment pas arrêter quiconque dont le salaire repose sur la diffusion du déni. C'est là que le mal entre en jeu. 

Un nouvel article dans Energy Research & Social Science par Ray Galvin de Cambridge cherche à redynamiser la science sociale du climat et de l'énergie dans la mesure où l'hypothèse générale selon laquelle les humains abordent les questions politiques de bonne foi crée un vide dans notre compréhension du comportement, ce qui signifie que "la notion de mal humain doit être mieux théorisée". Le travail de Galvin est imprégné de références et de théories sociologiques, mais voici une tentative de le présenter dans un langage simple qui, nous l'espérons, ne le dénature pas bêtement comme les négateurs l'ont fait pour Zeppetello. 

Après le résumé, la première ligne est : "Nous nous trouvons dans une situation d'urgence climatique." Pourquoi ? Galvin propose que la sociologie "puisse aider à expliquer" pourquoi nous sommes "déterminés à détruire le climat de l'Holocène" et quelles "actions audacieuses et obstinées seraient nécessaires pour arrêter cette course à la destruction".

Au cœur du système présenté par Galvin se trouve le fait que "les puissants qui savent que leurs actions nuisent à des millions de personnes" et "dont les actions façonnent la structure sociale dans leur propre intérêt et contre les intérêts de l'humanité ne sont pas susceptibles d'être persuadés de renoncer à leur pouvoir de destruction par la force de l'argument moral". 

"Le mal (quel qu'il soit ontologiquement)", écrit Galvin, "n'est pas seulement dans leurs actions, il est aussi dans leur attachement tenace à ces actions malgré un bon argument moral". Ces "personnes qui se comportent de manière égoïste, malveillante ou avec d'autres intentions "mauvaises" savent souvent très bien que ces comportements sont contraires aux codes de conduite moraux de base, non seulement dans leur propre culture mais même dans le monde entier". 

Ainsi, même si chacun d'entre nous peut choisir individuellement des options plus respectueuses du climat, comme les véhicules électriques, cela ne peut pas aller plus loin pour atténuer le problème en l'absence de changements structurels plus importants. Et ces changements n'interviendront qu'avec l'exercice de la force politique, car "nous n'avons pas seulement affaire à des personnes de bonne volonté et bien intentionnées, mais aussi au "mal"" dans la préservation égoïste de vastes fortunes ou l'utilisation du pouvoir politique au seul profit de soi-même. 

Ce genre de mal "ne peut être neutralisé que par la force du pouvoir, par la résistance déterminée et soigneusement élaborée des citoyens". En fin de compte, "les personnes de bonne volonté doivent accroître leur pouvoir afin de travailler activement à arracher le pouvoir à ceux qui contrôlent la structure sociale pour leur propre profit aux dépens des autres et du climat". 

Il y a beaucoup de noms et de mots différents utilisés pour décrire diverses formes de déni. Mais deux mots suffisent. Pour ceux qui sont innocemment trompés par ceux qui promeuvent le déni, le plus beau descriptif serait qu'ils ne sont que des négateurs " induits en erreur ".

Et pour ceux qui induisent en erreur, qui font preuve d'avidité, d'indifférence à l'égard de la souffrance humaine, qui sont prêts à tromper les autres et à déformer les structures sociales pour servir leurs objectifs personnels aux dépens du public ? 

Cela ne peut être vraiment décrit que comme relevant du domaine du mal.

* Voir Don’t @ Me: What Happened When Climate Skeptics Misused My Work (Ne me demandez pas : Que s'est-il passé lorsque les climatosceptiques ont fait une utilisation abusive de mon travail)

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Nous avons un exemple tout chaud de « négateur induit en erreur » que je traduis pour ma part en « crétin » avec ce monument de bêtise pompeusement titré Le scandaleux appel à la rébellion lancé par des scientifiques dans lequel on peut lire ce chef d'oeuvre de « réalisme » :
Rappelons que [Action non-violente COP21] a initié le décrochage, condamné par la justice le 16 octobre dernier, des portraits du président de la République de plusieurs mairies françaises. S’agissant d’Extinction Rebellion, on signalera parmi ses récents exploits le blocage bien entendu illégal de la place du Châtelet le 7 octobre, l’occupation tout aussi illégale d’une cimenterie le 18 février mais aussi, la veille, le saccage du gazon de l’entrée du Trinity College de Cambridge.
Horreur et damnation, on a osé décrocher le portrait de Macron dans quelques mairies (il ne s'en est toujours pas remis le pauvre d'être ainsi descendu), bloquer une place réservée aux voitures (quel scandale innommable !), occuper une cimenterie Lafarge (celui qui s'est illustré en Syrie) et, crime suprême de lèse majesté, piétiner un gazon anglais qui venait juste d'être tondu avec amour !

Moi je vous le dis, si on ne respecte plus le gazon anglais c'est que ça va vraiment mal, très très mal, « evil » en anglais, mais heureusement qu'un « stupid » est là, en la personne de Benoit Rittaud, pour tirer la sonnette d'alarme avant que les choses ne dégénèrent et que l'on se mette à pisser dans les caniveaux, honte ultime qui signerait la fin des haricots.


2 commentaires:

  1. En fait la voiture electrique est une (grande) partie de la solution ... non pas qu' elle soit moins polluante , car ce n'est pas vraiment le cas en terme de CO2 mais parce qu'elle est en moyenne 3 fois plus cher que l'équivalent thermique( et encore pas en autonomie) et qu'elle coute au moins aussi cher à l'emploi. Ainsi une ZOE vaut entre 25000 et 30000 euros alors que l'équivalent thermique , une petite citadine vaut 7500 euros ... Donc en imposant des normes impossibles à tenir pour les thermiques voire en interdisant la vente de thermique comme en Norvege , on devrait pouvoir diviser , au moins , par trois le parc automobile , et ceux qui feront l 'effort d'acheter une voiture electrique parce qu'ils n 'ont pas le choix, seront tellement saignés qu'ils consommeront moins à coté (comme le tourisme ou les gadgets importés de Chine) et que cela sera autant de CO2 économiser ...
    Au final, grace à la voiture electrique et son prix , on diminuera le parc automobile et donc les émissions de CO2 et la consommation .. C'est gagnant - gagnant .

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    1. Dans ce texte la voiture électrique est utilisée comme exemple de « petit geste » individuel qui ne permet pas de résoudre le problème auquel nous sommes confrontés, l'auteur aurait pu choisir à la place ne pas prendre l'avion (ou le moins possible), isoler sa maison, manger de saison et local, éteindre la lumière en sortant d'une pièce, etc.

      Si la voiture électrique est une solution ou pas est un problème à part que je ne me sens pas de traiter, donc je resterai silencieux (comme la voiture électrique) sur ce sujet.

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