Pour minimiser un risque rien de mieux que de montrer au public une courbe quasiment plate afin de « démontrer » qu'aucun changement (et donc aucun dérèglement) n'est en cours ; j'en ai donné de multiples exemples dans mon blog, notamment dans Encore un graphique pour les nuls, par Willis Eschenbach ou Les clones d'Ivar Giaever ou encore dans Quand un manipulateur dénonce la manipulation (mais il y a quelques autres billets sur le sujet de la manipulation)
Toutes ces tentatives ne servent donc qu'à cacher sous le tapis ce qui nous attend, qui est inéluctable et n'est jusqu'à présent pas contesté de manière sérieuse, c'est-à-dire hors de ce que j'appelle la climatoscepticosphère, cette nébuleuse ressemblant à une armée mexicaine dans laquelle on trouve de tout et surtout du grand n'importe quoi.
Pour visualiser correctement la situation, à savoir d'où l'on vient, où nous en sommes et vers quoi nous nous dirigeons, il est indispensable de représenter l'évolution des températures et/ou de la concentration de CO² dans l'atmosphère avec l'échelle adéquate, cela permet de mieux se situer et de savoir à quoi nous attendre (ou plus exactement à quoi notre descendance doit s'attendre) ; « l'échelle adéquate » est celle qui permet de voir les choses, quitte à les amplifier dans une certaine mesure à l'attention de ceux qui ont oublié de mettre leurs lunettes.
Ainsi un graphique de ce genre est parfaitement adapté :
L'axe vertical des ordonnées est correct puisqu'il représente une fourchette de 10 degrés Celsius (ou 10 K c'est pareil) et permet de bien visualiser l'évolution de la température depuis -20000, soit un peu plus du double de la période du Néolithique qui a permis à l'« homme » de faire littéralement un bond en avant en passant du statut de chasseur cueilleur à celui d'agriculteur éleveur, avec toutes les conséquences qui se sont ensuivies (invention de la propriété, guerres, civilisations diverses ayant tenté de conquérir le monde à leur portée, explosion de la démographie mais aussi des découvertes en tous genres), et en se projetant sur les cinq cents prochaines années en fonction de plusieurs scénarios.
On peut discuter à l'infini de la qualité des scénarios utilisés, il n'empêche que nous n'avons rien d'autre à notre disposition pour évaluer notre futur, et rejeter ces scénarios pour la simple raison qu'ils ne se produiront certainement pas tels quels n'est pas très intelligent ; mieux vaut une prévision imprécise comportant des incertitudes que pas de prévision du tout, celui qui ne veut pas l'admettre essaie seulement de se trouver un alibi facile pour ne pas envisager ce qui va arriver.
Dans ce graphique nous voyons que seul le scénario RCP2.6, le plus bas donc, permettrait une limitation des températures à un niveau « acceptable » légèrement supérieur à la moyenne des températures des 10000 dernières années, ce que l'humanité pourrait assez facilement endurer sans remise en question drastique.
Le problème évidement est que ce scénario n'est pas du tout réaliste, probablement comme le plus pessimiste, le RCP8.5, qui impliquerait que nous serions totalement incapables de gérer la crise climatique et que nous continuerions à appuyer sur l'accélérateur même en voyant le mur se rapprocher de plus en plus ; le RCP2.6, lui, demanderait des efforts tels dès à présent qu'il est difficile d'imaginer qu'il puisse se réaliser.
Il nous reste les deux autres scénarios qui peuvent nous mener vers +4°C par rapport à l'ère préindustrielle, sachant que nous en sommes déjà aujourd'hui à +1°C à la louche ; évidemment rien n'empêche d'imaginer une augmentation encore plus importante que ces 4°C, tout comme nous pourrions, avec un peu (ou beaucoup) de chance, avoir moins que ces 4°C (rien n'interdit de rêver, mais cela peut s'avérer dangereux)
Nous voyons clairement sur ce graphique le « mur » auquel nous avons déjà fait face (nous sommes déjà en train de le gravir) depuis un peu plus d'un siècle, et nous voyons également ce que nous pourrions encore avoir à gravir dans les décennies/siècles à venir ; la situation est exceptionnelle dans le sens qu'elle est entièrement nouvelle pour nous les hommes (et les femmes aussi) et rien ne nous dit que nous serons capables de nous adapter, et si nous nous adaptons dans quelles circonstances nous le ferons ; dans le passé les hommes se sont souvent « adaptés » en faisant la guerre et en allant conquérir des territoires chez les voisins, on ne voit pas vraiment pourquoi cela serait différent dans le futur.
Le graphique est également intéressant en ce qu'il nous montre un certain nombre de « points de basculement » (tipping elements) c'est-à-dire des situations dans lesquelles à partir d'une certaine élévation de température il se passerait probablement « quelque chose » d'irréversible (irréversible à l'échelle humaine, pas sur des temps géologiques que nous ne connaitrons jamais) ; par exemple :
Voilà, c'est plus clair, non ?
Voir aussi :
Toutes ces tentatives ne servent donc qu'à cacher sous le tapis ce qui nous attend, qui est inéluctable et n'est jusqu'à présent pas contesté de manière sérieuse, c'est-à-dire hors de ce que j'appelle la climatoscepticosphère, cette nébuleuse ressemblant à une armée mexicaine dans laquelle on trouve de tout et surtout du grand n'importe quoi.
Pour visualiser correctement la situation, à savoir d'où l'on vient, où nous en sommes et vers quoi nous nous dirigeons, il est indispensable de représenter l'évolution des températures et/ou de la concentration de CO² dans l'atmosphère avec l'échelle adéquate, cela permet de mieux se situer et de savoir à quoi nous attendre (ou plus exactement à quoi notre descendance doit s'attendre) ; « l'échelle adéquate » est celle qui permet de voir les choses, quitte à les amplifier dans une certaine mesure à l'attention de ceux qui ont oublié de mettre leurs lunettes.
Ainsi un graphique de ce genre est parfaitement adapté :
Tipping Points Related to 2°C-Guardrail (source Schellnhuber (2016)) |
L'axe vertical des ordonnées est correct puisqu'il représente une fourchette de 10 degrés Celsius (ou 10 K c'est pareil) et permet de bien visualiser l'évolution de la température depuis -20000, soit un peu plus du double de la période du Néolithique qui a permis à l'« homme » de faire littéralement un bond en avant en passant du statut de chasseur cueilleur à celui d'agriculteur éleveur, avec toutes les conséquences qui se sont ensuivies (invention de la propriété, guerres, civilisations diverses ayant tenté de conquérir le monde à leur portée, explosion de la démographie mais aussi des découvertes en tous genres), et en se projetant sur les cinq cents prochaines années en fonction de plusieurs scénarios.
On peut discuter à l'infini de la qualité des scénarios utilisés, il n'empêche que nous n'avons rien d'autre à notre disposition pour évaluer notre futur, et rejeter ces scénarios pour la simple raison qu'ils ne se produiront certainement pas tels quels n'est pas très intelligent ; mieux vaut une prévision imprécise comportant des incertitudes que pas de prévision du tout, celui qui ne veut pas l'admettre essaie seulement de se trouver un alibi facile pour ne pas envisager ce qui va arriver.
Dans ce graphique nous voyons que seul le scénario RCP2.6, le plus bas donc, permettrait une limitation des températures à un niveau « acceptable » légèrement supérieur à la moyenne des températures des 10000 dernières années, ce que l'humanité pourrait assez facilement endurer sans remise en question drastique.
Le problème évidement est que ce scénario n'est pas du tout réaliste, probablement comme le plus pessimiste, le RCP8.5, qui impliquerait que nous serions totalement incapables de gérer la crise climatique et que nous continuerions à appuyer sur l'accélérateur même en voyant le mur se rapprocher de plus en plus ; le RCP2.6, lui, demanderait des efforts tels dès à présent qu'il est difficile d'imaginer qu'il puisse se réaliser.
Il nous reste les deux autres scénarios qui peuvent nous mener vers +4°C par rapport à l'ère préindustrielle, sachant que nous en sommes déjà aujourd'hui à +1°C à la louche ; évidemment rien n'empêche d'imaginer une augmentation encore plus importante que ces 4°C, tout comme nous pourrions, avec un peu (ou beaucoup) de chance, avoir moins que ces 4°C (rien n'interdit de rêver, mais cela peut s'avérer dangereux)
Nous voyons clairement sur ce graphique le « mur » auquel nous avons déjà fait face (nous sommes déjà en train de le gravir) depuis un peu plus d'un siècle, et nous voyons également ce que nous pourrions encore avoir à gravir dans les décennies/siècles à venir ; la situation est exceptionnelle dans le sens qu'elle est entièrement nouvelle pour nous les hommes (et les femmes aussi) et rien ne nous dit que nous serons capables de nous adapter, et si nous nous adaptons dans quelles circonstances nous le ferons ; dans le passé les hommes se sont souvent « adaptés » en faisant la guerre et en allant conquérir des territoires chez les voisins, on ne voit pas vraiment pourquoi cela serait différent dans le futur.
Le graphique est également intéressant en ce qu'il nous montre un certain nombre de « points de basculement » (tipping elements) c'est-à-dire des situations dans lesquelles à partir d'une certaine élévation de température il se passerait probablement « quelque chose » d'irréversible (irréversible à l'échelle humaine, pas sur des temps géologiques que nous ne connaitrons jamais) ; par exemple :
- à +5°C la calotte glaciaire de l'Antarctique Ouest (WAIS) serait plus qu'en grand danger de fonte plus ou moins totale, ce qui entrainerait à terme une élévation de plusieurs mètres du niveau des mers ;
- à +3°C c'est le Groenland qui pourrait fondre entièrement à terme, entrainant dans ce cas une hausse du niveau des mers de quelques 6 mètres (voir notamment Accelerating changes in ice mass within Greenland, and the ice sheet’s sensitivity to atmospheric forcing) ;
- à +2,5°C c'est la banquise arctique qui fondrait totalement en été, sans conséquence sur le niveau des mers, mais nous aurions aussi les glaciers de type alpin qui disparaitraient eux-aussi (mais là je pense définitivement, quelle que soit la saison) ;
- à +2°C ce sont les coraux qui mourraient (à + 1°C la situation est d'ores et déjà problématique pour eux)
Bien sûr tous ces événements ne se produiront pas du jour au lendemain, vous pouvez dormir tranquillement sur vos deux oreilles chers lecteurs, car l'inertie du système climatique est telle qu'il faudra peut-être plusieurs siècles pour voir le bout de certains d'entre eux, mais entre-temps nous aurons probablement un petit aperçu qu'il sera de plus en plus difficile de faire semblant de ne pas voir.
Un commentateur du site andthentheresphysics indique un lien intéressant :
John Hartz says:
March 4, 2019 at 9:57 pm
ATTP: By happenstance, I came across the following article today. What it describes and illustrates in graphic form is another dimension of what you have addressed in your OP.
Visualizing Interconnections Among Climate Risks, Mindzilla, Feb 28, 2019
En suivant ce lien on tombe sur ce diagramme de flux :
Flowchart Of Climate Risk Interconnections Related To The Food Sector. Image: National Institute for Environmental Studies |
Nous y voyons les divers impacts engendrés par certains facteurs climatiques, par exemple :
- l'augmentation des températures extrêmes (increase in extreme heat) entraine un déclin de la production agricole, qui entraine à son tour des problèmes socio-économiques tels que notamment l'augmentation des prix agricoles ;
- la hausse du niveau des mers entraine une augmentation des inondations, donc des dommages accrus occasionnés aux terres agricoles concernées, donc un déclin de la production agricole, etc. (voir ci-dessus) ;
- la combinaison de la hausse de la température de l'air, de la diminution des précipitations et de la hausse de la concentration en gaz à effet de serre entraine une diminution des ressources en eau ainsi qu'un déclin de la production agricole, etc. (voir ci-dessus) ;
- enfin l'augmentation des précipitations entraine dans les zones concernées des effets positifs tels que l'augmentation des prairies et donc dans ces cas-là une hausse de la production agricole.
Si l'on analyse ce tableau on voit nettement que les effets négatifs l'emportent très largement sur les effets positifs ; l'étude s'intitule Visualizing the Interconnections Among Climate Risks et l'on peut aussi y voir ceci :
Climate risks and their cause–effect relationships shown at the sectoral level. (Source agupubs.onlinelibrary.wiley.com) |
Le climat est sans nuance désigné comme essentiellement une cause entrainant un certain nombre d'effets sur les écosystèmes, la nourriture, l'eau, l'énergie, les infrastructure et l'industrie, et ayant des conséquences sur la santé ainsi que sur la sécurité.
Tout est interconnecté, le climat étant par exemple lui-même impacté par des rétroactions en provenance des écosystèmes.
On remarquera par ailleurs que la santé humaine subit l'influence négative de pas moins de quatre sources, mais à part cela il parait que l'espérance de vie n'arrête pas de progresser...
Un autre lecteur rappelle une autre étude parue l'année dernière :
rustneversleeps says:
March 4, 2019 at 11:13 pm
[…] the risk/impact I would be most concerned would be the one(s) described last year in “Trajectories of the Earth System in the Anthropocene”/, which – as you would know – considers the disturbing possibility that there is no stable climate around 2C…
[…]
Cette étude, Trajectories of the Earth System in the Anthropocene, montre notamment ce graphique :
A schematic illustration of possible future pathways of the climate against the background of the typical glacial–interglacial cycles (Lower Left).[…] |
Ce qu'il faut comprendre de ce tableau c'est que le système climatique de la Terre est considéré comme « stable » dans les limites d'une hausse de températures de 2°C ; au-delà, tout peut s'emballer vers des horizons indéfinissables et potentiellement peu réjouissants.
Pour information, les lettres figurant sur la trajectoire de notre planète dans le futur représentent l'équivalent dans le passé :
- A : Holocène moyen ;
- B : Eémien ;
- C : Pliocène moyen ;
- D : Miocène moyen.
Comme j'ai beaucoup de mal à m'y retrouver dans toutes ces périodes je ressors ce graphique que j'avais présenté dans Les enseignements du passé :
Data details: atmospheric CO2, temperature anomaly relative to the pre-industrial era and sea-levels relative to now measured and from palaeoclimate records. The graphic, created by "JG", is adapted from Table S1 from the paper's supporting information section, available here. Data sources are fully referenced. |
Voilà, c'est plus clair, non ?
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Voir aussi :
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