Mon précédent billet, Laure Resplandy, la petite française qui remet les pendules (de l'océan) à l'heure, a fait réagir mon lecteur fétiche BenHague qui croit tenir là son quart d'heure de gloire :
Cela n'étonnera pas grand monde si je dis que je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce commentaire.
Tout d'abord laissez-moi vous dire que si Nic Lewis a trouvé une erreur dans les calculs inclus dans l'étude Resplandy, bravo à lui, mais ce n'est qu'un petit bout de l'histoire que nous allons maintenant considérer dans sa globalité et non uniquement par le petit bout de la lorgnette de monsieur BenHague.
Tout d'abord ce n'est un secret pour personne, et certainement pas pour BenHague, que chaque fois qu'une étude parait allant dans le sens de ce que l'on va appeler le « consensus » (i.e. il y a un réchauffement climatique, celui-ci est causé par les émissions anthropiques de gaz à effet de serre et ce n'est pas une bonne chose pour nous et notre descendance) alors nous assistons à des réactions quasi pavloviennes de la part de la blogosphère climatosceptique afin de non pas critiquer mais simplement dénigrer l'étude en question ; dans le cas présent nous en avons un magnifique exemple avec l'inepte article de Bob Tisdale publié dans WUWT dans lequel on apprenait que Resplandy ne pouvait pas avoir raison parce qu'elle avait tort, ou quelque chose d'à peu près similaire ; on remarquera que Tisdale avait tout compris seulement deux jours après la publication de l'étude, mais qu'il était passé complètement à côté de l'explication de Nic Lewis qui, lui, a mis un peu plus de temps pour publier ses résultats.
On comprend alors un peu mieux mon propre commentaire :
En effet, que Resplandy ait commis une erreur de maths dans son étude, soit, mais la véritable question à se poser est de savoir quel est l'impact de cette erreur sur les conclusions de son étude, ce que nous ne savons pas maintenant puisque Laure Resplandy a écrit exactement ceci sur le site de Princeton :
Pour ce dernier point je n'ai pas accès à la totalité de l'étude, qui est derrière un paywall, donc je me fie à ce que disent ceux qui l'ont lue (ou semblent l'avoir lue) en entier, chacun y allant de ses hypothèses.
Par exemple James Annan nous montre ce graphique :
En regardant ce graphique on s'aperçoit que l'ECS de Resplandy est légèrement décalée vers la droite, mais pas vraiment de quoi fouetter un chat (en considérant bien sûr que ce graphique est correct, ce que je ne peux pas affirmer)
Si je ne me trompe pas la sensibilité climatique à l'équilibre (ECS) indiquée dans le dernier rapport du GIEC est comprise entre 1,5 et 4,5°C, avec une très faible probabilité qu'elle soit inférieure à 1°C ou supérieure à 6°C ; et si je ne me trompe toujours pas la limite basse (soit 1,5°C) devrait d'après Resplandy être remontée à une valeur de 2°C ; si je comprends toujours correctement, l'erreur commise sur l'incertitude reviendrait à remettre cette limite basse au niveau de 1,5°C, rien de plus, rien de moins.
Mais le plus important dans l'affaire, et qui a certainement échappé au d'habitude si sagace BenHague, c'est que Nic Lewis est l'auteur, avec...Judith Curry (tiens tiens…), d'une étude récemment publiée dans l'AMS et intitulée The Impact of Recent Forcing and Ocean Heat Uptake Data on Estimates of Climate Sensitivity dans laquelle les deux chercheurs « trouvent » une ECS médiane de 1,5K (soit 1,5°C), c'est-à-dire égale à la limite inférieure mentionnée dans le dernier rapport du GIEC !
On comprend alors un peu mieux pourquoi Nic Lewis a dû se précipiter sur l'étude Resplandy afin de « trouver » la faille puisque ladite étude remontait la limite inférieure à 2°C, quelque chose d'inacceptable pour lui !
Au final, s'il s'avère que la limite inférieure en revient au 1,5°C du dernier rapport du GIEC, il n'en restera pas moins que Nic Lewis sera toujours en-dehors des clous avec son 1,5°C d'ECS médiane.
Donc oui, pour donner en partie raison à BenHague :
Et non, « tout mon billet » ne reposait pas sur cette découverte, apparemment BenHague n'a pas lu (ou compris) la première partie dans laquelle il n'était nullement question de l'étude Resplandy, mais maintenant nous commençons à être habitués aux difficultés de lecture des climato « réalistes » venant s'exprimer (librement) sur mon blog.
Je voudrais terminer avec ce passage du commentaire de BenHague :
Mais comme on dit, « il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain », à mon sens le « bébé » se porte bien, elle est apparemment dans sa trentaine flamboyante et a donc encore 30 à 40 ans devant elle pour continuer à faire avancer la science, et mon petit doigt me dit qu'on reparlera d'elle, alors que Nic Lewis...mais il aura « aidé », et ce n'est déjà pas si mal, accordons-lui ce mérite.
Affaire à suivre, donc.
Autres lectures sur le sujet :
Anonyme8 novembre 2018 à 23:21
Apparemment Mrs Resplandy a reconnu son erreur (et meme remercié Nic Lewis) sur son blog de Princeton .
> Il est dommage qu' une revue de premier ordre comme Nature n' ait pas détecté l'erreur
> Il est dommage que les sites de référence n' aient pas détecté l'erreur , aient seulement repris en gros les conclusions et n'aient pas analysé en détail l'article comme ils le font lorsque des articles ne va pas dans leur sens.
> Il est dommage que ces memes sites de référence après avoir propagé l'article se taisent maintenant.
> En revanche votre réaction était prévisible : " Que Lewis pense avoir trouvé une grosse erreur, cela me fait dans l'immédiat sourire, tellement d'« erreurs » ayant été soi-disant trouvées et ayant fait pschitt par la suite"
Au moins dans ce cas précis, Nic Lewis a aidé la Science. Cela doit vous faire mal ...
Cette scientifique a commis une erreur dans son analyse . Ce n'est pas grave en soi (si vous saviez le niveau ras du sol en mathématiques de la plupart des chercheurs ...particulièrement en Science de la Terre ...) d'autant plus qu'elle réagit avec professionnalisme ...
Ce qui est grave , c'est que cette erreur grossière n'aient pas été détectée et la (sur) réaction des gens comme vous et des médias . Elle est symptomatique du climat pourri instauré par les militants/activistes du climat.
Je ne me fais aucune illusion sur votre réaction . Vous allez :
1) Minimiser l'affaire . Après tout 97% des scientifiques .... Certes mais tout votre "billet" reposait sur cette découverte ....
2) Embrayer sur les erreurs des climato_sceptiques ( Allegre , Courtillot, Lindzen ... etc etc ). Alors que cela n' a rien à voir avec le sujet ...
C'est triste . Vous etes pret à avaler n'importe quoi si cela confirme votre idéologie ....
BenHague
Cela n'étonnera pas grand monde si je dis que je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce commentaire.
Tout d'abord laissez-moi vous dire que si Nic Lewis a trouvé une erreur dans les calculs inclus dans l'étude Resplandy, bravo à lui, mais ce n'est qu'un petit bout de l'histoire que nous allons maintenant considérer dans sa globalité et non uniquement par le petit bout de la lorgnette de monsieur BenHague.
Tout d'abord ce n'est un secret pour personne, et certainement pas pour BenHague, que chaque fois qu'une étude parait allant dans le sens de ce que l'on va appeler le « consensus » (i.e. il y a un réchauffement climatique, celui-ci est causé par les émissions anthropiques de gaz à effet de serre et ce n'est pas une bonne chose pour nous et notre descendance) alors nous assistons à des réactions quasi pavloviennes de la part de la blogosphère climatosceptique afin de non pas critiquer mais simplement dénigrer l'étude en question ; dans le cas présent nous en avons un magnifique exemple avec l'inepte article de Bob Tisdale publié dans WUWT dans lequel on apprenait que Resplandy ne pouvait pas avoir raison parce qu'elle avait tort, ou quelque chose d'à peu près similaire ; on remarquera que Tisdale avait tout compris seulement deux jours après la publication de l'étude, mais qu'il était passé complètement à côté de l'explication de Nic Lewis qui, lui, a mis un peu plus de temps pour publier ses résultats.
On comprend alors un peu mieux mon propre commentaire :
[…] que Nic Lewis pensait avoir trouvé une grosse erreur m'a fait sourire, vous connaissez certainement le proverbe « chat échaudé craint l'eau froide », ce monsieur est du genre à nier certaines choses en temps normal, alors qu'il ait pensé trouver une erreur cela m'a fait sourire, mais je n'ai dit nulle part qu'il avait tort, relisez moi et arrêtez de me prêter des intentions qui sont plutôt habituelles dans votre camp.Effectivement, je n'ai à aucun moment dit que Nic Lewis avait tort et Resplandy raison, je me laissais tout bonnement le temps de la réflexion, et plus exactement de la réflexion de gens plus doués que moi ou que BenHague, avant de porter un jugement définitif sur la question, jugement que je n'estime d'ailleurs pas totalement définitif à l'heure actuelle.
En effet, que Resplandy ait commis une erreur de maths dans son étude, soit, mais la véritable question à se poser est de savoir quel est l'impact de cette erreur sur les conclusions de son étude, ce que nous ne savons pas maintenant puisque Laure Resplandy a écrit exactement ceci sur le site de Princeton :
New study estimate ocean warming using atmospheric O2 and CO2 concentrations. We are aware the way we handled the errors underestimated the uncertainties. We are working on an update that addresses this issue. We thank Nicholas Lewis for bringing this to our attention.
Donc nous allons sagement attendre, y compris monsieur BenHague, de voir une mise à jour de l'étude avec les résultats définitifs afin de considérer l'ampleur réelle de l'erreur commise ayant eu comme effet de « sous-estimer les incertitudes ».Une nouvelle étude estime le réchauffement de l'océan à l'aide des concentrations atmosphériques d'oxygène et de CO2. Nous sommes conscients que la façon dont nous avons géré les erreurs a sous-estimé les incertitudes. Nous travaillons sur une mise à jour qui résout ce problème. Nous remercions Nicholas Lewis d'avoir porté cela à notre attention.
Pour ce dernier point je n'ai pas accès à la totalité de l'étude, qui est derrière un paywall, donc je me fie à ce que disent ceux qui l'ont lue (ou semblent l'avoir lue) en entier, chacun y allant de ses hypothèses.
Par exemple James Annan nous montre ce graphique :
En regardant ce graphique on s'aperçoit que l'ECS de Resplandy est légèrement décalée vers la droite, mais pas vraiment de quoi fouetter un chat (en considérant bien sûr que ce graphique est correct, ce que je ne peux pas affirmer)
Si je ne me trompe pas la sensibilité climatique à l'équilibre (ECS) indiquée dans le dernier rapport du GIEC est comprise entre 1,5 et 4,5°C, avec une très faible probabilité qu'elle soit inférieure à 1°C ou supérieure à 6°C ; et si je ne me trompe toujours pas la limite basse (soit 1,5°C) devrait d'après Resplandy être remontée à une valeur de 2°C ; si je comprends toujours correctement, l'erreur commise sur l'incertitude reviendrait à remettre cette limite basse au niveau de 1,5°C, rien de plus, rien de moins.
Mais le plus important dans l'affaire, et qui a certainement échappé au d'habitude si sagace BenHague, c'est que Nic Lewis est l'auteur, avec...Judith Curry (tiens tiens…), d'une étude récemment publiée dans l'AMS et intitulée The Impact of Recent Forcing and Ocean Heat Uptake Data on Estimates of Climate Sensitivity dans laquelle les deux chercheurs « trouvent » une ECS médiane de 1,5K (soit 1,5°C), c'est-à-dire égale à la limite inférieure mentionnée dans le dernier rapport du GIEC !
On comprend alors un peu mieux pourquoi Nic Lewis a dû se précipiter sur l'étude Resplandy afin de « trouver » la faille puisque ladite étude remontait la limite inférieure à 2°C, quelque chose d'inacceptable pour lui !
Au final, s'il s'avère que la limite inférieure en revient au 1,5°C du dernier rapport du GIEC, il n'en restera pas moins que Nic Lewis sera toujours en-dehors des clous avec son 1,5°C d'ECS médiane.
Donc oui, pour donner en partie raison à BenHague :
Je ne me fais aucune illusion sur votre réaction . Vous allez :
1) Minimiser l'affaire . Après tout 97% des scientifiques .... Certes mais tout votre "billet" reposait sur cette découverte ....
Et je maintiens ce que j'ai écrit juste avant justement de parler de l'étude Resplandy :
[…] on peut penser que dans le prochain rapport à paraitre en 2022 les proportions auront encore changé, et pas dans un sens vraiment favorable aux thèses des « réalistes »...Qui vivra verra dit-on, par conséquent si nous sommes encore vivants en 2022 nous verrons bien ce qu'il en est.
Je voudrais terminer avec ce passage du commentaire de BenHague :
dans ce cas précis, Nic Lewis a aidé la ScienceIl me semble que si quelqu'un a fait avancer la science « dans ce cas précis » c'est bien Laure Resplandy qui à ma connaissance a utilisé une approche originale (i.e. non encore utilisée par personne avant elle) alors que Nic Lewis a simplement « aidé » en pointant une erreur qui malheureusement est passée au travers du filtre de la revue par les pairs.
Mais comme on dit, « il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain », à mon sens le « bébé » se porte bien, elle est apparemment dans sa trentaine flamboyante et a donc encore 30 à 40 ans devant elle pour continuer à faire avancer la science, et mon petit doigt me dit qu'on reparlera d'elle, alors que Nic Lewis...mais il aura « aidé », et ce n'est déjà pas si mal, accordons-lui ce mérite.
Affaire à suivre, donc.
*****
Autres lectures sur le sujet :
- climatecrocks
- scrippso2
- climatefeedback
- warmgloblog
- andthentheresphysics
- 667-per-cm
- judithcurry.com/2018/11/06/a-major-problem-with-the-resplandy-et-al-ocean-heat-uptake-paper/
- judithcurry.com/2018/11/07/resplandy-et-al-part-2-regression-in-the-presence-of-trend-and-scale-systematic-errors/
Oui du nouveau :
RépondreSupprimer"“Our error margins are too big now to really weigh in on the precise amount of warming that’s going on in the ocean,” Keeling told The Union Tribune. “We really muffed the error margins.”
Plus de doute qu'il y avait une grosse erreur et plus de doute que cela invalide la conclusion spectaculaire du papier (60% de chaleur accumulée de plus par an qu ' estimé auparavant ...)
BenHague
« After correcting their mistake, Keeling said their research indicates oceans are warming only slightly faster than previously thought, not dramatically faster as they initially reported. » (https://www.nationalreview.com/news/climate-scientists-discover-error-in-major-ocean-warming-study/)
SupprimerOkay, ils ont reconnu leur erreur, cela veut dire probablement que l'ECS est comprise entre 1,5 et 4,5°C, la limite basse n'étant pas relevée à 2°C.
Qu'avez-vous à dire de particulier sur le papier de Lewis-Curry affirmant que l'ECS médiane serait de 1,5°C ?
Assez bizarrement vous êtes prompt à pointer les erreurs des climatologues, mais vous êtes très indulgents envers ceux qui les contestent.
Cela-dit j'attends encore un peu avant de tirer des conclusions définitives.
Deux façons de considérer le problème de l'erreur du papier Resplandy (à cette date, il y aura certainement du nouveau plus tard)
RépondreSupprimerUn billet de Roy Spencer (http://www.drroyspencer.com/2018/11/the-sorry-state-of-climate-science-peer-review-and-kudos-to-nic-lewis/) n'apportant pas grande valeur ajoutée.
Un article sur Real Climate (http://www.realclimate.org/index.php/archives/2018/11/resplandy-et-al-correction-and-response/) par Ralph Keeling, l'un des co-auteurs, qui endosse l'entière responsabilité de l'erreur et donne des précisions utiles pour les spécialistes (dont je ne suis évidemment pas) ; les commentaires me font penser que Nic Lewis n'est pas lui-même à l'abri d'avoir commis des erreurs dans son analyse, nous verrons bien ce qu'il en est.
A noter dans le billet de Spencer, David Appell qui rappelle utilement que Spencer et Christie ont eux-mêmes commis une bête erreur de signe dans un de leurs papiers qui a passé la revue par les pairs, nous sommes vraiment peu de choses...