Je crois que je vais me recycler en voyant extra-lucide.
En juin 2018 j'écrivais le billet intitulé Le pôle nord libre de glaces en septembre...2035 ! dans lequel je montrais ce graphique arrangé par mes soins :
Ma pifométrique extrapolation jusqu'en 2035 en date de juin 2018 |
Evidemment, et je tiens ici à rassurer mes lecteurs, ce graphique avec ses deux segments de droites tracés à main levée n'avait strictement rien de scientifique, d'ailleurs je précisais ce qui suit :
Je ne garantis pas la précision non seulement de l'alignement de mon tracé censé être dans le prolongement de la droite de tendance des valeurs du mois de septembre, mais aussi des espaces représentant les années (si vous avez mieux vous êtes les bienvenus pour me proposer votre version)Cet exercice (jubilatoire ?) n'avait que pour finalité de pointer du doigt le fait qu'en extrapolant « bêtement » la tendance actuelle de l'extension de la banquise arctique quand elle est à son plus bas niveau, c'est-à-dire en fin d'été, eh bien on arrivait peu ou prou en 2035 pour voir un océan arctique totalement libre de glace à cette période de l'année.
Et voilà-t-il pas que vient de paraitre une étude dans la revue scientifique Nature, Sea-ice-free Arctic during the Last Interglacial supports fast future loss, dont voici un extrait du résumé :
The Last Interglacial (LIG), a warmer period 130,000–116,000 years before present, is a potential analogue for future climate change. [...] Improved model physics, including a sophisticated sea-ice melt-pond scheme, result in a complete simulated loss of Arctic sea ice in summer during the LIG, which has yet to be simulated in past generations of models. This ice-free Arctic yields a compelling solution to the long-standing puzzle of what drove LIG Arctic warmth and supports a fast retreat of future Arctic summer sea ice.
Le dernier interglaciaire (LIG), une période plus chaude de 130 000 à 116 000 ans avant notre époque, est un analogue potentiel du futur changement climatique. [...] L'amélioration de la physique des modèles, y compris un schéma sophistiqué de bassin de fonte de la glace de mer, entraîne une perte complète simulée de la glace de mer arctique en été pendant le LIG, qui n'a pas encore été simulée dans les générations précédentes de modèles. Cet Arctique sans glace apporte une solution convaincante à l'énigme de longue date de ce qui a conduit le LIG à se réchauffer et soutient un retrait rapide de la future glace de mer arctique en été.Pour faire court, de ce que je comprends de ce résumé c'est que les chercheurs ont simulé ce qui a pu se passer durant le LIG, il y a 130 000-116 000 ans, et en ont conclu qu'à cette lointaine époque l'Arctique s'était retrouvé totalement libre de glace ; ils en déduisent donc que comme nous nous acheminons vers une situation comparable à celle du LIG alors cela signifie que nous allons bientôt nous retrouver dans une situation identique.
Je n'ai pas accès à la totalité de l'article, seul le résumé étant accessible gratuitement, or dans ce résumé la date de 2035 n'est manifestement pas évoquée, cependant le site British Antarctic Survey, dans Past evidence supports complete loss of Arctic sea-ice by 2035, nous donne quelques explications complémentaires avec l'interview de Louise Sime, co-autrice du papier :
Dr Louise Sime, the group head of the Palaeoclimate group and joint lead author at BAS, says:
“We know the Arctic is undergoing significant changes as our planet warms. By understanding what happened during Earth’s last warm period we are in a better position to understand what will happen in the future. The prospect of loss of sea-ice by 2035 should really be focussing all our minds on achieving a low-carbon world as soon as humanly feasible.”
Selon le Dr Louise Sime, chef du groupe Paléoclimat et co-auteure principale à la BAS :Ainsi louise Sime semble aller encore plus loin que moi puisqu'elle dit « d'ici 2035 », ce qui signifie bien sûr « avant 2035 », à moins qu'elle ne se réfère qu'à la « perte de glace » qu'il faudrait limiter d'ici 2035 pour éviter un Arctique sans banquise un peu plus tard...? Mais juste avant la citation de Louise Sime l'article nous dit clairement ceci :
"Nous savons que l'Arctique subit des changements importants à mesure que notre planète se réchauffe. En comprenant ce qui s'est passé pendant la dernière période de réchauffement de la Terre, nous sommes mieux à même de comprendre ce qui se passera à l'avenir. La perspective d'une perte de la glace de mer d'ici 2035 devrait vraiment nous inciter à nous concentrer sur la réalisation d'un monde à faible teneur en carbone dès que cela sera humainement possible".
A simulation of the future using the same model indicates that the Arctic may become sea ice-free by 2035.
Une simulation de l'avenir utilisant le même modèle indique que l'Arctique pourrait se libérer des glaces de mer d'ici 2035.A mon avis l'article doit contenir des informations plus précises, des graphiques, par exemple, montrant une fourchette commençant par l'année 2035 (si quelqu'un a accès à l'article dans sa totalité qu'il veuille bien confirmer)
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Ajout du 13/08 : suite au commentaire de VB (à lire impérativement) voici un graphique figurant dans l'article scientifique :
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Le site Inside Climate News, dans Pools of Water Atop Sea Ice in the Arctic May Lead it to Melt Away Sooner Than Expected, relate également cette nouvelle étude :
A new study describes the role of melt ponds in the disappearance of Arctic sea ice 130,000 years ago, and how they could make the ice vanish again as soon as 2035.
Une nouvelle étude décrit le rôle des bassins de fonte dans la disparition de la glace de mer arctique il y a 130 000 ans, et comment ils pourraient faire disparaître la glace à nouveau dès 2035.On y trouve notamment cet intéressant graphique concernant l'extension de la banquise pour le mois de juillet depuis le début des mesures satellitaires (1979) :
Étendue mensuelle moyenne de la glace de mer arctique juillet 1979-2020 (source nsidc) |
Malgré le parcours en dents de scie on voit bien que la tendance est à la baisse constante au fil du temps ; actuellement la banquise se réduit moins vite et il est peu probable que le record de 2012 soit battu :
Étendue de la banquise arctique (source nsidc) |
Mais à moins d'être aveugle, ou idéologiquement tellement atteint que cela revient au même, on comprend vite que tôt ou tard, et plutôt tôt que tard, le record d'il y a huit ans sera battu puis largement dépassé pour finalement devenir un lointain souvenir, un creux parmi tant d'autres dans un graphique dont la droite de tendance plonge inexorablement vers le zéro.
2035 c'est demain, dans seulement 15 petites années, donc rien au regard d'une vie humaine (sauf si l'on est un ado boutonneux) et j'espère bien être encore là avec mon blog pour vous faire profiter de l'événement que certains, n'en doutons pas un seul instant, voudront toujours considérer comme normal et naturel, avec toutes les possibilités touristiques et industrielles qu'il proposera à la concupiscence des Etats limitrophes (qui commencent à affuter leurs couteaux)
La date de 2035 vient des simulations des différentes générations de modèles CMIP, ainsi plus spécifiquement de leur modèle HadGEM3. Avec leur modèle, ils trouvent 2035, mais les autres modèles CMIP6 donnent 2038, ce qui n'est pas tellement plus loin (voir graphique : https://imgur.com/UZurzbz).
RépondreSupprimerLeur conclusion mentionne explicitement 2035 : "The ability of the HadGEM3 model to realistically simulate the very warm LIG Arctic climate provides independent support for predictions of ice-free conditions by summer 2035. This should be of huge concern to Arctic communities and climate scientists." Et comme ils le disent, la confiance dans ces simulations vient du fait que leur modèle puisse représenter correctement le dernier interglacial.
Merci VB, heureusement que vous êtes là et avez accès à l'article dans sa totalité ; ils auraient quand même pu mentionner cette année 2035 dans le résumé, il me semble que cette date a son importance !
SupprimerEn tout cas on s'aperçoit qu'au plus tard en 2080 l'Arctique sera de toutes façons libre de glaces en été, avant que ce ne soit une majeure partie de l'année, ce à quoi il faut s'attendre pour la fin de ce siècle.