John Hawks a une remarque intéressante sur Twitter.
Le sujet porte sur l'appelation "humain" et celui qui a commencé la discussion, un certain John Hoopes, professeur d'anthropologie à l'université du Kansas, écrit ceci :
Why aren’t all species within the genus Homo considered to be human?
Pourquoi toutes les espèces du genre Homo ne sont-elles pas considérées comme humaines ?
Je suis allé voir sur Wikipédia la définition du mot Homo et cela donne :
Homo est le genre qui réunit Homo sapiens et les espèces apparentées.
Homo sapiens on sait qui c'est, il s'agit de vous, de moi, des autres, bref de nous. Par contre pour les « espèces apparentées » c'est là que semble venir un léger problème, d'où la question ci-dessus posée.
John Hoopes poursuit :
I watched the documentary about Rising Star Cave on Netflix tonight. It makes the assertion over and over and over again that Homo naledi “wasn’t human” even though these people apparently engaged in difficult, intentional burials of their dead and also made artwork. Seems weird.
J'ai regardé le documentaire sur la grotte de Rising Star sur Netflix ce soir. Il affirme sans cesse que Homo naledi "n'était pas humain", bien que ces individus aient apparemment procédé à des enterrements difficiles et intentionnels de leurs morts et qu'ils aient également réalisé des œuvres d'art. C'est bizarre.
Je passe sur la discussion qui s'ensuit et vais directement sur la réponse d'un certain Chris Stringer, un anthropologiste britannique, qui remarque :
I use human as equivalent to genus Homo, while acknowledging that future phylogenetic or proteomics research may show that things like rudolfensis, habilis, floresiensis, luzonensis and naledi don’t really belong in the genus…1
J'utilise le terme "humain" comme équivalent au genre Homo, tout en reconnaissant que de futures recherches phylogénétiques ou protéomiques pourraient montrer que des éléments tels que rudolfensis, habilis, floresiensis, luzonensis et naledi n'appartiennent pas vraiment au genre...1
If we exclude forms like Neanderthals and Denisovans from being ‘human’ then might we get to the dangerous situation of saying people today with 2-5% levels of their DNA are not 100% human ? ..2
Si nous excluons des formes telles que les Néandertaliens et les Denisovans de l'" humain ", pourrions-nous en arriver à la situation dangereuse de dire que les personnes d'aujourd'hui ayant des niveaux de 2 à 5 % de leur ADN ne sont pas à 100 % humaines ?
Intéressant n'est-ce pas ?
Cela prouve une chose dès à présent, c'est que quand on utilise un terme du langage commun comme "humain", et tout ce qui va avec (homme, humanité mais aussi...animal...) on va pratiquement à coup sûr au casse-pipe.
C'est là qu'intervient John Hawks qui répond au premier commentaire de Chris Stringer :
I strongly disagree with this idea. In biology genera map onto a tree of relationships that do not correspond well with our ordinary language terms, like “human”.
Je ne suis pas du tout d'accord avec cette idée. En biologie, les genres s'inscrivent dans un arbre de relations qui ne correspond pas bien aux termes de notre langage ordinaire, comme "humain".
Et on peut le comprendre !
Il enchaine avec :
Were Neandertals human? I think it’s undeniable in our terms today. They interacted in recognizably human ways. Homo floresiensis? Were they a human population? I don’t think that question can be answered by saying they’re not really Homo.
Les Néandertaliens étaient-ils humains ? Je pense que c'est indéniable dans les termes d'aujourd'hui. Ils interagissaient d'une manière humaine reconnaissable. Homo floresiensis ? S'agissait-il d'une population humaine ? Je ne pense pas que l'on puisse répondre à cette question en disant qu'il ne s'agit pas vraiment d'Homo.
Et c'est un peu plus loin que Hawks enfonce le clou après un commentaire (apparemment supprimé mais que j'ai conservé) d'un certain Thomas Smith qui ne semble pas être anthropologue :
Yeah, we don't have to change colloquial language to suit scientific terms & categories. (I feel the same way about cladistics - we're haplorrhines but not 'monkeys', we're vertebrates but not 'fish'.)
Oui, nous n'avons pas à changer le langage familier pour l'adapter aux termes et catégories scientifiques. (Je pense la même chose de la cladistique - nous sommes des haplorrhines mais pas des "singes", nous sommes des vertébrés mais pas des "poissons").
Ce à quoi John Hawks réplique laconiquement :
I agree as you probably know
Je suis d'accord, comme vous le savez probablement
Le tweet de Thomas Smith a été supprimé par Twitter car il semblerait qu'il ait violé les règles en vigueur...Si c'est le cas cela voudrait dire qu'on n'aurait pas le droit de dire sur Twitter que l'homme n'est pas un singe, alors que l'argument de Thomas Smith est parfaitement valable et vient s'insérer à merveille dans le fil qui, je le rappelle, avait débuté par un problème de définition de ce qui est "humain".
Ceux qui me suivent fidèlement depuis longtemps savent quel est mon point de vue sur la question. J'ai consacré suffisamment d'articles dont le premier, L'Homme et (est?) l'animal, avait suscité de nombreux commentaires, mais c'est mon deuxième billet, L'homme, ce sacré animal !, qui déclencha le coup de foudre avec ce commentaire de l'inénarrable Robert :
Anonyme25 mai 2017 à 00:08Géd
Nous n'avons pas dévié des grands singes nous sommes des grands singes quant à votre site... permettez moi d'être sceptique sur sa fiabilité
S'ensuivirent d'autres commentaires et de nombreux autres billets consultables en entrant le mot "singe" dans la zone recherche de mon blog.
Robert est resté scotché sur sa conviction d'être un singe parce que Pascal Picq le lui aurait dit un jour qu'il passait par là. J'ai eu beau lui démontrer qu'Yves Coppens se montrait beaucoup plus prudent sur le sujet en écrivant noir sur blanc dans Pré-ludes (c'est moi qui surligne en rouge) page 53 :
Ces grands cousins (il parle des chimpanzés, des bonobos et des gorilles) n'étant véritablement observés dans leur milieu que depuis un petit demi-siècle (le livre de Coppens date de fin 2014), l'étonnement ne cesse de grandir face à ce que l'on découvre et porte naturellement à l'exagération, comme lorsqu'on déclare : « Le singe est un homme » ou « L'homme est un singe », deux propositions tout aussi abusives l'une que l'autre.
Rien n'y a fait.
Je lui ai également parlé de John Hawks et de son billet (Humans aren't monkeys. We aren't apes, either. lui aussi supprimé comme le tweet de Thomas Smith...) dans lequel il écrivait en substance :
Je ne sais pas pourquoi tant de gens qui acceptent et soutiennent [la théorie de] l'évolution ont une vision si vague (pour ne pas dire pas très fute-fute...) de la systématique phylogénétique.Comment expliquer autrement pourquoi j'entends si souvent le bobard, « Les humains sont des [grands] singes » ?
On remarquera de manière ironique les mots "humains" et "singes" dans la même phrase.
Voilà le danger d'utiliser des mots du langage courant pour expliquer des concepts scientifiques : on se plante et en voulant simplifier les choses on ne fait que les rendre plus obscures.
Si l'on veut être sérieux on en reste aux définitions telles qu'elles sont communément admises par l'ensemble de la communauté scientifique. En matière de classification des espèces Wikipédia nous donne le tableau suivant :
Nomenclature de la classification classique. |
Je défie quiconque de dénicher dans ce tableau les mots "humain" ou "singe". Un autre tableau plus synthétique et compréhensible nous est proposé :
Schéma de la classification classique. |
Ainsi Homo sapiens appartient :
- au monde vivant (ce n'est pas un minéral)
- au domaine Eucaryota (il a un noyau...)
- au règne animal (ce n'est ni une plante ni un champignon)
- à l'embranchement Chordata (c'est compliqué à décrire...)
- à la classe Mammalia (c'est un mammifère, donc)
- à l'ordre des Primates (comme les "singes", et les lémuriens qui ne sont pas des "singes"...)
- à la famille Hominidae (comme l'orang-outang, le gorille et le chimpanzé)
- au genre Homo (nous, mais aussi quelques-uns comme Neanderthal qui ont disparu)
- à l'espèce Homo sapiens.
Comme vous pouvez le constater on peut décrire Homo sapiens sans utiliser le mot "singe" et vous remarquerez que je l'ai seulement mentionné entre guillemets.
Mais pourquoi faire simple quand on peut grandement compliquer les choses en utilisant des mots dont on ne sait pas trop ce qu'ils recouvrent en fait ?
Robert aurait certainement la réponse à cette question.
Non je déconne.
Très précis comme d’hab …
RépondreSupprimerMais avec nos Wokistes « trans » tout cela partira dans la tempête du délire de ces humanoïdes bizarres ; j’en vois déjà multiplier les opérations « car ils se sentent singe » 😁
(Un singe se sentirait il homme ?!?)
😉
Excellente question que Robert n'a pas songé à se poser. De là à penser que Robert est woke...à mon avis il serait plutôt aware comme JCVD.
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