jeudi 24 septembre 2020

L'année 2020 juste derrière 2012, mais les ours polaires s'en foutent un peu...

 L'inénarrable Susan Crockford est toujours là et insiste pour nous convaincre que les ours polaires se portent super bien malgré le fait que l'année 2020 termine à la deuxième place juste derrière l'année record 2012 pour ce qui est de l'extension de la banquise arctique. Son billet est évidemment repris par le très dispensable site d'Anthony Watts dont le rôle est de récupérer tout ce qui traine afin d'alimenter la machine à désinformation climato-crétine ; l'article est intitulé Potential impact of the second-lowest sea ice minimum since 1979 on polar bear survival et si vous avez du temps à perdre vous pouvez éventuellement y jeter un coup d'œil, ça ne va pas vous tuer, simplement vous arracher un ou deux bâillements au pire. 

Donc l'idée de la môme Crockford est que la faible extension de la banquise arctique n'empêche nullement les ours polaires de prospérer, comme si ces derniers devaient disparaitre du jour au lendemain sous prétexte que l'extension des glaces arctiques est passée sous la barre des 4 millions de kilomètres carrés à son plus bas de septembre :

Evolution de l'extension de la banquise arctique (source ads.nipr.ac.jp/vishop)


Donc nous avons le podium suivant (à quelques chouias près) :

  1. 2012 : 3,2
  2. 2020 : 3,55
  3. 2019 : 4,05
Et pour mettre ces valeurs en perspective voici le classement des moyennes par décennies :
  1. 2010s : 4,37
  2. 2000s : 5,48
  3. 1990s : 6,56
  4. 1980s : 7,24
Inutile de dire qu'au train où vont les choses il y a deux conclusions faciles à tirer :
  1. le record d'extension de 2012 sera très vite battu dans les prochaines années
  2. la décennie 2020s deviendra à son tour la number one en passant très probablement sous la barre des 4,00
A noter que dans les valeurs ci-dessus les minima de 2012 et 2019 ont été atteints quelques jours plus tard et s'élèvent à
  1. 2012 : 3,18
  2. 2019 : 3,96
Donc tous les minima pour ces trois années passent sous la barre des 4 millions de km2.

Nous remarquons donc immédiatement que Susan Crockford, et par voie de conséquence Anthony Watts, ne nient en aucune façon que l'Arctique se réduit comme peau de chagrin ; mais il y a mieux, ils nous confirment que les spécialistes du sujet, tel que Steven Amstrup, se sont plantés en...sous-estimant la rapidité du déclin de la banquise arctique !
This is not surprising since even 2nd lowest leaves summer ice coverage in the Arctic at the level sea ice experts wrongly predicted in 2005 wouldn’t be seen until 2050 (ACIA 2005; Amstrup et al. 2007; Wang and Overland 2012) and this is the same amount of summer sea ice that polar bear experts incorrectly predicted would cause 2/3 of all polar bears to disappear.
Cela n'est pas surprenant puisque même la deuxième plus faible [extension de la banquise arctique] laisse une couverture de glace d'été dans l'Arctique au niveau que les experts de la glace de mer ont prédit à tort en 2005 ne serait pas vue avant 2050 (ACIA 2005 ; Amstrup et al. 2007 ; Wang et Overland 2012) et c'est la même quantité de glace de mer d'été que les experts de l'ours polaire ont prédit à tort qu'elle ferait disparaître 2/3 de tous les ours polaires.
Que tous ces imbéciles (Susan, Anthony et tous leurs minions) en soient remerciés, ils reconnaissent donc que ce qui avait été prévu pour 2050 se produit aujourd'hui même en 2020 avec 30 ans d'avance !

Que les ours polaires doivent souffrir du manque de glace ou non, je n'en ai personnellement aucune idée préconçue étant donné que je ne suis pas, moi, spécialiste du sujet et que je me contente de faire confiance...aux spécialistes du sujet !

Or les spécialistes du sujet s'appellent Steven Amstrup ou Andrew Derocher, entre autres, mais certainement pas Crockford, qui de son propre aveu n'a jamais mis les pieds sur les glaces arctiques, et encore moins Watts et toute sa clique qui baignent dans leur jus idéologico-conspirationniste sur fond de conservatisme ranci mâtiné de trumpisme décomplexé.

Un des décérébrés habituels tient à donner son avis sur la question :
commieBob
September 21, 2020 at 3:05 pm

A quick web search for seasonally ice free arctic holocene turns up evidence of just that. example As far as I can tell, none of the alarmists have adequately dealt with that tiny technical detail.

The Arctic ocean has often been seasonally ice free previously in the last 10,000 years. Why did that not cause extinction of the Polar Bears?
Une recherche rapide sur Internet pour trouver l'holocène arctique saisonnier sans glace en donne la preuve. exemple Pour autant que je sache, aucun des alarmistes n'a traité de manière adéquate ce minuscule détail technique.

L'océan Arctique a souvent été libre de glace de façon saisonnière au cours des 10 000 dernières années. Pourquoi cela n'a-t-il pas entraîné l'extinction des ours polaires ?

C'est bien de faire une « recherche rapide sur Internet », moi-même je m'y adonne fréquemment, mais dans ce cas il est important d'enlever ses œillères afin de bien comprendre ce qu'on y trouve ; dans le cas présent le lien fourni par ce commentateur peu perspicace mène sur un papier scientifique daté de mai 2014 et intitulé Arctic Ocean perennial sea ice breakdown during the Early Holocene Insolation Maximum (Dégradation de la glace de mer pérenne de l'océan Arctique pendant le maximum d'insolation de l'Holocène précoce) ; voici ce que l'on peut lire dans les conclusions :

Based on the observed Arctic Ocean sea ice decline during the recent decades we know that the climate system is sensitive to changes in the external forcing. The recent decline has proved to exceed several estimates from coupled general circulation model studies (Stroeve et al., 2007) and from this notion alone one could argue that it seems highly plausible that the sea ice cover was reduced compared to present day pre-industrial conditions also during early and middle Holocene as a consequence of the EHIM.
D'après la diminution de la glace de mer de l'océan Arctique observée au cours des dernières décennies, nous savons que le système climatique est sensible aux changements du forçage externe. Le récent déclin s'est avéré supérieur à plusieurs estimations provenant d'études de modèles couplés de circulation générale (Stroeve et al., 2007) et, à partir de cette seule notion, on pourrait affirmer qu'il semble très plausible que la couverture de glace de mer ait été réduite par rapport aux conditions actuelles de l'époque préindustrielle, également au cours de l'Holocène précoce et moyen, en conséquence de l'EHIM.

Là aussi nous devons remercier notre imprudent commentateur qui se tire allègrement une balle dans le pied en citant un papier dans lequel on peut lire noir sur blanc que

  • le système climatique est sensible aux changements du forçage externe, comprendre nos émissions de gaz à effet de serre ;
  • la diminution de la banquise arctique est causée par ces changements du forçage externe, pour le dire autrement nos émissions de gaz à effet de serre entrainent la diminution de la banquise arctique ;
  • le récent déclin est supérieur à ce qui avait été prédit, donc il s'avère bien plus rapide que ce que l'on pensait par exemple en 2007 ;
  • à l'époque de l'Holocène moyen l'extension de la banquise arctique était probablement plus faible que lors...de l'époque préindustrielle !
Eh oui, on parle dans ce papier de l'époque préindustrielle que notre climato-gogo a confondu avec l'époque actuelle ; les graphiques suivants extraits de l'étude permettent pourtant de clarifier (un peu) les choses :

Fig. 3. Couverture simulée de différentes catégories d'épaisseur de glace dans l'océan Arctique au moment de la fraction maximale de la zone d'eau libre chaque année pour a) un albédo de surface constant b) un paramétrage dynamique de l'albédo de surface (voir l'annexe pour plus de détails). Le blanc indique la fraction d'eau libre. La ligne bleue indique l'épaisseur moyenne annuelle simulée de la glace de mer avec une échelle séparée à droite.

Fig. 4. Épaisseur moyenne annuelle de la glace de mer pour les trois différentes simulations (panel a) comparée aux résultats des études publiées sur la glace de paléocéan (panel b). Courbe noire : albédo de surface constant ; courbe rouge : paramétrage dynamique de l'albédo de surface. La simulation mise en œuvre avec un paramétrage dynamique de l'albédo de surface a été exécutée à partir du temps présent et dans le sens inverse pour tenir compte de l'importance de l'état initial de la couverture de glace de mer. L'épaisseur moyenne annuelle de la glace de mer obtenue par cette simulation (courbe orange) révèle une hystérésis de ∼1000 ans. 

Que peut-on déduire de ces graphiques ?
  1. on ne voit pas vraiment de périodes sans aucune glace arctique (ice free) même s'il est probable qu'il y en ait eu quelques unes en été (d'autres études mentionnées dans ce papier signalent d'ailleurs cette possibilité) ;
  2. même s'il y a eu des périodes où l'Arctique était libre de glace en été (et en été seulement) on voit bien que les variations se sont déroulées sur des périodes multiséculaires, voire millénaires !
Ce dernier point est bien sûr le plus important, car aujourd'hui la diminution de la banquise arctique se voit quasiment à l'œil nu, à un rythme que l'on peut qualifier de décennal ; la disparition quasi totale de la banquise en été est prévue bien avant la moitié de ce siècle (voir L'Arctique libre de glaces en 2035 ?) et dans ce cas on peut se demander si les ours polaires auront le temps de s'adapter au changement de leur habitat qui aura bien évidemment des conséquences fâcheuses sur leur alimentation.

Pour répondre à l'interrogation de notre climato-benêt (Pourquoi cela n'a-t-il pas entraîné l'extinction des ours polaires ?) à cette lointaine époque les changements étaient bien plus lents qu'aujourd'hui et les ours polaires ont eu par conséquent tout le loisir de s'y préparer et de modifier leur style de vie en conséquence.

Il faut quand même rappeler que les ours polaires sont principalement carnivores et que leur alimentation est essentiellement à base de phoques qu'ils chassent SUR la banquise ; ci celle-ci disparait cela signifie que les phoques disparaissent avec elle et qu'il ne reste plus grand chose dans le coin à bouloter pour nos gentils ursidés.

Et bien que Susan Crockford soit Canadienne on ne peut pas dire que ses compatriotes partagent son optimisme débridé ; le site L'Encyclopédie Canadienne nous dit en substance :
À la suite du changement climatique qui continue à diminuer son habitat de glace marine, l’ours polaire est de plus en plus menacé.
Et on nous précise son régime alimentaire :
L'ours polaire se nourrit principalement de phoques marbrés et, à un degré moindre, de phoques barbus. Il apprécie également les phoques communs, les phoques à crête et, à l'occasion, les morses et les baleines blanches (ou béluga). Il attrape les phoques (voir Phoque et otarie) quand ceux-ci refont surface dans les trous d'aération, pourchasse les phoques pèlerins entrainés au large sur la glace marine et capture les phoques marbrés directement dans leurs tanières.

Un « trou d'aération » se pratique dans la glace de la banquise, s'il n'y a plus de banquise il n'y a plus de trou d'aération et donc plus de phoques pour en sortir. Heureusement les ours peuvent se délecter également de baleines, donc d'animaux marins, cependant il leur faut une base à partir de laquelle aller chasser les cétacés et ce n'est probablement pas à partir du rivage qu'ils ont les meilleures chances d'aller harponner Moby Dick...On nous dit d'ailleurs :

Dans les régions comme la Baie d'Hudson, la glace marine fond complètement chaque été, forçant ainsi les ours à se retrancher sur la rive et à attendre que la glace se reforme. Sur terre ferme, l'ours polaire puise dans ses réserves de graisse l'énergie dont il a besoin. Même s'il y mange des baies, de l'herbe et d'autres aliments, ce type d'alimentation ne lui fournit pas un apport nutritionnel important.

Bref sur terre l'ours polaire se transforme en végétalien et apparemment ce n'est pas ça qui lui réussit le mieux. L'ours polaire n'est pas un grizzly, mais il va assez vite être forcé d'imiter son cousin terrestre, la question étant de savoir s'il va y arriver dans les temps qui lui sont impartis.

En fait à court terme ce qui est le plus probable est que les ours polaires vont se rapprocher...des habitations humaines ! C'est d'ailleurs déjà le cas comme j'avais pu le narrer en février 2019 dans Judith Curry la climato-alarmiste et Susan Crockford l'abonnée absente en montrant par exemple cette photo très révélatrice du devenir de nos braves bestioles à poil blanc (non je ne parle pas de Didier Raoult cette fois) :

Ours polaires cherchant leur pitance dans une décharge russe.

Et fin 2019 on apprenait que 56 ours polaires avaient élu domicile dans un petit village russe : 
Cinquante-six ours polaires se sont rassemblés aux abords du village de Tchoukotka, dans l'extrême nord-est de la Russie, nourris par les habitants, à cause du retard de la formation de la banquise.
Mais il parait que cela n'a plus rien d'exceptionnel, du moins depuis quelques années :
selon [Tatiana Minenko, responsable de la "Patrouille ursidé", une association locale], la présence en nombre des ours n'est plus un phénomène exceptionnel car depuis des années, la banquise se forme tardivement, un des effets du changement climatique. "Tant qu'il n'y aura pas de grand gel, la mer ne va pas être prise par les glaces et les ours resteront sur la côte", a-t-elle dit.
Ben voilà, « les ours resteront sur la côte » et seront tributaires du bon vouloir des habitants pour se nourrir des déchets ménagers qu'ils voudront bien leur laisser, à moins que ceux-ci se lassent de la présence de ces animaux un peu dangereux (quand même) et qu'ils se mettent à les abattre en cachette, voire au grand jour si finalement la loi finit par les y autoriser.

Reste à se demander si les ours polaires pourront continuer à conserver leur appellation ; s'ils se mettent à manger des phoques contaminés (voir Les ours polaires mangent des phoques plus contaminés) alors ils pourraient souffrir de problèmes psychiques et seraient susceptibles de devenir...des ours bipolaires !

Je suis tellement furieux que je pourrais tout déchirer sur mon passage !
Je veux me pelotonner avec du popcorn et regarder un film pour gonzesses.


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