vendredi 15 mars 2019

Grèves et marches pour le climat, les raisons d'un échec prévisible

Ainsi donc les jeunes manifestent en masse pour le climat.

Hum, il faudrait plutôt dire que certains jeunes manifestent pour le climat, car comme les Gilets jaunes qui occupent régulièrement les ronds-points chaque samedi depuis plus de quatre mois sont loin de représenter la France entière, les manifestants pour le climat, que ce soit en France ou dans le monde, ne sont qu'une petite minorité de la jeunesse.

Bien que leur action soit parfaitement légitime et basée sur une approche intelligente (ils ont compris ce qui les attend) ce ne devrait être malheureusement qu'un coup d'épée dans l'eau sans réelle conséquence sur la marche des affaires de la société.

Quand je circule en ville je vois beaucoup de gens autour de moi, dans le métro, dans les rues, dans les cafés, et je n'ai pas vraiment l'impression qu'il y en ait beaucoup qui soient réellement sensibilisés au problème du réchauffement de la planète, mon sentiment est que si j'effectuais un sondage parmi tout ce petit monde et que je leur demandais quelles sont leurs principales préoccupations, la « sauvegarde de la planète » n'entrerait pas dans leur première priorité.

Vous en doutez ?

Un sondage effectué non par moi mais par l'insee nous donne ce simple graphique valable pour l'année 2018 :

Préoccupations des Français selon le sexe en 2018 (source insee)

Une autre source, celle de Ministère de l'intérieur, nous fournit un graphique nous présentant les choses sous un autre angle :

Problème le plus préoccupant dans la société française selon les personnes âgées de 14 ans ou plus entre 2007 et 2018

Dans les deux cas nous voyons bien que l'« environnement » arrive bien loin derrière le terrorisme, le chômage, la pauvreté, la santé ou la délinquance.

Mais nous voyons aussi la cécité des sondés, qui placent la sécurité routière encore plus bas alors que la route tue et blesse (souvent avec de graves séquelles qui durent toute la vie) bien plus sûrement que le terrorisme qui ne fait que quelques victimes par an, en tout cas bien moins que les maladies de la vie moderne (affections cardiovasculaires, cancers, diabètes, Alzheimer, etc.) n'en ont fait dans le même temps.

Nous nous rendons compte, avec ces sondages, que la majorité des gens mettent en tête de liste ce qui est sur le moment le plus visible et relèguent tout au bas du classement des problèmes soit qu'ils ne veulent pas voir (on ne veut pas voir qu'en prenant sa voiture on risque la mort à chaque instant) soit tout simplement qu'ils n'arrivent pas à voir parce que c'est trop lointain.

Le terrorisme est visible sur nos écrans de télé et quand un attentat survient les chaines en continu nous bassinent avec des images en boucle qui font entrer dans notre salon la tuerie qui vient de se produire ; mais pour le réchauffement climatique nous regardons les reportages d'un œil plus ou moins distrait, plus ou moins critique, avec dans la tête les fariboles qui y ont été insérées subtilement par la propagande climatosceptique agissant pour ordre des industries dont le business est justement lié au problème engendré qu'il faut surtout cacher sous le tapis.

Mais il n'y a pas que les industriels qui soient coupables, en fait ils ne sont que le prolongement de notre addiction à la consommation de masse, laquelle ne peut survivre qu'à l'aide de quantités toujours plus importantes d'énergies dépensées qui sont pour le moment toujours majoritairement composées de ressources fossiles qui ont mis des centaines de millions d'années à se constituer dans notre sous-sol et que nous dilapidons allègrement depuis un siècle et demi.

Les jeunes qui manifestent ont bien compris tout cela, ils ont compris quelles en seraient les conséquences pour eux et leurs enfants s'ils décident d'en avoir, mais voilà, ils sont minoritaires, leur voix porte sur les médias mais n'aura très probablement pas d'effet tangible sur la majorité de la population qui restera terrorisée par le terrorisme alors que celui-ci a fait, tenez-vous bien, 18 814 tués dans le monde en 2018 !

Regardons pour comparaison ce que nous dit le site planetoscope (quelques exemples seulement ) :
On va me dire que ces statistique ne sont pas fiables, peut-être, mais elles sont vraisemblables dans le sens où les accidents de la route sont bien la cause de nombreux morts partout dans le monde, difficile de le nier, mais on peut contester le nombre élevé de 1,3 millions de tués quand on regarde cet autre graphique tiré du site statista :

Nombre de décès causés par des accidents de la route dans divers pays du monde en 2017
Pour la France nous avons 3 456 tués, à rapprocher des 3 477 morts que recense la Prévention routière pour 2016 :

D'après les données 2016 communiquées par l'ONISR détaillées par type de véhicule et tranche d'âge.

Et pour le terrorisme, en France, qu'avons-nous ?

239 morts entre janvier 2015 et septembre 2017 si l'on en croit LCI !

A rapprocher des 232 morts français liés au terrorisme islamiste que recense Wikipédia en France et à l'étranger entre 2001 et 2015.

Alors vraiment, quel est le danger le plus réel qui nous guette quand nous sortons de chez nous, l'accident de la circulation ou l'acte terroriste ?

Pourtant ce n'est pas la réponse la plus logique qui est apportée par les sondés, c'est la réponse qui leur vient immédiatement à l'esprit, surtout si la question est posée peu de temps après un attentat !

Par conséquent pensez donc, le réchauffement de la planète à peine perceptible, environ un petit degré depuis un siècle, avec une montée des eaux quasiment invisible, 20 petits centimètres en un siècle répartis inégalement sur la planète (ça monte ou ça descend inégalement selon l'endroit où l'on se trouve), des événements extrêmes dont il est très difficile de discerner « à l'œil » s'ils sont de plus en plus violents (on vous dira toujours que la mémoire vous trahit et qu'il y a des statistiques qui montrent une catastrophe encore plus importante le 18 octobre 1854 dans l'archipel des Mélusines)

Et puis il y a notre addiction que j'évoquais plus haut, celle qui nous rend sourd à tout message nous avertissant du danger sournois qui nous guette en le recouvrant d'une musique un peu plus forte destinée à nous endormir en nous chantant la chanson des lendemains cornucopiens qui enchantent, celle qui met sur un piédestal le génie humain qui trouvera toujours une solution à nos problèmes, à condition bien sûr qu'il y ait des problèmes ma bonne dame !

Un intéressant article met les choses intelligemment en perspective en nous montrant ce graphique :

Les scientifiques mettaient déjà en garde contre le réchauffement climatique quand nos dirigeants étaient encore adolescents.

Il est ainsi cocasse de constater que quand Trump n'avait que 19 ans, en 1965, le président d'alors, Lyndon Johnson, était averti des risques d'une élévation du taux de CO² dans l'atmosphère ; et quand Macron avait 13 ans le GIEC publiait son tout premier rapport.

La courbe nous montre également, mais cela on le savait déjà, que le taux actuel de CO² est supérieur à ce que notre espèce, Homo sapiens, a jamais connu depuis son arrivée sur Terre.

Et qu'ont fait en pratique tous ces dirigeants ?

Trump, on le sait, s'est retiré de l'accord de Paris après avoir qualifié le réchauffement climatique de canular créé par les Chinois pour ruiner l'économie des Etats-Unis ; Macron a dit de belles paroles, mais son ministre de l'environnement a démissionné pour cause d'inaction ; Merkel n'a rien trouvé de mieux que de décider d'arrêter ses centrales nucléaires pour les remplacer dans la foulée par des centrales au charbon, faisant passer son pays pour l'un des premiers pollueurs de la planète par tête de pipe ; quant à Trudeau, il semble lui aussi parler et agir en contradiction avec ses paroles (voir ici)

Tous ces dirigeants actuels avaient donc la possibilité, quand ils étaient ados, de s'informer correctement et de prendre plus tard en compte ce qu'ils avaient appris, mais non, la réalité est tout autre.

Donc ne nous faisons pas trop d'illusions sur ces jeunes d'aujourd'hui qui manifestent pour le climat, non seulement ils sont minoritaires, mais il n'est même pas sûr qu'ils agiront plus tard, quand ils seront devenus adultes et « en charge des affaires », en accord avec leurs convictions actuelles.


2 commentaires:

  1. Veuillez poursuivre la rédaction de vos publications svp, votre site me fait vachement rire (merci!). Magnifique exemple : "Bien que leur action soit parfaitement légitime et basée sur une approche intelligente (ils ont compris ce qui les attend)" : les jeunes manifestants n'ont rien compris du tout, et je le démontre point par point dans cet article écrit par moi-même et publié aujourd'hui sur SCE, article qui démonte pièce par pièce cette absurdité des grèves scolaires pour le climat : https://www.science-climat-energie.be/2021/09/03/non-aux-greves-scolaires-pour-le-climat/

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je suis heureux de vous avoir fait rire, mais permettez-moi de vous dire que j'ai commencé à lire votre article sur SCE et que je n'ai pas pu aller au-delà du chapitre 2 intitulé Une méconnaissance abyssale en science, climat et énergie, à ce moment j'ai été pris d'un fou-rire inextinguible et je me suis froissé deux côtes. En effet, publier sur SCE et reprocher aux jeunes de ne rien comprendre à la science, alors que les auteurs publiant sur SCE pourraient se faire donner des leçons par exemple sur le cycle du carbone ou la physique de l'effet de serre atmosphérique, je trouve ça plutôt comique ; surtout quand vous mettez vous-même une pièce dans le juke box avec « Pour conclure sur l’effet de serre, notons enfin que ce phénomène lui-même est sujet à caution puisqu’il est incompatible avec les principes de base de la spectroscopie d’absorption et d’émission » en faisant référence à un article de Geuskens. Oui, c'est vraiment trop drôle, mais continuez je vous en prie.

      Supprimer