Républicains en plein désarroi. |
Le soir du 6 janvier dernier je n'aurai manqué de regarder CNN à 19 heures précises pour rien au monde. Je me doutais qu'il pouvait se passer quelque chose, par exemple que Mike Pence refuse de certifier les résultats et qu'il y ait donc du spectacle au Congrès, et France Info, par exemple, faisait état de certaines craintes dans Etats-Unis : journée décisive au Congrès pour Joe Biden (francetvinfo.fr) où l'on entend Loïc de La Mornais dire notamment que « les députés vont voter pour confirmer les résultats de l'élection de novembre et certains, des conservateurs trumpistes, ont annoncé qu'ils voteraient contre la confirmation de Joe Biden » en ajoutant cependant que « Ça ne changera rien au résultat, Joe Biden sera investi le 20 janvier prochain. »
On pouvait donc s'attendre à une représentation simplement « comique », mais à la place nous avons eu du « tragi-comique » gratiné que pas grand monde aurait pu imaginer.
On savait pourtant que Donald Trump allait prendre la parole devant ses partisans ce même jour, juste avant la certification de Joe Biden au Congrès, et ses paroles résonnent aujourd'hui de manière éclatante et prémonitoire. Nous en avons la transcription exacte que chacun peut vérifier avec This is what Trump told supporters before many stormed Capitol Hill - ABC News (go.com) :
Donald J. Trump dans son numéro favori de claquettes. |
Voici par exemple l'un des moments clés :
All of us here today do not want to see our election victory stolen by a bold and radical left Democrats, which is what they are doing, and stolen by the fake news media. That is what they have done and what they are doing. We will never give up. We will never concede. It doesn't happen. You don't concede when there's theft involved.
Nous tous ici présents ne voulons pas voir notre victoire électorale volée par une gauche démocrate audacieuse et radicale, ce qu'elle fait, et volée par les pseudo-médias. C'est ce qu'ils ont fait et c'est ce qu'ils sont en train de faire. Nous n'abandonnerons jamais. Nous ne céderons jamais. Cela n'arrive pas. On ne concède pas quand il y a un vol.
Et il termine son discours ainsi :
So we are going to--we are going to walk down Pennsylvania Avenue, I love Pennsylvania Avenue, and we are going to the Capitol, and we are going to try and give--the Democrats are hopeless, they are never voting for anything, not even one vote but we are going to try--give our Republicans, the weak ones because the strong ones don't need any of our help, we're try--going to try and give them the kind of pride and boldness that they need to take back our country. So let's walk down Pennsylvania Avenue.
Nous allons donc - nous allons marcher sur Pennsylvania Avenue, j'adore Pennsylvania Avenue, et nous allons aller au Capitole, et nous allons essayer de donner - les démocrates sont sans espoir, ils ne votent jamais pour quoi que ce soit, pas même un vote, mais nous allons essayer - pardonner à nos républicains, les faibles parce que les forts n'ont pas besoin de notre aide, nous allons essayer - d'essayer de leur donner le genre de fierté et d'audace dont ils ont besoin pour reprendre notre pays. Alors, marchons sur Pennsylvania Avenue.
On passera sur le style décousu pour ne pas dire extrêmement médiocre qui est la marque de fabrique de tout discours public de Trump, ce qui compte c'est le fond, et ici le fond est suffisamment explicite : Trump incite clairement ses supporters à marcher sur le Capitole pour tenter d'inverser le résultat des élections !
A ce stade-là on est en droit de se poser une question en forme d'alternative : qu'est-ce qui est le plus hallucinant ?
- que Donald Trump, président de la première puissance économique et militaire du monde, se permette de se comporter tel un dirigeant de république bananière ?
- ou que ses nombreux partisans le suivent sans réfléchir ?
The president, under the Constitution, can be removed from office for "Treason, Bribery, or other High Crimes and Misdemeanours".
High crimes and misdemeanours have historically encompassed corruption and abuses of the public trust, as opposed to indictable violations of criminal statutes.
En vertu de la Constitution, le président peut être révoqué pour "trahison, corruption ou autres crimes et délits graves".
Les crimes et délits graves ont toujours englobé la corruption et les abus de confiance du public, par opposition aux violations des lois pénales.
Un adorateur de Donald Trump répétant cot cot cot à qui veut l'entendre. |
Je pense que crier au populo-nazisme d'une frange (qui finit par être large) de débiles, est également se comporter en poulet sans tête, courant simplement dans un autre poulailler. Essayer de décortiquer les mécanismes à l'oeuvre,y compris si cela est extrêmement désagréable,pourrait être si ce n'est salvateur,au moins constructif.
RépondreSupprimerJe propose l'approche suivante : la massification des sociétés humaines implique un "désencapacitement" des individus par l'hyperspécialisation et (donc) une certaine forme de fosilisation de l'ordre hiérarchique nécessaire à la tenue cohérente de l'ensemble. Cette forme d'impuissance individuelle devient problématique lorsque tout ou partie d'une société rencontre des difficultés (matérielles, énergétiques,sanitaires,etc.).
Il semblerait alors que tout bipède en tension préférera trouver un héros/un bouc émissaire plutôt que de faire face au vide de sa propre impuissance. C'est ainsi que je m'explique le surgissement de colères irrationnelles, mais également l'incapacité collective des "sachants", comme des "débiles" à faire face aux défis grandissants qui surgissent dans le monde réel (par opposition au monde-scène de théâtre des sociétés humaines civilisées) et qui sont les fruits délétères de ladite organisation.
En effet, le groupe des rationnels a beau jeu de désignerle groupe des irrationnels comme un poids mort ou à éduquer, alors que globalement il est aux manettes du monde depuis des décennies à minima, et donc qu'il façonne la société d'individus impuissants.
« le groupe des rationnels [...] est aux manettes du monde depuis des décennies à minima, et donc qu'il façonne la société d'individus impuissants.»
SupprimerOui, certes, il s'agit là d'une partie non négligeable du problème, et si Trump a été élu en 2016 c'est un peu « grâce » à Hillary Clinton qui était perçue comme la « représentante de Wall-Street » ; on ne dira jamais assez les ravages du capitalisme, tendance néo-libérale, sur la montée des extrêmes, qu'ils soient de gauche ou de droite.
Il n'empêche qu'aux US c'est bien l'extrême droite, avec les Proud Boys et le mouvement Qanon qui ont pris le relai du Tea Party, qui est la vedette des derniers événements ; Donald Trump n'en est pas l'initiateur, il est seulement opportuniste et joue la seule corde de son instrument qui suffit à faire bander quasiment la moitié des Américains. La religion y joue une part prépondérante, sans être la seule explication au phénomène de délabrement de la démocratie.
Oui, c'est un opportuniste né. Il y aurait également un volet de techno-critique à articuler avec mon point précédent, mais c'est long.
RépondreSupprimerEn complément au sujet de l'impeachment : https://www.politifact.com/factchecks/2021/jan/11/facebook-posts/fact-checking-viral-post-about-impeachment-and-tru/
RépondreSupprimer